Point par point, des livreurs à vélo lyonnais ont repris le communiqué de presse envoyé aux rédactions par l'entreprise pour "mettre en évidence le fait que Deliveroo manie, avec un talent manifeste, l'art du double discours et de l'enfumage".
Les coursiers Lyonnais l'avaient annoncé dès le début de la gronde : ils n'ont plus rien à perdre. Selon eux, un temps est définitivement révolu, celui où la plate-forme de livraison à vélo anglaise "parvenait à se présenter au grand public comme une entreprise innovante, jeune, "cool", et avec qui les coursiers et les restaurateurs ont toujours un plaisir immense à travailler". Pour eux, l'entreprise a surtout "acquis une expérience certaine dans l'art de maintenir ses livreurs sous pression et de les contraindre au silence". Il y a peu, l'entreprise a fait connaître sa volonté de modifier les conditions tarifaires : certains livreurs à vélo ne seront plus rémunérés à l'heure, mais à la course et avec un montant bien précis de 5,75 euros à Paris et 5 euros dans les autres villes françaises. Tandis que l'entreprise se défend dans son communiqué que ce changement tarifaire "concerne moins de 10% des livreurs partenaires" et que ces derniers "ont été accompagnés individuellement", les livreurs concernés parlent eux "d'un ultimatum".
"Perdre entre 8 et 33% de revenus ou voir son contrat résilié"
Alors que l'entreprise assure avoir convié les livreurs concernés à "des entretiens individuels afin d'étudier leur situation et de les conseiller pour optimiser leur chiffre d'affaires avec la nouvelle tarification", les livreurs lyonnais auraient du mal à trouver lequel de leur collègue a en effet été contacté par téléphone puis convié à un entretien. Quant à l'argument de Deliveroo qui assure que "la tarification à la course offre l'opportunité aux livreurs d'obtenir un chiffre d'affaires plus élevé", les coursiers lyonnais rétorquent qu'"ils seraient ravis d'échanger avec "ces nombreux livreurs qui se cachent tellement bien qu'en échangeant entre nous, coursiers, nous sommes incapables de savoir qui ils sont et comment ils y sont parvenus". Ils estiment qu'avec la nouvelle tarification, ils perdront entre 8 et 33% de revenu par rapport à la tarification actuelle.
Chaque heure, le nombre moyen de courses est de 2,2, auraient assuré les responsables de Deliveroo, tandis que dans le communiqué, les livreurs mis en avant pour leur rémunération de 14 euros par heure payé à la course effectueraient 2,8 livraisons par heure. Ainsi, lorsque Deliveroo assure que leurs livreurs partenaires sont encouragés "à ne pas préférer la vitesse à la sécurité" et qu'ils "génèrent un chiffre d'affaires bien supérieur au SMIC horaire", certains s'arrachent les cheveux. "Cet argument est particulièrement honteux car le SMIC horaire s'entend sur une activité salariée, avec tous les avantages que l'on connait : congés payés, mutuelle, cotisation retraite, formation, remboursement de certains frais, etc. Combien doit gagner un indépendant pour arriver à un équivalent ? Une chose est sûre : bien plus que 5 euros par course" écrivent-ils.
Des plannings pris d'assaut
Afin "d'apporter au livreur plus de certitudes quant aux revenus qu'il peut générer", l'entreprise met en avant dans son communiqué son système de planification personnelle, qui permet aux livreurs de choisir leurs horaires. Un bon outil pour ces derniers, qui ne règle cependant pas que les "embarquements", le nom donné aux sessions de recrutement, ont lieu chaque semaine et engendreraient "un trop grand nombre de livreurs en activité par rapport au nombre de commandes". Les livreurs expliquent alors que les plannings pour réserver les créneaux sont pris d'assaut. "Les plannings sortent à 8 heures chaque mercredi. À 8h03, ils sont complets à 70%, et à 96% à 8h10". Les livreurs tenaient également à rappeler que "Deliveroo ne travaille qu'avec des autoentrepreneurs : précarité extrême, possibilité de rompre le contrat en quelques jours, pas de charges sociales à payer, pas d'assurance ou de mutuelle à prendre en charge, pas d'indemnité pour le coursier en cas d'accident et pas de chômage pour le coursier quand il se fait mettre dehors par Deliveroo". Les livreurs en colère avaient annoncé qu'aujourd'hui "ils ne pouvaient plus se taire", ils semblent désormais bien engagés à ne rien lâcher dans ce bras-de-fer.
Sincèrement, bon courage à tous ces livreurs. . Mais ils ont le choix entre 'être mal payés' (avoir du travail dans des conditions difficiles), et 'travailler dans une société qui paye mieux' mais qui finit par faire faillite parce que pas assez concurrentiel (vu que les consommateurs vont au 'moins cher' (sauf ceux qui ont les moyens de s'en foutre du prix)). . Au final, vous avez le choix entre vous faire avoir et vous faire avoir. Mais inutile de déprimer. Vivement la suite, post-monétaire.