Le Canard Enchaîné vient de révéler que l’Iran était actionnaire d’au moins 10% de l’usine d’enrichissement d’uranimum du Tricastin (Drôme). Plus pour très longtemps, selon nos informations.
“Les mollahs contrôlent 40% de la société qui cogère le centre d’enrichissement de l’uranium du Tricastin. Par ce jeu de participations, l’Iran possède pas moins de 10% de l’usine du Tricastin”. L’info est signée du Canard Enchaîné (édition du 30 septembre) et nous a été confirmée par la direction de la communication d’Areva.
Cette révélation pour le moins déconcertante intervient alors que le programme nucléaire iranien fait l’objet d’une bataille diplomatique soutenue. La semaine dernière, l’Iran avait divulgué l'existence d'un second site d'enrichissement de l'uranium, près de la ville sainte de Qom.
Les Occidentaux, dont l’objectif à peine voilé est le gel pur et simple du programme nucléaire, de peur qu’il soit utilisé à des fins militaires, se réunissent aujourd’hui à Genève. Ils ont sommé Téhéran et son président Mahoud Ahmadinejad de s’expliquer sur le sujet.
“Nucléo” dollars
Téhéran est donc un actionnaire de l’usine d’enrichissement du Tricastin, la seule et unique d’enrichissement d’Areva qui alimente une bonne centaine de centrales nucléaires mondiales, dont les 58 françaises. “Le fait que l’Iran soit actionnaire n’a jamais été un secret, explique Gilles Salgas, d’Areva. Nous avons toujours été transparents. Le lien avec l’Iran, finalement, c’est l’histoire de notre pays, qui dépasse largement Areva”.
Petit flash-back. En 1974, l’Iran signe avec Paris un accord sur le nucléaire civil. L’Iran rentre dans le capital d’Eurodif, suite au retrait de la Suède. Plus d’1 milliard de dollars sont avancés par l’Iran pour la construction de l’usine du Tricastin. Mais avec la révolution islamique de 1979 et l’arrivée de l’Ayatollah Khomeiny, Téhéran suspend ses paiements et exige le remboursement des sommes prêtées. Certains soupçonnent le régime des mollahs d’avoir perpétré la vague d’attentats parisienne de 1986 et les enlèvements de Français au Liban par le Hezbollah pro-iranien.
Si le différend a aujourd’hui été réglé, reste que l’Iran est toujours actionnaire du Tricastin.
“Un actionnaire dormant”
Sur le papier, l’usine du Tricastin est gérée par Eurodif, elle-même détenue à 25% par la Société franco-iranienne d’enrichissement de l’uranium par diffusion gazeuse, Sofidif, dont le siège est à Paris. Or, Sodifis appartient pour 59,6% à Areva et 40,4% à l’Organisation de l’énergie atomique iranienne qui a pour boss Ali Khamenei, rien moins que le Guide suprême.Par ce jeu de participations, l'Iran détient donc 10% de l'usine du Tricastin.
Dans les faits, nous explique Areva, “il n’y a rien à craindre. L’Iran est ce qu’on appelle un actionnaire dormant. C’est-à-dire que de par sa position minoritaire, il n’a pas accès aux décisions qui peuvent être prises par Eurodif. Physiquement, je ne sais même pas s’ils sont aux assemblées générales du conseil d’administration”.
Bref, tout va bien dans le meilleur des mondes.
D’après Areva, cette participation de l’Iran dans Eurodif prendra fin d’ici à quelques mois, du fait de la dissolution d’Eurodif et de son remplacement par la Société d’enrichissement du Tricastin qui gérera la nouvelle usine Georges-Besse II, successeure de l’actuelle usine trentenaire.
D'une certaine manière cette information est positive. Mais elle pose quand même la question de la maîtrise des ressources énergétiques et fait 'tâche' dans un environnement médiatique déjà mal en point pour cause de tensions entre l'Elysée et Téhéran. A mon avis, il serait bon, tant sur le plan économique que médiatique, de garder un oeil sur cette affaire... On ne sait jamais quelle tentacule la finance peut mettre en mouvement pour atteindre des objectifs quelque peu troublant.