Édito : confusion et incertitude autour des élections à Lyon

Édito de Lyon Capitale numéro 797 - Avec l’élection présidentielle, les élections municipales sont les scrutins où la participation est la plus importante. Ce sont celles qui sont, de loin, les plus incarnées. Un maire, un président constituent presque des figures paternelles et on attend d’eux de prendre en main la destinée d’une ville ou d’un pays.

Les habitants de Curis-au-Mont-d’or, de Givors ou de Lyon, aiment identifier ceux et celles qu’ils souhaitent placer aux commandes de leur commune. Le baromètre du Cevipof (Centre de recherches politiques de Sciences Po) a d’ailleurs toujours positionné les maires en tête des acteurs politiques en qui les Français ont le plus confiance. Pour reprendre la formule du président du Sénat, Gérard Larcher, ces élus sont “à portée d’engueulades” et leur proximité est un gage de fiabilité. Pourtant les compétences qui régissent notre vie quotidienne, comme le social, le transport, la sécurité, le logement et l’environnement sont devenues quasi nulles pour les communes, tandis que celles des communautés d’agglomération, avec un budget de 3,4 milliards d’euros pour celle de Lyon, sont de plus en plus gigantesques.

Jusqu’à présent, les maires avaient la charge d’élire le président de la Communauté urbaine de Lyon, devenue la Métropole. Ce mode de scrutin permettait ainsi aux citoyens de déléguer à leur élu ce choix, qui, il faut le dire, n’était pas toujours passionnant à leurs yeux.

Car cet échelon de pouvoir supra communal est aussi perçu comme un “machin” technocratique – comme le disait le général de Gaulle à propos de l’Onu – sur lequel le citoyen n’a pas de prise. C’est d’autant plus vrai lorsque le mode de scrutin est indirect, rendant cette élection peu visible. Et pour ceux qui l’ont observé, c’est presque encore pire…

Cette élection a toujours fait l’objet de petits arrangements. Même sans majorité politique, Gérard Collomb a chaque fois réussi à se faire élire, en négociant avec les maires des petites communes, notamment dans les monts d’Or, leur voix comptant autant que les maires des grandes villes de l’agglomération.

Mais pour cette échéance électorale, la donne est différente. Pour la première fois dans l’histoire de l’agglomération, le mode de scrutin permet d’élire des conseillers métropolitains qui choisissent un président dont la couleur politique doit être plus conforme aux bulletins de vote glissés dans l’urne.

Simple ? Pas si sûr…

Il ne sera en effet pas aisé de s’y retrouver les 15 et 22 mars prochains, avec deux bulletins de vote à mettre dans deux urnes, l’un pour la commune et l’autre pour la circonscription métropolitaine, et surtout des candidats dont on ne sait plus trop pour quelle élection ils se présentent.

Ainsi, Gérard Collomb s’affichera aux côtés de Yann Cucherat sur les affiches de campagne pour les municipales, alors qu’il ne s’y présente pas. Son rival à l’élection métropolitaine, David Kimelfeld, qui a plutôt une bonne notoriété dans la ville de Lyon, est nettement moins connu des électeurs des autres communes de l’agglomération, ceux-là même qu’il doit convaincre. À droite, le candidat Étienne Blanc a fait le choix de porter la campagne sur sa dimension municipale, au risque de rendre la candidature de François-Noël Buffet moins visible à la Métropole. De quoi se mélanger les pinceaux !

Mais le risque de confusion le plus important sera à observer entre les deux tours avec le jeu des alliances qui pointe déjà son nez. La liste municipale de Gérard Collomb, dont le virage à droite depuis quelques années est amorcé, pourrait fusionner avec celle du candidat LR. Quant à l’alliance entre l’écologiste Bruno Bernard et David Kimelfeld, celle-ci n’est pas complètement rejetée par les deux parties. Tout est possible dans cette élection. Bien sûr tout le monde s’en défend, chacun pour l’instant cherchant à rester dans son couloir, cette course étant tellement ouverte que tous imaginent déjà la gagner.

Dans ce grand marché électoral, où pourrait se troquer une gouvernance métropolitaine contre des gains municipaux, le risque pour l’électeur est de voir son bulletin lui échapper, utilisé dans des négociations de second ou troisième tour dont il serait exclu. C’est, au fond, ce sentiment de non-représentativité qui peut éloigner les citoyens des bureaux de vote et ainsi annihiler l’effet de la nouveauté d’un scrutin direct, qui devait nous permettre de mieux choisir notre gouvernance et nous rapprocher de nos élus. Il ne reste donc plus qu’à espérer que la teneur de cette campagne sera à la hauteur des enjeux de la deuxième plus grande agglomération de France.

Lyon Capitale 797, de mars 2020, en kiosque dès le 28 février ou dans notre boutique en ligne dès à présent. 

Un numéro "spécial élection" sera réalisé par la rédaction et disponible en kiosque dès le 7 mars 2020.

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