Alex Taraj, le président de l’Association des franco-iraniens du Rhône et le journaliste iranien Hamid Enayat font le point sur la situation des femmes en Iran, à l'heure où les critiques sur l'absence de femmes dans les hautes sphères décisionnelles se font de plus en plus nombreuses.
Hassan Rohani, le président du régime iranien, a régulièrement essuyé les critiques de l’opposition et des organisations des Droits de l’Homme, surtout dans les médias sociaux, pour ne pas accorder de place aux femmes dans son cabinet, notamment en tant que ministre. Ces critiques avaient même fait tache d’huile à l’intérieur du sérail. Il y a quelques jours, 157 des 290 députés du Majlis (le Parlement), avaient signé une pétition réclamant des femmes au poste de ministre dans le nouveau cabinet Rohani.
"Dans son nouveau cabinet, le président a ignoré d’une façon totalement stupéfiante et incroyable toutes les réclamations pour mettre des femmes au poste de ministre", s’est exclamée mercredi, Parvaneh Salahchouri, la présidente du groupe parlementaire des femmes au Majlis.
Salahchouri dont les propos ont été relayés par les médias iraniens, a rappelé que la délégation conduite par Federica Mogherini pour prendre part aux cérémonies du début de la 2nde investiture de Rohani, était entièrement constituée de femmes. Cette différence "est lourde de signification", a ajouté la cheffe des femmes députées du Majlis.
Nominations symboliques
Pilonné pour avoir ignoré toutes ces réclamations et toutes les promesses qu’il avait faites, Rohani a nommé mercredi deux adjointes du Président et une assistante spéciale, a indiqué mercredi le site du gouvernement sur le net. On est très loin des promesses données et des réclamations de tout bord, ces postes étant purement symboliques.
En fait, le problème se situe à un tout autre niveau. La théocratie iranienne ne reconnaît pas la place de la femme dans les activités sociales et tente par tous les moyens et tous les prétextes de les garder à la maison. Cette politique explique aussi les discriminations au niveau de l’emploi et des salaires qui ont pour objectif de décevoir les femmes du monde de l’emploi et de les acculer à rester chez elles.
Dans tous les pays, l’enseignement supérieur et l’emploi ont toujours contribué à l’amélioration de la vie des jeunes générations et les progrès de la société dans son ensemble.
En Iran cependant, les jeunes femmes sont victimes de discriminations institutionnalisées dans l’emploi et l’enseignement supérieur.
En Iran, 80% des emplois temporaires occupés par des femmes
Selon la presse iranienne, la plupart des femmes issues des universités "travaillent sous des contrats temporaires, pour un salaire en dessous du smic, sans la moindre sécurité dans l’emploi".
Un fonctionnaire de l’Institut de Recherches des fléaux dans le domaine de la sécurité sociale, dépendant du ministère de l’Intérieur, dont les propos ont été repris par l’Agence de presse Khabaronline (24 novembre 2016), précise que 80% des travailleurs occupant un emploi temporaire en Iran sont des femmes.
Alors que le seuil de pauvreté en Iran est fixé à un salaire mensuel de 3 millions de tomans (900$), beaucoup de jeunes femmes dotées de hauts diplômes universitaires travaillent sur le marché noir avec des salaires inférieurs à 150 000 tomans (45$).
Le taux de chômage des jeunes femmes a atteint son plus haut niveau de ces 20 dernières années en 2015, reconnaît par ailleurs Shahindokht Molaverdi, assistante spéciale de Rohani, chargée "des droits de citoyenneté" (psychnews.ir, 22 janvier 2017).
En 2016, le Centre National des statistiques d’Iran a déclaré que le taux de chômage moyen pour les jeunes femmes en Iran a atteint les 47,3 % pendant l’été de cette année.
Les femmes n’ont connu aucun progrès, ni dans leurs droits sociaux, ni dans leurs libertés fondamentales, ni dans leurs conditions d’embauche, sous la 1re investiture de Rohani.
Alors qu’en France, la parité est devenue la condition indispensable à une démocratie en quête de progrès, en Iran, Rohani donne le coup de grâce à tout soupçon de modération, en s’abstenant à présenter ne fût-ce qu’une seule ministre femme dans son nouveau cabinet. Ceci en dit long sur les espoirs qu’on peut focaliser de son côté pour une quelconque capacité de transformation du régime. En un mot, une chimère.
Voilà qui mérite bien une légion d'honneur ici ! Comme celle qui fut décernée sous le mandat Hollande au prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed Ben Nayef :http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2016/03/06/la-france-decore-le-prince-heritier-d-arabie-saoudite-de-la-legion-d-honneur_4877454_3218.html