La montagne compte ses morts. Comme chaque année, la saison estivale est marquée par des accidents. 2018 est particulièrement meurtrière avec 36 morts à trois mois de la fin de la saison.
Cette saison est particulièrement meurtrière en montagne. Selon un décompte des Décodeurs, 36 personnes sont décédées en pratiquant des activités de montagne en France depuis le 1er juin, dont la moitié en Haute-Savoie, alors que la saison estivale 2018 n’est pas encore terminée. Cela porte à 18 le bilan temporaire des décès en Haute-Savoie. À la fin de l’été 2008, ce département avait compté 40 morts en montagne. Si les accidents se poursuivent à ce rythme cette année, ce triste record pourrait être battu.
L’alpinisme et la randonnée sont les activités les plus meurtrières : en Haute-Savoie, on compte 13 morts en alpinisme comme en randonnée sur 37 décès pour l’été 2016. Mais ce ne sont pas les seules activités accidentogènes : le même été, 2 personnes sont mortes en VTT, 3 en deltaplane ou parapente et 6 en pratiquant d’autres activités sportives. En 2016, le VTT est le sport qui a occasionné le plus de blessés (352) et le plus grand nombre d’interventions (354).
Réchauffement climatique et surfréquentation
Une partie de ces accidents est provoqué par des chutes de pierre. Yannick Vallençant, président du Syndicat interprofessionnel de la montagne (SIM), explique que le réchauffement climatique implique une dégradation des conditions en montagne : "avec la canicule, il y a moins de neige et les plaques rocheuses s’écroulent, ce qui multiplie les risques d’accidents". Face à l’augmentation des éboulements, la préfecture de Haute-Savoie avait déconseillé l’ascension du Mont-Blanc par la voie normale, celle du Goûter. Dimanche 5 août, 17 randonneurs avaient été bloqués après des chutes de pierre à Pralognan-la-Vanoise, en Savoie. Surtout, la surfréquentation de certains itinéraires phares est décriée. "Il y a une focalisation de la fréquentation sur certaines voies, comme la voie normale du Mont-Blanc. En cas de risques d’éboulements, plus il y a de monde sur une voie, plus le danger est important ", explique Yannick Vallençant. Un problème que les autorités tentent de réguler : la préfecture de Haute-Savoie a limité l’accès au Mont-Blanc via le refuge du Goûter, le chemin le plus emprunté lors de l’ascension du sommet mythique. Jusqu’au 15 août, les grimpeurs devront justifier d’une réservation au refuge du Goûter pour pouvoir passer. Des restrictions induites par " un dépassement récurrent et significatif de la capacité d’accueil du refuge" et "des risques graves d’atteinte à l’ordre public induits par cette surfréquentation" indique la préfecture de Haute-Savoie.
Des mesures "cosmétiques "
Pour Yannick Vallençant, ces mesures sont "cosmétiques". Les alpinistes et randonneurs se concentrent sur une poignée d’itinéraires, sans que les conditions ne soient toujours optimales. Les professionnels qui vendent des itinéraires en sont responsables : "Comme c’est facile à vendre, les agences se concentrent sur ce produit. C’est une solution de facilité, une soumission à la demande. Il faudrait une réflexion marketing et commerciale pour savoir comment sortir de la standardisation de l’offre", affirme le syndicaliste. Le Syndicat interprofessionnel de montage milite aussi pour une révision de la formation des professionnels, celle actuelle étant jugée trop conservatrice. Une demande a été faite auprès du ministère des Sports pour l’organisation d’Etats généraux de la sécurité des sports de montagne.