Le 26 septembre, une fausse campagne de pub a été placardée dans les rues de Lyon par les militants du groupe Extinction Rebellion. Ce collectif qui se présente comme "non-violent engagé pour la sauvegarde du climat et la préservation du monde vivant" a fait parvenir une tribune libre à la rédaction de Lyon Capitale.
Tribune libre : Nous, Extinction Rebellion, revendiquons l’action de détournement publicitaire réalisée à Lyon le jeudi 26 septembre 2019 et relayée dans de nombreux médias locaux. L’action est soutenue par les collectifs Alternatiba/ANV et Youth for Climate. Cette campagne n’a occasionné aucune dégradation et n’a enfreint aucune loi, hormis celle qui réserve à une poignée d’annonceurs privés la quasi-totalité de l’affichage visible dans l’espace public.
Nos affiches déclaraient « l’urgence climatique et écologique » en lieu et place de la métropole de Lyon en reprenant leurs codes de communication. Loin de nous l'idée de faire l'apologie des fake news : nous visions, par cette déclaration factice et originale, à inviter chaque habitant de la métropole à examiner un ensemble de propositions d’actions concrètes et à se questionner quant à leur intérêt pour notre communauté et notre environnement.1
Ces propositions sont inspirées des travaux de plusieurs collectifs locaux, parmi lesquelles le Manifeste pour une Métropole Vivable, fruit d’une collaboration inédite entre des associations et citoyens de la région lyonnaise désirant s’exprimer d’une voix commune : la Coalition Climat Rhône.
D’après le GIEC, plus de la moitié des leviers d’action contre le dérèglement climatique se situent à l’échelle locale. Ces leviers sont connus, mais ne sont pas ou très peu actionnés, car ils nuisent aux intérêts de court-terme d’une minorité d’acteurs, qui s’octroient toute la visibilité dans l’espace médiatique et publicitaire. En lieu et place des habituelles incitations à la consommation de masse, les panneaux d’affichage ont donc été mis à profit le temps d’une journée pour faire pénétrer ces idées dans le débat public, et inciter nos représentants à placer l’urgence écologique au cœur de leur politique.
La métropole de Lyon a-t-elle pris la pleine mesure de sa responsabilité ?
Le coût écologique de notre vie à Lyon est vertigineux. Si chaque habitant de la planète vivait comme un Lyonnais, il faudrait environ trois planètes pour répondre de manière pérenne et soutenable aux besoins de l’humanité.2 Pour réduire notre impact, l’évolution des comportements individuels est certes nécessaire, mais ne joue qu’un rôle très limité au regard des politiques publiques et des décisions d’investissement de l’état et des collectivités.
Depuis 2010, près de cent hectares d’espaces naturels et agricoles sont artificialisés chaque année sur le territoire du Grand Lyon3. La bétonisation se poursuit à bon train, y compris dans les espaces naturels protégés, pour y implanter des hangars logistiques et agrandir les centres commerciaux, laissant aux promoteurs privés une place croissante dans l’aménagement de l’espace public.
En région Auvergne-Rhône-Alpes, 182 espèces animales sont menacées d'extinction, sans compter le millier d’espèces végétales en danger. Les responsables en sont la disparition et la dégradation des milieux naturels (urbanisation et agriculture), la pollution des ressources (cours d'eau...) et le changement climatique.4
Si nous ne diminuons pas radicalement nos émissions de gaz à effet de serre, Lyon pourrait avoir le climat d’Alger d’ici la fin du siècle. En plus de provoquer de terribles canicules, cela occasionnerait une destruction quasi-totale des écosystèmes naturels, et mettrait directement en péril notre sécurité alimentaire.
Reculons d’un pas pour admirer le tableau.
On imagine parfois la vie sur Terre comme une vaste mosaïque d’écosystèmes sauvages, au milieu desquels l’espèce humaine se frayerait un chemin. Voici à quoi ressemble en réalité cette mosaïque, lorsque nous disposons ses carreaux de façon à représenter fidèlement la masse des mammifères terrestres.
- Répartition par masse des mammifères terrestres. L’Homme et ses animaux d’élevage représentent 98% de la masse totale, contre 2% pour les animaux sauvages (ci-dessus en vert).
Source : XKCD Comics
Nous commencerions par coller 358 petits carrés pour l’espèce humaine. Viendraient ensuite 520 carreaux pour le bétail. Puis 135 pour les moutons et 90 pour les cochons. Et à nouveau 90 pour le reste des animaux d’élevage. L’ensemble de tous les mammifères terrestres sauvages réunis nécessiterait à peine une trentaine de carreaux. Les éléphants, un seul.
Il y a 10 000 ans, soit une étincelle de temps à l’échelle de l’évolution, cette mosaïque était immensément belle et complexe. D’ici quelques décennies, elle pourrait être réduite à une poignée de carreaux gris. Cela dépend des choix collectifs que nous faisons aujourd’hui.
Reprenons nos droits, réchauffons nos voix.
Nous, Extinction Rébellion, sommes un collectif international non-violent engagé pour la sauvegarde du climat et la préservation du monde vivant. Nous, Extinction Rébellion, prenons acte du rythme alarmant d’extinction des espèces sauvages, de l’emballement climatique en cours, et des menaces directes que font peser ces destructions sur notre propre espèce. Nous, Extinction Rébellion, avons choisi la désobéissance civile non violente comme stratégie d’action, constatant que les moyens d’expression actuels sont insuffisamment démocratiques, et tout à fait inopérants pour affronter ces défis planétaires.
pourrait-on avoir la traduction ?