INTERVIEW - Mercredi 4 mai, des avocats de toute la France se mobilisaient pour demander des moyens budgétaires adaptés à la mise en place de la réforme de la garde à vue. Celle-ci est souhaitée par la profession mais matériellement difficile à mettre en place. Entretien avec Me Myriam Picot, bâtonnier à la tête du barreau de Lyon.
Lyon Capitale : allez-vous à la manifestation ?
Me Myriam Picot : Bien sûr que j'y vais ! Et j'ai réservé 70 places de TGV. Nous y allons pour représenter tous nos collègues et réclamer des moyens financiers mais surtout d'organisation pour que cette réforme soit mise en place.
Justement, quels sont les problèmes d'organisation rencontrés par les avocats du barreau de Lyon depuis quinze jours ?
Dans les commissariats et les brigades de gendarmerie, il n'y a pas d'endroit réservé au travail de l'avocat. Nous demandons donc qu'une pièce nous soit dédiée. Et pour faciliter cela, nous proposons de regrouper les lieux de garde à vue. Ce qui ferait faire des économies à l'Etat en évitant un trop grand nombre d'aménagements des locaux et de déplacements des avocats.
Les avocats ont-ils relevés des problèmes d'accueil ?
Globalement l'application de la réforme à Lyon s'est bien passée. Les quelques soucis se comptent sur les doigts d'une main. Il semble que la police ait joué le jeu.
De ce fait, pas de demande d'annulation de gardes à vue ?
Quelques avocats ont déposé un mémoire joint à la procédure, surtout pour des gardes à vue débutées avant leur arrivée, mais c'est vraiment minime à Lyon.
Quelles sont vos revendications ?
C'est justement là où le bât blesse. Le ministère propose une indemnisation à l'acte : 61€ pour une demi-heure, 300€ les 24 heures. Ce que nous voudrions c'est que chaque Ordre des avocats passe une convention avec la Chancellerie pour une dotation par barreau et selon ses besoins. Ensuite, l'Ordre adaptera la rémunération à chaque cas particulier. Il faut savoir que, pour l'instant, les dix avocats intervenants pendant les gardes à vue à Lyon ne sont pas payés.
Côté financement, aucun fonds supplémentaire n'a été prévu pour la mise en place de la réforme. Par exemple à Lyon, l'Ordre doit gérer une employée en plus et de nouveaux locaux dédiés à l'avocat coordinateur, celui qui reçoit toutes les demandes et envoie ensuite le bon avocat au bon endroit, mais aucun budget supplémentaire ne nous a été alloué.
Regrettez-vous l'application rapide de la réforme ?
Non, on ne regrette pas. On est très en retard en France sur le droit des gardés à vue. Avec la Belgique, nous étions les seuls en Europe où l'avocat n'assistait pas à la garde à vue dans son ensemble.
Qu'espérez-vous de la part du ministère ?
Nous avons un ministre (ndlr : Michel Mercier) qui a toujours dit qu'il réformerait en tenant compte des besoins des professions touchées... Nous, nous voulons un vrai service de qualité, avec des avocats formés à ces missions particulières. Et ça ne peut pas se faire avec le budget actuel.