Le maire de Montréal était à Lyon depuis lundi pour ouvrir les Entretiens Jacques-Cartier. Avant de repartir à Paris pour le sommet des élus locaux pour le climat en marge de la COP21, il a accepté de répondre aux questions de Lyon Capitale.
Lyon Capitale : Vous avez inauguré lundi les Entretiens Jacques-Cartier en compagnie de Gérard Collomb. Que représentent-ils pour la ville de Montréal ?
Denis Coderre : C'est non seulement la preuve d'une amitié profonde parce que c'est la 28e édition. Lyon et Montréal, c'est une aventure qui dure depuis trente-six ans. Le fait d'avoir une diversité de liens tant sur le plan institutionnel, économique que culturel est incarné par ces entretiens. Ils sont la preuve que l'on grandit ensemble. J'ai toujours dit que “seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin”. J'avais développé avec Gérard Collomb le fait que Montréal était la porte d'entrée vers l'Amérique et que Lyon était la porte d'entrée vers l'Europe. Le traité de libre-échange entre l'Europe et le Canada qui a été signé, mais pas ratifié, va offrir des occasions d'affaires exceptionnelles parce qu'il y a des liens profonds entre nos deux villes. Notamment grâce à la nouvelle ligne aérienne qui sera ouverte le 16 juin prochain entre les deux villes.
Vous parlez beaucoup de Gérard Collomb, quelles sont vos relations ?
Je l'aime bien, Gérard. Hier, on a fait ensemble la visite du nouveau stade de l'Olympique lyonnais. J'ai eu l'occasion de rencontrer Jean-Michel Aulas. Le message était de dire que vous avez dans votre ville un maire qui réalise, qui redynamise et revitalise ses quartiers. Vous avez un bel exemple d'une métropole qui s'investit dans les transports collectifs et le développement durable tout en ayant un partenariat progressif avec le secteur privé. Avec OnlyLyon, les start-up, et la smart city, je me sens chez moi ici. Lyon est montréalais et les Montréalais sont Lyon. Notre relation est très inspirante.
“À Lyon, il y a une façon harmonieuse et simple de faire des affaires”
Qu'apportent aux deux villes les Entretiens Jacques-Cartier ?
Ils sont un lien qui fait que l'on se retrouve. J'aime beaucoup les instituts et les universités qui permettent d'approfondir davantage des idées, des enjeux.
Qu'est-ce qui rapproche Lyon et Montréal aujourd'hui ?
Michel Côté, qui a en partie créé le musée des Confluences, est un Québécois. Mais il y a aussi des liens par la gastronomie, la culture, sur le plan muséal, sur le plan économique et sur la connectivité avec la smart city. Montréal essaie d'obtenir le label Frenchtech. Il y a beaucoup de proximité et d'affinité entre les deux villes sur le développement. Il y a beaucoup d'entreprises originaires des deux villes qui veulent s'installer dans l'autre.
Il y a une facilité pour les entreprises montréalaises de s'installer à Lyon ?
Oui. Parce qu'à Lyon il y a une façon harmonieuse et simple de faire des affaires.
“Au Québec, notre électricité vient à 98 % d’énergies renouvelables”
Frédérique Bove, le directeur des Entretiens Jacques-Cartier, nous a confié dans notre mensuel de décembre que “Lyon et Montréal s'expriment très bien à l'international et ont des potentialités de capitale sans l'être”. Vous êtes d'accord avec ça ?
Montréal, c'est encore plus fort parce que l'on est une métropole (rire). Plus sérieusement, cela dépend du point de vue politique. Il y a la réalité politique d'une capitale, mais une métropole c'est le poumon économique. Je suis aussi très ami avec Anne Hidalgo, de Paris, mais la vitalité économique de Lyon est remarquable. Il y a cette capacité de bouillonnement ici. Il n'y a pas besoin de l'étiquette de capitale ou non, mais plutôt un positionnement économique de facto.
Qu'est-ce que Lyon peut apprendre à Montréal, et inversement ?
