Critiquée par près de 2 000 parents d'élèves signataires d'une pétition, l'adjointe en charge de l'éducation de la Ville de Lyon, Stéphanie Léger, défend sa réforme du périscolaire. "Je suis sûre qu'une majorité sera convaincue", assure-t-elle.
Le 21 mars, le conseil municipal a adopté la réforme du temps d'accueil périscolaire dans les écoles de la Ville de Lyon. Baptisée "Pep's", cette nouvelle organisation est depuis sous le feu des critiques d'un peu moins de 2 000 parents d'élèves signataires d'une pétition. Ils regrettent notamment de ne pouvoir venir chercher leurs enfants qu'à partir de 17 h 45 en maternelle et 18 h en élémentaire, contre 17 h 30 actuellement. "Pep's" prévoit en effet un temps unique de 16 h 45 à 18 h 30, avec un départ des enfants échelonné à partir de 18 h, contre une organisation actuelle en deux accueil distincts, l'un de 16 h 45 à 17 h 30, l'autre de 17 h 30 à 18 h 30, avec deux tarifs différents.
Lire aussi : Tarifs, activités, flexibilité... la Ville de Lyon revoit l'accueil périscolaire du soir
Craignant des "journées à rallonge" et déplorant que "les parents de fratries scolarisées en maternelle et en élémentaire doivent attendre 15 minutes" en raison d'un départ décalé, ils ont écrit à l'adjointe au maire de Lyon en charge de l'éducation, Stéphanie Léger, demandant "une courte fenêtre de 5-10 minutes entre 17 et 17 h 30" pour permettre aux parents qui le souhaitent, de venir récupérer leur enfant. Stéphanie Léger, répond aux questions de Lyon Capitale.
Lyon Capitale : Pourquoi avoir réformé l'accueil périscolaire ? Quels sont les besoins identifiés qui vous ont convaincu à changer ?
Stéphanie Léger : Depuis 2020, nous mettons en place un projet éducatif lyonnais construit sur une large concertation. Dans nos échanges et rencontres avec les parents le sujet du périscolaire nous a questionné, en entendant des mots comme "garderie", "mode de garde", avec des parents nous expliquant qu'il était compliqué pour eux de s'organiser parce que les heures étaient trop fixes. On sentait que ça n'allait pas, il fallait un système plus souple.
LC : Pourtant aujourd'hui, c'est un manque souplesse dans le nouveau système que déplorent les parents signataires de la pétition...
SL : La question du périscolaire touche à l'organisation des familles, on est dans l'expression de besoins personnels. Lorsque je discute avec des parents d'élèves, je n'ai pas une famille qui n'exprime pas un besoin différent de celles que j'ai rencontrées la veille. C'est très complexe pour nous de répondre à chacune des demandes, toutes les situations sont très différentes.
"L'accueil périscolaire est aussi sérieux que le temps scolaire, tout est question d'organisation"
Nous ne portons pas un projet de garderie, mais un projet d'accueil de loisirs où l'on propose aux enfants des activités de qualité. Et effectivement, cela demande davantage de temps pour permettre de mettre en place ces activités, d'où le recul de l'heure à partir de laquelle les parents pourront venir chercher leurs enfants.
LC : Vous semblez utiliser le mot garderie de façon péjorative, mais c'est peut être de cela dont ont besoin les parents. D'abord une solution pratique pour eux, avant la question du projet pédagogique.
SL : Je ne l'utilise pas de façon péjorative, simplement il y a effectivement une perception du périscolaire comme d'une garderie, or ce n'est pas ce que nous voulons. En tant que collectivité, nous ne souhaitons pas proposer simplement un lieu où l'enfant est gardé sans projet construit pendant que les parents arrivent en continu. Pourquoi l'enfant ne profiterait pas de ce temps après l'école pour participer à des activités de qualité ? Pourquoi ce temps ne pourrait-il pas être aussi riche que ce qu'il apprend la journée ?
Des parents me disent qu'ils sont en demande d'une garderie, mais d'autres parents me disent que les activités que les enfants font n'est pas de qualité. On se dit qu'aujourd'hui, avoir un temps plus long répond aussi à un besoin de parents et on vise surtout l'équilibre des enfants.
