Samedi 25 septembre, Handicap International organise sur la place Bellecour sa seizième pyramide de chaussures pour lutter contre les bombes à sous-munitions et les mines antipersonnel. Une manifestation qui leur permet de récolter environ 60 000 signatures à leur pétition. L'occasion de revenir sur l'utilisation de ces armes dans le monde avec Sylvain Ogier (photo), responsable de la communication de l'association.
Lyon Capitale : Le 1er août 2010, le traité d'Oslo contre les bombes à sous-munitions (BASM) est entré en vigueur.
Sylvain Ogier : C'est la bonne nouvelle de l'été. Aujourd'hui, il y a quarante États qui en font partie ; le dernier, la Bosnie, les a rejoints tout récemment. À partir de là, il faut que les États tiennent leurs promesses et qu'ils tarissent les sources de ces armes. Ils doivent aussi aider les victimes et permettre le déminage pour qu'il n'y ait plus de nouvelles victimes.
Quels sont les principaux États qui n'ont pas ratifié Oslo ?
Chine, Russie, États-Unis, Inde, Pakistan, Israël [l'Inde, le Pakistan et Israël n'ont pas signé le Traité de non-prolifération, ndlr]. Le traité d'interdiction des mines [Traité d'Ottawa, entré en vigueur le 1er mars 1999, ndlr], par exemple, a été ratifié par trois quarts des pays du monde. Ce qui lui donne la force d'une loi internationale. Actuellement, ce sont principalement des groupes armés non-étatiques qui les utilisent.
Quel est l'état des lieux des mines dans le monde ?
Les dernières utilisations par des États remontent à 2008 pour la Birmanie et 2009 pour la Russie en Tchétchénie. Au niveau de la production, il y a eu trois pays en 2008 : l'Inde, la Birmanie et le Pakistan. L'insertion de l'Inde sur la scène internationale l'amènera à interdire les mines. Côté victimes, la courbe a bien fléchi. Depuis dix ans que je suis à Handicap International, le nombre est passé de près de 10.000 victimes par an à un peu plus de 5.000 aujourd'hui.
Combien reste-t-il de mines dans le monde ?
En 2009, plus de 170 millions de mines seraient contenues dans les arsenaux d'une quarantaine de pays, principalement Chine (110 millions), Russie (24,5 millions), États-Unis (10,4 millions) et Inde (entre 4 et 5 millions).
Sur place, comment faîtes-vous pour déminer un terrain ?
On délimite d'abord la zone, puis les agents communautaires informent les populations locales, les éduquent sur les gestes à adopter et recueillent les données qu'elles détiennent, ce qui permet de faire un mapping des zones et de gagner du temps. Après vient le déminage, essentiellement manuel, avec parfois le recours à des chiens, voire des rats. Les démineurs – des anciens militaires français, britanniques ou de la Légion – délimitent les engins avec des baguettes puis les dégagent. Ensuite, soit il est possible de les désamorcer, soit, de façon plus générale – et notamment pour les BASM –, ils sont rassemblés avec les autres dans un endroit isolé et sécurisé avant de les faire exploser.
Les premières BASM ont été utilisées en premier par les armées soviétiques et allemandes pendant la seconde Guerre Mondiale. Aujourd'hui, qui les utilise encore ?
Les États-Unis au Yémen en décembre dernier. Avant ça, c'était en Géorgie à l'été 2008 pendant le conflit avec l'armée russe. Sans doute les deux parties les ont utilisées. Toutefois, elles nécessitent d'avoir des moyens assez importants car il faut des systèmes de largage. En ce sens-là, on peut espérer qu'il soit plus facile d'arriver à un arrêt total de leur emploi.
Quels pays surveillez-vous attentivement pour les BASM ?
Cette année, on va beaucoup parler du Laos. C'est un scandale absolu car il n'était pas un État belligérant dans la guerre du Viêt Nam et n'a jamais été en guerre contre les États-Unis. Simplement, ces derniers estimaient que les rebelles vietminh en avaient fait une base arrière. Actuellement, c'est le pays le plus pollué au monde avec 260 millions de sous-munitions déversées sur une population de moins de 7 millions d'habitants. Il y a, aujourd'hui encore, environ 300 victimes par an en moyenne. D'une manière symbolique, la première conférence des États qui ont ratifié le traité d'Oslo aura lieu dans la capitale laotienne au mois de novembre 2010.
Pour revenir à Lyon : le 25 septembre, combien de chaussures comptez-vous récolter ?
L'année dernière, on en était à 9.000 signatures et une douzaine de tonnes de chaussures. Les bonnes années, on vise les 10.000 signataires.
Qu'en faites-vous ?
Nous travaillons avec des partenaires locaux. À Lyon, nous avons un partenariat avec "Espoir et vie", une association de Portes-lès-Valence, qui trie, redistribue les chaussures en bonne état et recycle le cuir et le caoutchouc de celles qui ne sont plus portables. Leur réseau de distribution s'étend dans les pays d'Europe du Sud-Est jusqu'à l'Ukraine.
Il faudrait demander à tous ceux qui ont sur le terrain vu et peuvent témoigner de l'action HI de venir s'exprimer....