En son temps, Pradel prenait exemple sur la "cité des anges" pour construire le tunnel de Fourvière, notre "plat de nouilles" à nous. Autres temps, autres mœurs. L'éditorial du rédacteur en chef de Lyon Capitale.
"La politique est un chapitre de la météorologie. La météorologie est la science des courants d’air." Rarement la formule de l’ancien président du conseil et maire de Lyon Édouard Herriot, n’aura été aussi tangible.
Le vieux monde vous salue bien ! Si les élections régionales n’ont pas passionné les foules – c’est le moins que l’on puisse dire avec pour tout potage un électeur sur trois qui est allé voter –, elles ont montré deux choses : le retour du "monde ancien" et du bon vieux clivage droite-gauche.
Et une sévère défaite des deux forces dégagistes, tout au plus disruptives, Emmanuel Macron d’un côté, Marine Le Pen de l’autre, les grands perdants du scrutin. La sortie (de route) est sérieuse : pas une seule région remportée. Chevaliers de la bredouille !
La table ronde s’agrandit. La vieille droite, dont on disait qu’elle était fichue, carbonisée, et la gauche dont on ne parlait quasiment plus, à l’article de la mort, vont retrouver la ferveur des agapes. Les cartes sont rebattues. Tapis vert.
Pour l’heure, chez Les Républicains, ils sont trois dans le jeu : Xavier Bertrand (Hauts-de-France) et sa droite sociale et sécuritaire, Valérie Pécresse (Île-de-France) plus libérale, aux faux airs macronistes, et Laurent Wauquiez (Auvergne-Rhône-Alpes), qui incarne la rigueur et l’anti-assistanat.
Tous ont en ligne de mire les présidentielles. Ce qui annonce, pour cet été, de sortir la machine à popcorns. Car quand bien même une odeur de sapin se ferait sentir chez les marcheurs, on pourrait bien assister au retour de "la droite la plus bête du monde" (bien qu’elle n’ait pas le monopole de la bêtise), avec un match qui prendrait des allures de pancrace fratricide.
Zôon politikon. L’homme est un animal politique. Si d’innombrables espèces vivent en communauté, nous dit Aristote, l’homme, en plus, partage des valeurs avec ses semblables. Et tout passe par le langage, cette faculté qui lui est propre pour communiquer.
Après la torpeur démocratique du pays, désabusé par le langage politique, la torpeur estivale promet de nouveaux discours, un élargissement du champ des possibles. En un mot, de la fraîcheur.
La Métropole de Lyon teste l’application de peinture expérimentale sur les trottoirs pour lutter contre les îlots de chaleur. Elle lorgne sur Los Angeles qui repeint ses rues en blanc pour atténuer les températures. En son temps, Pradel prenait exemple sur la "cité des anges" pour construire le tunnel de Fourvière, notre "plat de nouilles" (et tous ses silos) à nous. Autres temps, autres mœurs.
Pour la fraîcheur de vivre, en ce mois de Phoebe, les Lyonnais iront s’abandonner en terrasse, les beaux-arts de nos vies. Été en pente douce, apéro populo, coupe ou drink aristo. La tendance ? Les tiers-lieux, "laboratoires de création et d’utopie", nous dit l’ami Gilles Fumey, géographe à la Sorbonne. Au centre du plan de relance du gouvernement pour recréer localement du lien social.
Un lien social dont la France a bien besoin. Mais aussi, nous dit Michel Onfray dans Lyon Capitale, "la liberté d’esprit de Montaigne, l’éloge rabelaisien du corps jubilatoire et hédoniste, le raisonnement conduit selon le principe cartésien, la pratique de l’ironie voltairienne, le plaisir pris au marivaudage".
Sortons les popcorns !