Le centre de vaccination de Lyon à Gerland © Antoine Merlet

Covid-19 : la Drôme et l'Ardèche durement touchés, tentatives d'explications

Désert médical, dimension historique, déficit d'information, ou dynamisme du territoire, Lucie Guimier, géographe spécialisée en santé publique, tente pour Lyon Capitale, d'interpréter les chiffres de vaccination en Auvergne-Rhône-Alpes. Décryptage.

Actuellement, la Drôme et l'Ardèche sont les deux départements de France où le virus circule le plus. Avec un taux d'incidence de respectivement 1116 et 973, la situation devient très préoccupante dans les hôpitaux des territoires. Pourtant, les chiffres de vaccination des plus de 12 ans, dans ces départements sont relativement hauts avec un taux de 83 %. À titre de comparaison, la région Auvergne-Rhône-Alpes est en moyenne complètement vaccinée à 86,3 % pour la même tranche d'âge.

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Quand il s'agit de parler de vaccination, la spécialiste en santé publique et géographe Lucie Guimier estime que "l'échelle politique" des départements avec laquelle "on est à l'aise en France" ne peut pas prendre son sens et "est plus subtile que ça quand on étudie la géographie de la vaccination". Par exemple,"en Auvergne-Rhône-Alpes, on sait bien que le sud de l’Ardèche et de la Drôme sont des territoires avec une plus forte implantation de personnes qui vont refuser la vaccination à cause d’un faisceau de déterminants", souligne Lucie Guimier, qui travaillait déjà sur la vaccination contre la rougeole, avant l'arrivée du Covid-19. Au nord de l'Ardèche et de la Drôme, les territoires sont bien plus industrialisés et les "populations sont différentes".

Le centre de vaccination de Lyon au palais des sports à Gerland © Antoine Merlet

"L'Ardèche du sud est de longue date un territoire de réticence du pouvoir central. Il y a eu pas mal de révoltes avec une histoire pleine de résistance", explique la spécialiste en santé publique. Et lorsque la question du manque d'information des populations rurales lié au désert médical est évoquée, Lucie Guimier admet que "c'est un déterminant" mais que "ce n'est pas que la question de l'offre des soins qui est étudiée". Effectivement, dans le Cantal, zone considérée comme rurale, plus de 90 % des plus de 12 ans sont vaccinés. La dimension historique doit alors aussi être prise en compte.

Le Rhône, bon élève de la vaccination

Lucie Guimier donne plusieurs réponses au fait que le Rhône soit globalement très vacciné (87,3% des + 12 ans sont vaccinés dans le département). L'approche théorique d'abord : "Lyon est une ville avec un pôle économique d'envergure européenne et une place internationale". De plus, selon elle, les techniques de pointe présentes entre Rhône et Saône contribuent - directement ou indirectement - à la vaccination. "La chimie, la pharmacie, les nouvelles technologies et l'important pôle pharmaceutique au sud de la ville" sont évidemment des éléments à prendre en compte.


"Lyon est très préparée aux vaccins [...] grâce à son histoire pharmaceutique du 19e siècle"
Lucie Guimier, géographe, spécialisée en santé publique. 


Historiquement, la capitale des Gaules, "est très préparée aux vaccins également grâce à son histoire pharmaceutique du 19e siècle [à l'Hôtel-Dieu notamment, nldr]". L'approche historique, l'approche théorique, mais également la réalité empirique pour Lucie Guimier. "Tout cela s'accompagne de toutes les personnes qui travaillent au sein de toutes ces institutions, dans les médicaments, les vaccins. Ils sont forcément plus aptes à la vaccination", détaille la géographe.

Tout comme les autres grandes villes, Lyon est également portée par "l'idée de la vie en collectivité". Si Lucie Guimier conçoit qu'il y a aussi des antivax dans les zones citadines, elle assure que les gens ont "bien conscience de l'importante de la solidarité et de la protection collective" dans les villes. Une autre hypothèse également : la campagne de vaccination lancée conjointement en 2015 par les laboratoires Sanofi, l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes, les HCL et la Ville de Lyon auraient eu un "impact positif" sur la vaccination et aurait "préparé les esprits à l'idée selon laquelle les vaccins sont importants".


"En ville, les gens ont bien conscience de l'importance de la solidarité et de la protection collective"
Lucie Guimier, chercheuse associée à l’Institut français de Géopolitique


Finalement, le pass sanitaire porterait également la vaccination contre le Covid-19, selon la chercheuse associée à l'Institut Français de Géopolitique. Que ce soient les lieux de culture ou bien les entreprises qui demandent de plus en plus le pass sanitaire, le dynamisme d'une ville participe à la vaccination. "Cela peut inciter les gens en villes, à se faire vacciner. Plus que dans les campagnes où les gens sont plus isolés", suppose Lucie Guimier.

Quoi qu'il en soit, il est difficile d'identifier "un seul facteur qui entraîne [ou freine, ndlr] la vaccination sur un territoire", assure la géographe Lucie Guimier.

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Le Centre de vaccination du Palais des Sports de Gerland (Photo by JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP)

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