Choisi pour sa connaissance des mécanismes électoraux et un positionnement équilibré, Bruno Bernard se prépare à gouverner, dopé par des sondages qui font d’EÉLV l’alternative la plus crédible à Gérard Collomb.
“Personne ne naît écologiste. Surtout dans le milieu d’où je viens où ce n’était pas la culture”, s’amuse Bruno Bernard. Lui est tombé dans le socialisme quand il était petit. Il est le fils de Roland Bernard, ancien sénateur et proche de François Mitterrand. Au retour de son ascension rituelle de la Roche de Solutré, l’ancien président de la République passait la nuit chez les Bernard. Le genre d’enfance qui creuse un sillon. Bruno Bernard s’engage d’abord en politique chez les socialistes avant de bifurquer. “J’ai adhéré aux Verts en 2002. C’était un cheminement long. Sur les sujets sociaux, je ne me retrouvais plus au PS, que j’ai quitté en 1996”, retrace-t-il.
Homme de l’ombre
Avec les écologistes, il s’implante à Villeurbanne, ville où il a obtenu son diplôme d’ingénieur et où il dirige aujourd’hui une entreprise de désamiantage qui emploie 25 salariés. Il y décroche son premier mandat en 2008 dans une majorité socialiste et écologiste qui va se fissurer quand EÉLV chipe un canton au PS, déclenchant l’ire de Jean-Paul Bret. Leur liste autonome échouant en 2014, Bruno Bernard perd ses mandats. Il va alors s’investir dans le mouvement, redevenant un homme de l’ombre. Il prend en main EÉLV dans la région. “Quand on est entrepreneur, on a plutôt des appétences à s’occuper de l’organisation. Il a progressé dans le parti, car il est bon dans ce domaine. Gérer une collectivité, ce n’est pas très loin de gérer une entreprise, il faut des compétences en ressources humaines, en administration et en finances. Il a ce profil. Bien plus qu’un intellectuel de telle ou telle cause environnementale qui serait incapable de gérer une collectivité. C’est un gage de sérieux”, pointe Jean-Charles Kohlhaas, candidat EÉLV à Oullins et dans la circonscription Lones et coteaux.
Aujourd’hui, les écologistes tentent de s’ouvrir de nouveaux horizons. Le duo Bernard-Vessiller investit le terrain de la sécurité à Villeurbanne pour mieux souligner les errements de la majorité socialiste sur le sujet. Dans sa campagne métropolitaine, Bruno Bernard s’attèle à rassurer des milieux économiques qui perçoivent Europe Écologie-Les Verts comme une menace. “Je sens que mon discours prend avec les entreprises. Elles ont vu que je suis pragmatique et qu’elles pourront continuer à travailler. Mais, naturellement, elles préfèrent des candidats comme Gérard Collomb ou David Kimelfeld”, admet-il.
Les sondages confirmant la dynamique des Verts, la peur des écolos s’invite dans la dernière ligne droite de la campagne. “Nos adversaires commencent à dire n’importe quoi sur Grenoble. Ça nous crédibilise et montre que l’on peut gagner. Dans leurs discours, ils se disent plus verts que nous, mais ils expliquent que les Verts au pouvoir, ce ne serait pas bon. Leur message est compliqué à lire”, balaie Bruno Bernard. Il savoure aussi de voir ses rivaux venir sur son terrain : “Les autres candidats parlent d’écologie, mais nous restons à 20 % dans les sondages. C’est la preuve que, sur ces thématiques, nous sommes les seuls à être crédibles.” Bruno Bernard s’imagine désormais en position de gouverner : “Je suis prêt, la probabilité d’y arriver est forte.” Les conquêtes municipales de Lyon et Villeurbanne lui ouvriraient, en effet, un boulevard vers la rue du Lac.
Connaissance de la science électorale
Dans la galaxie écologiste, il ne s’est pas fait connaître par sa radicalité environnementale. “Je le suis beaucoup plus que l’image que je peux renvoyer, mais dans cette campagne et à Lyon, il faut avoir une certaine forme de modération. Cependant, cela ne veut pas dire que je n’ai pas des objectifs très élevés”, assure-t-il. C’est par sa connaissance de la science électorale que Bruno Bernard s’est imposé chez les Verts jusqu’à devenir délégué national en charge des élections. “Étienne Tête était un grand spécialiste de la négociation électorale et Bruno est du même niveau. Mais il n’est pas que dans la sauce électorale. Il participe aussi aux discussions avec les autres partis ou en interne et à la recherche de compromis”, souligne Jean-Charles Kohlhaas.
Des compétences qui peuvent être décisives. Dans cette campagne, les écologistes jouent les premiers rôles, avec environ 20 % des intentions de vote. Un score qui les place en force dominante d’un bloc de gauche qui pourrait trouver un espace gagnant. La victoire de Bruno Bernard se nouera dans des discussions d’appareil autour d’un front uni contre La République en Marche et Gérard Collomb. Un candidat que son père avait lancé à Lyon en 1977. Le fils se propose de l’envoyer à la retraite quarante-trois annuités plus tard.
Bruno Bernard, 49 ans
• Né à Sainte-Foy-lès-Lyon
• Fils de Roland Bernard, ancien sénateur PS et proche de François Mitterrand.
• Ingénieur diplômé en mécanique des structures.
• Chef d'une entreprise de désamiantage.
• S'engage auprès d'EéLV en 2002.
• Candidat aux municipales à Villeurbanne en 2008.
• Candidat en 2014 sur une liste autonome du PS.
• Intègre direction nationale du parti EéLV en 2016.