L'inquiétant harcèlement des concurrents de Rhônexpress

Des contrôles à répétition et un simili de garde à vue sur ordre du préfet perturbent la vie du concurrent du tram Rhônexpress.

Il fait pas bon être entrepreneur dans notre pays. D'habitude, c'est la ritournelle des charges (trop lourdes) et de la réglementation (trop contraignante) qui amène à ce constat las de patrons (trop libéraux?). Mais dans le cas de Go Airport, la navette vers l'aéroport Saint Exupéry qui a décidé d'offrir un service alternatif au tram Rhônexpress, c'est plutôt le zèle de la préfecture qui amène à se demander à quoi bon créer des entreprises et chercher de nouveaux marchés en France.

Fausse garde à vue

Depuis le lancement de la navette « low cost » en décembre dernier (7,5 euros l'aller simple contre 15,7 euros chez Rhônexpress), ce n'est que tracas administratif et contrôle intempestif. Souvent devant les clients. Dernier en date, celui de la police des transports... pour exercice de taxi clandestin. Pourtant, les services de l'Etat sont parfaitement informés de l'autorisation délivrée par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) à Go Airport pour un service de transport occasionnel.

La semaine dernière, le contrôle de la police des transports a même flirté avec des méthodes de République bananière, hors de tout cadre légal semble-t-il. Selon Me Olivia Emin, avocate de Go Airport, le responsable de la société, M. Villeret, a eu « droit à une fausse garde à vue d'une heure et demie avec interdiction de téléphoner ou d'envoyer un message sinon les policiers lui promettaient qu'ils le gardaient 72 heures ! ».

Le parquet n'a d'ailleurs aucune procédure ouverte à l'encontre de Go Airport selon nos informations. Contacté, le préfet du Rhône, Jean-François Carenco, n'a pas souhaité répondre à nos questions se contentant d'un simple « le préfet et les services de l'Etat font appliquer la loi ». En l'occurrence, il s'agit de la loi du département du Rhône.

Clause de monopole

Car le Conseil Général a signé un contrat de concession avec Rhônexpress dont l'article 7 stipule que le département « s'engage également, pendant toute la durée de la concession (trente ans, ndlr.), à ne pas organiser ni encourager un service de transport collectif directement concurrent de Leslys (ancienne dénomination de Rhônexpress, ndlr.) ». « Le préfet a assuré les responsables du conseil général du Rhône par mail qu'il allait faire des contrôles en prenant acte de la situation » explique un élu départemental. « Il a alors donné des consignes mais ce n'est pas à la demande du département » ajoute le même élu.

La chambre régionale des comptes avait pourtant estimé, dans son avis du 5 juillet 2007, que la "durée du contrat fixée à trente ans n'est pas justifiée" en raison du fait que "le délégataire ne supporte aucune charge d'investissement (...) L'intégralité du coût de l'investissement est supporté par la collectivité". En clair, trente ans de monopole pour Rhônexpress, c'est quasiment trente ans de trop estime la chambre des comptes.

Peur d'être embêté

Pour ajouter aux difficultés, une campagne d'affichage dans le métro lyonnais a été écourtée par Clear Channel, en charge de la publicité dans le réseau lyonnais et JC Decaux n'a pas souhaité accueillir les publicités de Go Airport. « Par peur d'être embêté m'ont dit les responsables de Decaux » raconte M. Villeret.

A son lancement, Go Airport promettait des horaires fixes ainsi que des arrêts bien déterminés. Le service s'apparentait à une ligne de transport public régulière. Pas imaginable dans le périmètre des transports urbain du Sytral et du Département. La société modifie alors son système mais ça ne semble toujours pas satisfaire les autorités.

Choix

Une clause de monopole de 30 ans accorde de confortables marges bénéficiaires à la société Rhônexpress dont le capital est composé des mastodontes Veolia (28%) et Vinci (35%). Le reste étant détenu par la caisse des dépôts et consignations (37%), c'est-à-dire l'Etat. A côté, un petit minibus de 9 places procure un petit emploi à son heureux propriétaire dans un contexte de crise économique. Entre les deux, le préfet (qui parle beaucoup d'emplois pourtant) a semble-t-il choisi.

Pour aller plus loin: Aéroport : la navette low cost déjà lancée, aussitôt menacée

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