Un accueil périscolaire pour "encourager l'autonomie"
Le projet "Pep's" prévoit, à partir de 17 h, après une pause goûter, la mise en place de deux espaces entre lesquels les enfants pourront naviguer selon leurs envies et besoins. L'un baptisé "tranqui-bulle" leur permettra "sous la responsabilité d'un adulte et en autonomie" de lire, réviser leurs leçons et se consacrer à leur travail ou participer à des temps de lectures contées et des jeux de concentration. L'autre baptisé "le temps des copains", est un espace d'animations au sein duquel les enfants bénéficieront de contenus éducatifs enrichis et de cycles thématiques autour de jeux collectifs, d'activités artistiques, culturelles, sportives et de plein air.
Cette organisation fait craindre à certains parents que leurs enfants ne rentrent à la maison sans avoir fait leurs devoirs. "On a un peu de mal à voir comment des enfants vont travailler en autonomie pendant que leurs camarades sont en train de s'amuser à côté", expliquait un parent d'élève à Lyon Capitale. "Nous allons encourager l'autonomie, notamment pour préparer l'arrivée en 6e, indique Stéphanie Léger. Et d'ajouter : Ce que je veux dire aux parents, c'est que tous les enfants qui ont des devoirs pourront les faire à l'école. Les parents pourront laisser des préconisations aux animateurs pour qu'il veille à ce que l'enfant ait fait ses leçons."
LC : Les signataires de la pétition demandent la mise en place d'une fenêtre de 5-10 minutes avant 17 h 30 pour venir chercher leurs enfants, est-ce une demande que vous pourriez intégrer à la nouvelle organisation ?
SL : Pour l'instant le projet n'a pas été construit comme cela. Si l'on veut intégrer cette demande, il faut le reconstruire. Mais on est devant une somme d'intérêts personnels face à laquelle on propose de donner un cadre, tout comme le matin, les enfants n'arrivent pas à l'heure qu'il veulent à l'école.
"En dialoguant, je suis sûre qu'une majorité sera convaincue"
LC : Mais le temps scolaire est bien spécifique avec ses contraintes, que certains parents ne souhaitent pas voir se dupliquer sur le temps périscolaire censé les arranger. Vous assumez un choix politique d'un projet pédagogique construit, au prix de contraintes plus importantes pour les parents ?
SL : Effectivement ce sont des contraintes en plus. Comme je vous l'ai dit, on pourrait décider que le périscolaire soit une garderie de flux, mais ce n'est pas ce que nous portons. Si l'on veut qu'un projet de qualité se mette en place, il faut prendre en compte les équipes, les questions d'organisation et de sécurité des flux. Un parent qui arrive à 17 h 10, c'est un animateur qui est mobilisé pour lui amener son enfant. L'accueil périscolaire n'est pas un moulin, c'est aussi sérieux que le scolaire, tout est question d'organisation. Il y a 18 000 enfants qui fréquentent l'accueil de loisir, on sait bien qu'on ne va pas répondre à 100 % des besoins des parents. Mais en dialoguant, je suis sûre qu'une majorité sera convaincue.
LC : Cet allongement du temps d'accueil, 1 h 15 minimum (16 h 45-18h) contre 45 minutes sur le fonctionnement actuel, s'accompagne également d'une hausse des tarifs. Comment la justifier, notamment auprès de parents qui ont la possibilité de venir chercher leur enfant à 17 h 15 par exemple et qui devront venir plus tard, et payer plus.
SL : Ce n'est pas comparable. Effectivement, lorsque vous comparez le prix payé pour un enfant inscrit uniquement au premier temps d'accueil actuel au temps unique proposé avec "Pep's", oui c'est plus cher (pour une famille au plus haut quotient familial municipal, le tarif passe de 70 à 420 € par an). Par ailleurs, 60 % des familles ne paieront qu'entre 1 et 8 € par mois. Vous ne trouverez aucune offre de loisir de cette qualité à ce tarif là.
Lire aussi : Lyon : la réforme du périscolaire des écologistes contestée par des parents d'élèves
Tout est dit dans le titre: stop aux parents qui considèrent qu'ils peuvent "déposer" ou "récupérer" leurs bambins à n'importe quel moment. Le périscolaire est un service qui propose aux enfants des activités de groupe, cela devient impossible avec des arrivées ou départs "souples". Ne pas oublier que les parents sont responsables de leurs enfants, ce ne sont pas des objets que l'on met en consigne automatique.