C'est tous ces échanges de bons procédés et de pratiques de gouvernance. On vit en même temps le phénomène de métropolisation que vous avez assumé le 1er janvier dernier. Nous sommes très férus de votre approche en matière de transports collectifs et cette capacité à vouloir réaliser. Il y a une magnifique complémentarité. Vous savez, Montréal, c'est l'Europe en Amérique. Il y a cette sensibilité européenne, avec cette capacité nord-américaine de faire les choses rapidement. Dans le fond, nos principes de développement durable, de réalité de logement et autres sont universels. À Montréal, pour baisser les émissions de gaz à effet de serre, on essaie de changer de paradigme, notamment sur les transports où l'on mise beaucoup sur le tout-électrique. Au Québec, notre électricité vient à 98% d'énergies renouvelables.
Si nous avons des transports en commun à Lyon, vous avez sans doute remarqué que l'électricité vient majoritairement des centrales nucléaires ?
Oui, mais c'est pour ça que l'on peut apporter des solutions par le solaire et l'éolien.
En haut de Fourvière ?
Pourquoi pas ! Ça vente là-haut (rire).
“C’est dans les villes qu’il y a les plus grands problèmes et les plus grandes solutions”
Vous repartez ce mercredi à Paris pour la conférence des maires pour le climat. C'est important pour vous d'y être ?
Oui, parce que je suis ambassadeur de Métropolis, qui est l'organisation des grandes villes de plus d'un million d'habitants. Je suis aussi de ceux qui pensent que l'on définit le monde dans les villes et que le développement durable doit passer par les villes.
Vous ne pensez pas que les solutions viennent d'en haut ?
Non, c'est du bottom-up. C’est une approche ascendante. Tout part de la base. Ces questions de proximité vont être résolues par les gouvernements locaux. C’est dans les villes qu'il y a les plus grands problèmes et les plus grandes solutions. Et le phénomène de métropolisation en France démontre bien que, pour que les choses se fassent, il ne faut pas partir d'en haut. On juge une maison à ses fondations.
Vous êtes beaucoup sur Twitter. Vous twittez vous-même. Le faites-vous par plaisir ou est-ce seulement de la communication ?
Les deux. C'est un partage de communication. C'est un formidable outil pour atteindre les gens. Je réponds souvent personnellement. Quand ils ne sont pas gentils, je ne perds pas de temps. Je partage des passions de cinéma, de sport, mais aussi pour faire des sondages spontanés sur certains enjeux.
“Cette année, à cause des attentats, il y a eu la décision de reporter la Fête des lumières, que non seulement on comprend, mais dont on est solidaire”
C'est quelque chose que vous conseillez à Gérard Collomb ?
Je pense qu'il le fait bien. On se retweete mutuellement.
Mais il ne le fait pas lui-même ?
Probablement que non. Mais les leaders d'opinion sont sur Twitter, même si la majorité des gens sont sur Facebook. Twitter est un outil et, quand on veut faire passer un message aux médias, il n'y a rien de mieux qu'une citation en 140 caractères (rire).
Paul Bocuse a été le président d'honneur du premier festival “Montréal en lumière” en 2000. Lyon sera la ville d'honneur de l'édition 2017 du festival qui célébrera les 375 ans de Montréal. Vous voulez piquer la Fête des lumières ?
Déjà, un mot sur Paul Bocuse, qui est quelqu'un d’extrêmement inspirant. Plus de cinquante ans avec 3 étoiles, c'est un record qui ne sera jamais atteint. Montréal est une capitale de la gastronomie. On aime bien manger, on est très latin. Vivre ici à Lyon et bien bouffer ça fait partie des plaisirs de la vie. Concernant “Montréal en lumière”, c’est un festival culturel et gastronomique. En tant que ville nordique, on devait assumer notre nordicité, mais aussi représenter les quatre saisons. Chaque année, on fête une ville et cette ville nous le rend bien. En 2017, ce sera OnlyLyon. On ne veut pas piquer la Fête des lumières, mais on s'en inspire parce que la lumière est quelque chose d'universel. Cette année, à cause des attentats, il y a eu la décision de reporter, que non seulement on comprend, mais dont on est solidaire. Donc 2017 sera une célébration pour Lyon et Montréal.