Éditorial du numéro de janvier 2021. Disponible dans les kiosques à partir du mardi 22 décembre.
La moitié des Français sont méfiants vis-à-vis de la campagne de vaccination et n'envisagent pas de se protéger du virus. C'est pourtant la seule solution pour nous immuniser rapidement et de manière collective.
Dissuader les autres de le faire, c'est retarder la fin de la pandémie. Même si chacun doit prendre une décision selon ses convictions, sa situation et surtout ses peurs.
Il est temps de passer à autre chose. L'année 2021 doit prendre sa revanche sur l'année écoulée et tourner la page noire au plus vite.
Il sera bien sûr impossible de l’effacer, tant nous avons tous été touchés – à des degrés différents – par cette crise sanitaire dont les stigmates se feront ressentir encore longtemps. Mais l’année qui vient doit être celle de la revanche. La campagne de vaccination qui va démarrer en France est la réponse que nous attendions tous impatiemment depuis l’apparition du virus.
En dépit de cela, au fil des mois et des semaines, la nécessité de se protéger par la vaccination est devenue de moins en moins acceptée par nos concitoyens.
Selon un sondage Ifop*, 59 % des Français sont méfiants vis-à-vis des vaccins et n’iront pas se le faire inoculer de sitôt.
C’est comme si la rapidité des chercheurs du monde entier à élaborer ces antidotes dans cette course effrénée contre la mort avait émaillé la confiance et nourri les doutes de nos concitoyens qui craignent que les enjeux financiers colossaux aient relégué au second plan la sécurité sanitaire.
Scientifiques, politiques, journalistes… tous les yeux étaient pourtant rivés sur l’avancée de ces recherches médicales et c’est probablement la première fois que l’élaboration d’un tel remède est autant observée, documentée et surtout vulgarisée. Le gouvernement a promis une transparence inédite sur toutes les étapes de cette campagne de vaccination, mais cela ne suffira peut-être pas à convaincre l’opinion publique.
Le temps où l’ignorance nous permettait d’avoir une foi inconditionnelle en la médecine est révolu. Les scandales liés aux laboratoires pharmaceutiques et les conflits d’intérêts suscités par les gains financiers autour des médicaments nous ont rendus définitivement plus méfiants.
Nous devons éradiquer ce virus en nous immunisant collectivement. Et la solution la plus rapide est le vaccin
Parallèlement, le doute exprimé par un grand nombre de Français face aux autorités sanitaires, suspectées d’être aux ordres d’un gouvernement taxé inlassablement d’amateurisme, a opéré un biais dans notre perception de la situation. Le rétropédalage lors de l’épisode des masques, la gestion contestée du confinement ou les arbitrages en faveur de certains intérêts économiques n’ont pas aidé à restaurer une confiance qui s’est dégradée au fil du temps.
Mais il ne faudrait pas que ce regard sévère porté sur ceux qui nous gouvernent ne nous fasse perdre de vue l’essentiel. Nous devons éradiquer ce virus en nous immunisant collectivement. Et la solution la plus rapide est le vaccin.
L’année écoulée nous a tous profondément plongés dans une anxiété, sûrement plus qu’on ne l’imagine nous-même. Il n’y a rien de honteux à ce que cette angoisse ressurgisse de manière viscérale, au moment où nous devons nous engager, chacun, dans un processus individuel de vaccination.
Car cette fois, face à l’aiguille, c’est un choix qui n’appartient qu’à nous. C’est une décision sur laquelle nous avons enfin prise et qui nous changera de ce sentiment d’impuissance et d’inaction auquel nous sommes confrontés depuis près d’un an !
Il ne s’agit pas de faire de cette vaccination une obligation morale, alors que nous avons la liberté de choix. Chacun doit prendre une décision mûrie selon ses convictions, sa situation… ou ses peurs.
Mais surtout ne cherchons pas à en dissuader les autres : les plus fragiles, les plus inquiets ou à l’inverse ceux qui font confiance aux autorités sanitaires ayant validé le protocole de vaccination et évalué son rapport bénéfice-risque. L’entreprise qui consisterait à distiller le doute face à cette nouvelle bataille qui démarre aurait pour conséquence de retarder considérablement la fin de la pandémie.
Cette crise a révélé les fractures de notre monde, et les enseignements que nous allons tirer de cet épisode sombre sont loin d’être gravés dans le marbre.
L’ humanité qui s’est construite depuis des millénaires en domptant la nature grâce aux progrès scientifiques va-t-elle “s’empêtrer dans la liberté de choisir” ? comme s’amusait à le souligner le philosophe Kierkegaard à propos de ses contemporains nourris de démocratie.
Les semaines à venir vont nous donner une réponse implacable sur les leçons que nous tirerons de 2020. Une année dont nous aurions tant aimé qu’elle n’eût jamais existé.
*Sondage Ifop du 28 novembre 2020
Au sommaire de ce numéro
par Paul Terra
par Paul Terra
• Quel avenir pour la police municipale de Lyon ?
• Entretien avec Marc Trévidic, ancien juge d’instruction au pôle antiterroriste
par Guillaume Lamy
• Lyon, eldorado des filières digitales
par Romane Guigue
• Clubs amateurs : une crise sanitaire, de multiples conséquences