Jugé pour avoir tué de trois balles Chaïb Zehaf à Oullins en 2006, le meurtrier présumé n'est intervenu ce matin que pour donner des éléments techniques sur l'arsenal d'armes qu'il possédait chez lui, aujourd'hui placés sous scellés, et exposés dans la salle d'audience.
Un geste 'inventé par Tarantino'
Le défilé des experts ce matin a permis de se rapprocher au plus près de la mise à mort de Chaïb Zehaf, qui a eu le malheur de regarder ce soir de mars 2006 un match de foot dans le même bar que Jean-Marie Garcia. Jean Rochefort, expert en balistique, et Hervé Fabrizi, médecin légiste, se sont donnés beaucoup de peine ce matin pour retracer les faits, mimant avec conviction l'hypothétique rixe entre l'accusé et sa victime. Ce soir de mars 2006, après avoir roulé des mécaniques dans le bar en posant sur le comptoir son semi-automatique chromé, Jean-Marie Garcia aurait finalement décidé de s'en prendre à Chaïb Zehaf. Trois balles ont été tirées dans sa direction, dont deux au niveau du coeur. Et un troisième coup, fatal, a été porté à bout touchant, le canon pressé contre le sommet du crâne de Zehaf.
Lors de la reconstitution, Jean-Marie Garcia a lui-même montré son geste, pointant son arme au bout d'un bras tendu, avec la paume de la main serrant la crosse et légèrement tournée. 'C'est un geste de film', a déclaré Hervé Fabrizi. 'Inventé par Tarantino', a ajouté Jean Rochefort. 'Est-ce qu'on peut dire que cela a été le coup de grâce?' a demandé François Saint-Pierre, l'un des avocats de la partie civile, sans trouver de réponse définitive. Mais si la chronologie des trois tirs n'est pas réalisable, d'après l'ensemble des experts, il est certain que cette balle dans la tête ne pouvait laisser aucune chance de survie à la victime.
Un arsenal de 'braqueur'
Un fusil à pompe, un semi-automatique, un poignard pouvant se greffer sur une baillonnette et portant la gravure de l'aigle et de la croix-gammée nazis, deux carabines de chasse, un pistolet-mitrailleur... L'arsenal retrouvé chez Garcia et présenté dans la salle d'audience depuis hier est impressionnant. Sans compter le système d'explosifs et la machine appelée 'presse' (servant à recharger des balles), non exposés. Sur leur provenance, l'accusé qui se présente comme un 'passionné d'armes' ne lâche rien. 'Sauf votre respect, je ne veux pas m'exprimer là-dessus', répond-il face aux questions de l'avocat général. Pourtant, la découverte d'explosifs et surtout d'une cagoule, avec trois trous pour les yeux et la bouche, ont fait planer le doute sur des activités illicites. 'C'est habituellement une cagoule porté par les braqueurs !' estime Jean-Olivier Viout. D'autant que les armes ont été, pour la plupart, acheminées par des voies illégales.
Un crime raciste?
Le sceau nazi -un aigle avec une croix-gammée- figurant sur l'étui du poignard de Garcia ne semble être pour lui qu'un élément anecdotique, voire un signe décoratif sans intérêt. A l'issue des débats et juste avant les délibérations, il sera possible pour l'avocat général de poser une question, qui permettrait de requalifier le meurtre en crime raciste. Là-dessus, 'je n'ai pas encore pris ma décision, a confié ce matin Jean-Olivier Viout, en tout cas, cette question devra de toutes façons être débattue demain (mercredi, NDLR).'
Jean-Marie Garcia était sous l'emprise de l'alcool, au moment où il s'est mis à vouloir faire une démonstration de force avec son revolver, avant de tuer Zehaf sans possibilité de lui laisser une chance de survie. On a relevé chez lui un peu plus de 2,30 grammes d'alcool par litre de sang. 'Est-ce que c'est un taux extraordinaire?' a demande Jean-Olivier Viout. 'Eh bien il arrive souvent d'avoir des conducteurs avec ce taux-là', a répondu avec prudence l'experte biologiste qui est intervenue la première ce matin à la barre. Un taux pas vraiment exceptionnel, donc. Et peu d'excuses, par conséquent, pour Jean-Marie Garcia qui a vu peu à peu l'étau de la justice, manié ce matin par les expertises scientifiques, se refermer sur lui. Demain, Bernard-Henri Lévy viendra à la barre en tant que 'grand témoin', les associations anti-racistes n'ayant pu se constituer parties civiles. Le philosophe médiatique enchaîne les procès, puisqu'il était déjà à Lyon aujourd'hui pour le procès du dessinateur Siné.
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