Gérard Collomb – Janvier 2020 © Antoine Merlet
@Antoine Merlet

Élections à Lyon : qui est Gérard Collomb (LREM) ?

Fort de sa notoriété et d’un bilan consolidé depuis 2001, Gérard Collomb est le favori pour présider la métropole, une collectivité qu’il a créée et sur laquelle il veut laisser son empreinte. Mais il est affaibli politiquement. Il a perdu une partie de son équipe et s’avance sans réserve de voix au second tour.

Dans les années 1980, Gérard Collomb a cultivé, à son insu, une image de loser de la politique lyonnaise. Municipales après municipales, il a encaissé les désillusions et les brimades. Les plus dures venant de son propre camp. Au parti socialiste, il est méprisé par les instances nationales. Sous Mitterrand, les gouvernements se font sans lui. Idem sous Jospin. Gérard Collomb enraie la spirale des défaites en 1995 en prenant le 9e arrondissement. Il en fait son laboratoire, celui d’un socialisme pragmatique. Sur les anciennes friches industrielles du quartier de l’Industrie, il mise sur Bruno Bonnell et Infogrames. Jean-Michel Aulas suivra en installant le siège de la Cegid. Sous Raymond Barre, il se montre un opposant constructif. En 2001, les planètes s’alignent pour Gérard Collomb.

L’après-Barre vire au vaudeville. La droite se divise entre Michel Mercier et Charles Millon. Minoritaire en nombre de voix, Gérard Collomb devient maire de Lyon grâce au système électoral par arrondissement, à la tête d’une liste gauche plurielle. Les premiers mois du mandataire sont hésitants. Et puis Gérard Collomb trouve la recette de sa “movida” : les berges du Rhône, les Nuits sonores et Vélo’v. En 2008, il met en miettes Dominique Perben et s’offre une élection dès le premier tour. Ce triomphe, il le savoure. Il met aussi en lumière un nouveau visage de Gérard Collomb : plus autocratique et plus droitier. Une tendance qui va se confirmer d’année en année. En 2014, il est facilement réélu, ayant conforté, entre-temps, son image de maire bâtisseur à la Confluence. La vague bleue se fracasse sur le système Collomb.

Destin national

Mais aux yeux des cadres de Solférino, cela ne suffit toujours pas. François Hollande nomme trois Lyonnais dans ses gouvernements : Najat Vallaud-Belkacem, Thierry Braillard et Hélène Geoffroy. Autant de vexations pour le maire de Lyon. Son destin national prend une tournure ironique à l’été 2014. Arnaud Montebourg et Benoît Hamon sont virés du gouvernement. Gérard Collomb s’imagine déjà à Bercy et fait campagne. François Hollande met son veto et confie le ministère de l’Économie à Emmanuel Macron. “Je n’ai jamais rêvé d’être ministre, contrairement à ce que beaucoup ont pu dire”, tempère aujourd’hui Gérard Collomb.

L’aventure En Marche

Mais le maire de Lyon n’en nourrira aucune rancœur envers le ministre de l’Économie de François Hollande. Il est séduit par le réformiste Macron. Il sera son premier soutien et se lance à corps perdu dans l’aventure En Marche. Emmanuel Macron devenu président, Gérard Collomb est nommé ministre de l’Intérieur. Une tâche qu’il accepte “pour rendre service”, dit-il. Une nomination qu’il regrette aujourd’hui. Sans son concepteur, le système Collomb se fissure. En son absence, une partie de ses majorités municipales et métropolitaines savourent la nouvelle méthode de travail. Sentant sa ville lui échapper, Gérard Collomb revient à Lyon, mais ne la reconnaît plus totalement. En position de faiblesse, il fait l’impasse sur la présidence de la métropole qu’il laisse à David Kimelfeld. Il considère que les élus lui doivent tout et ne pardonne pas à ceux qui ne s’alignent pas. “Humainement, cela touche, forcément, de voir des amis partir. J’ai connu une période difficile”, glisse Gérard Collomb.

Une année et demie de bras de fer s’engage avec David Kimelfeld. En jeu : l’investiture LREM pour le scrutin métropolitain. À l’automne, Emmanuel Macron tranche en faveur du maire de Lyon. Un an après que ce dernier a quitté le gouvernement sans ménagement. “Sur le terrain, les gens nous disent qu’ils aiment Collomb, qu’ils l’apprécient, mais ils n’ont pas digéré son départ”, pointe Michel Le Faou, tête de liste de David Kimelfeld sur la circonscription Lyon Ouest. Gérard Collomb retient, les demandes de selfies dans la rue. Depuis son passage au ministère, il a vu sa popularité démultipliée. Dans cette campagne, le maire de Lyon mise sur lui : sa marque et son bilan. Il parie que dans une élection difficilement lisible, sa notoriété peut s’avérer décisive. “Il dit : « Votez pour moi et ce sera comme avant. » Les gens sont plutôt contents de son action. Il a donc tout intérêt à parler de son bilan plus que de son projet”, valide un habitué des campagnes lyonnaises.

Gérard Collomb ne dit pas autre chose : “Il faut que l’on continue dans cette voie et pas que l’on en change ou que l’on essaie autre chose.” Cette continuité se retrouve aussi dans son programme. Il porte les grandes infrastructures dont il s’était pourtant toujours tenu à l’écart. Il s’est ainsi emparé de l’Anneau des Sciences avec une vigueur nouvelle. Il en fait le prix à payer, 3 à 4 milliards d’euros, pour faire sauter le bouchon de Fourvière et transformer l’autoroute en boulevard urbain à la Confluence. “Le projet le plus écologiste de cette campagne”, avance-t-il dans une vision un brin surannée de l’environnement. Mais électoralement, le Gérard Collomb de 2020 n’est plus celui de 2014. Le passage à La République en Marche lui a ouvert quelques portes à sa droite, mais en a fermé plus à sa gauche. En six ans, il a presque perdu un tiers de son électorat. Les sondages le placent au premier tour entre 25 et 30 %, mais en font un colosse aux pieds d’argile. Pour gagner, il devra s’allier. Ses œillades à la droite ne sont pas des plus discrètes. Fin mars, ce pourrait être le prix à payer s’il veut devenir le premier président élu au suffrage universel de la métropole de Lyon. Une collectivité qu’il a créée et dont il veut écrire le premier chapitre de l’histoire.

• Gérard Collomb, 72 ans

• Né à Chalon-sur-Saône

• Professeur agrégé de Lettres classiques en 1970

• Entre au conseil municipal en 1977

• Devient député en 1981, puis sénateur en 1999

• Élu maire en 2001 puis en 2008 au 1er tour. Réélu en 2014

• Devient en 2015 le 1er président de la métropole de Lyon, collectivité qu'il a créée.

• Dès 2016, participe à la création d'En Marche avec Emmanuel Macron.

• Nommé ministre de l'Intérieur en 2017.

• Quitte ses fonctions en 2018 et redevient maire de Lyon.

 

[Article issu de notre hors-série spécial élections à retrouver ici]

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