Pour s’être opposée par deux fois en dix jours à une expulsion par avion, une Angolaise de 25 ans, sans-papiers, a passé sa première nuit en prison où elle a été placée en détention provisoire ce jeudi 5 août.
Le tribunal correctionnel de Lyon a fait preuve de fermeté en plaçant Sonia (prénom d’emprunt) en détention provisoire en attente de son procès pour refus d’embarquement. L’avocat et la famille de Sonia qui mettent pourtant en avant tout le danger que représenterait un retour en Angola pour la jeune femme, restent dans l’incompréhension. Selon eux, elle a toutes les raisons de prétendre au statut de réfugié politique qui lui a été refusé.
A deux reprises, Sonia est parvenue à échapper à son expulsion par avion. Elle risque aujourd’hui trois mois de prison fermes pour refus d’embarquement. La dernière condamnation marquante dans la région est celle de Guilherme Hauka Azanga, également Angolais, dont le refus d’embarquement s’était traduit par deux mois fermes, l’année dernière.
Une deuxième expulsion évitée
Suite à son arrestation le 23 juillet, Sonia est placée au centre de rétention administrative (CRA) de Saint-Exupéry en attente de son expulsion. Le jour de l’embarquement à bord de l’avion qui doit la reconduire à Luanda, la jeune femme se débat corps et âme, tant et si bien que la police est contrainte de faire machine arrière pour éviter le scandale. La scène se passe le 26 juillet dernier. Le séjour de Sonia au Centre de rétention est donc prolongé jusqu’au 4 août où un deuxième vol en direction de Paris, puis de Luanda est prévu.
Le jour J, le mercredi 4 août, la famille et quelques associatifs sont présents à l’aéroport Lyon Saint-Exupéry, deux heures avant le départ, pour expliquer la situation aux passagers et leur demander de refuser d’embarquer avec l’expulsée. "La police a voulu l’expulser en catimini mais elle nous a repéré et a vite compris qu’il n’était pas possible de la menotter et de l’embarquer de force. Les policiers sont venus m’intimider en me demandant mes papiers mais je suis resté catégorique. Ils ont finalement abandonné l’embarquement à bord de l’avion en descendant de la voiture de police", raconte le père, réfugié politique en France depuis 10 ans. Quant à savoir les raisons précises de cette deuxième annulation, présence des soutiens, résistance de Sonia ou colère des passagers, personne ne le sait.
Sonia est alors placée en garde à vue pour refus d’embarquement, elle comparait le lendemain, jeudi 5 août. Redoutant d’être contrainte de quitter le territoire pour de bon, la jeune femme refuse la comparution immédiate. Suivant la demande de la procureure, le juge la place en détention provisoire pour s’assurer de sa présence lors de l’audience programmée le 9 septembre. Mais la persévérance de Sonia est justifiée par son père qui nous avoue qu’il “craint pour sa vie en Angola". "Elle n'a rien fait d'autre que tenter de sauver sa vie en refusant d'embarquer vers un pays où ses jours sont en danger, résume Danielle de RESF qui a suivi ce dossier, je suis choquée qu’on la jette en prison”.
Menacée physiquement dans son pays
Sonia arrive en France en 2007 avec un visa de touriste. Elle a pour projet de vivre avec son père et sa mère, installés dans la région lyonnaise depuis 1999. Tout comme ses parents dix ans auparavant, elle fuit “les persécutions des autorités angolaises” qui recherchent son père, membre du parti d’opposition Unita (Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola), ignorant que ce dernier s’est réfugié avec sa femme en France où ils ont obtenu l’asile politique.
"Ils ont déployé tous les moyens pour me retrouver. Ils persécutent les membres de ma famille restés là-bas", nous déclare le père qui a connu la torture en Angola. Il est toujours sans nouvelle d’une autre de ses filles après qu’elle se soit fait arrêter à l’aéroport de Luanda en février 2008. Quant à Sonia, Philippe Praliaud, son avocat fait part à la barre des viols et intimidations qu’elle a déjà subi en Angola. La procureure, de son côté, ne cache pas qu’elle comprend "cette volonté viscérale de ne pas quitter le territoire français", motivant ainsi sa crainte que Sonia n’échappe à la justice.
Asile refusé
"On arrive en bout de course. Elle est en danger. Et pourtant, elle a vu toutes ses demandes (de régularisation, NDLR) rejetées", tel est le constat de la procureure. Son avocat rappelle que les demandes d’asile ont effectivement été refusées par la préfecture. Il se demande par ailleurs pourquoi l’administration considère que le fait que ses parents soient menacés en Angola et bénéficient donc du statut de réfugiés ne suffise pas à octroyer ce même statut à Sonia.
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