Béatrice Moderne

"L'objectif est de démontrer que le handicap fait partie de nous" assure Béatrice Moderne

Béatrice Moderne, fondatrice et présidente de Every Bodies, un défilé pour personnes en situation de handicap, est l'invitée de 6 minutes chrono / Lyon Capitale.

140 étudiants en stylisme de l’école Esmod. 2000 spectateurs attendus. 35 mannequins, dont Mayanne actrice dans le film Un p’tit truc en plus (sortie en 2024 et réalisé par Artus), Jordan Broisin vice-champion du monde de slalom en para ski alpin, Sandrine Cauderon-Paulin, championne de tennis fauteuil, Chantal Réquena, ancienne danseuse étoile de l’Opéra de Lyon.

Tous seront réunis le 17 mai prochain à l'occasion du le 1er défilé de mode inclusive à Lyon. Son nom : Every Bodies. Tous les corps. Tout le monde.

Jeudi 20 février, sous la présidence d'honneur du maire de Lyon, un dîner de gala caritatif est organisé dans les salons de l'Hôtel de Ville à 18h30 suivi d'une vente aux enchères (toiles des graffeurs Brusk et Cart'1, feutres de Dorothée Richard notamment)

"L'objectif est de démontrer que le handicap fait partie de nous, de notre société et que c'est tout un chacun, explique Béatrice Moderne, présidente de l'association PIH (Premièrement : Inclusion et humanité), porteure de l'événement. Le handicap, on ne doit pas le regarder comme quelque chose à côté, mais comme quelque chose qui fait partie de nous."

Cette ancienne adjointe et secrétaire générale de la fédération socialiste du Rhône, à l'énergie débordante, sait de quoi elle parle. Un cancer du sein l'a contrainte a opérer une masectomie. "Quand je suis sortie de l'hôpital, l'assistante sociale m'a montré un petit catalogue avec les endroits où je pouvais aller acheter mes sous-vêtements, et ce qui m'avait marqué à l'époque, c'était l'endroit. C'est-à-dire qu'il fallait que j'aille soit dans une pharmacie, soit dans un magasin d'orthopédie. En ce qui concerne les vêtements et les handicaps, souvent on va parler du vêtement mais côté pratico-pratique, rarement de l'esthétique, alors qu'il n'y a pas de raison qu'à partir du moment où vous êtes porteur de handicap, vous n'ayez pas le droit à l'esthétique."


La retranscription complète de l'entretien avec Béatrice Moderne

Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous recevons aujourd'hui Béatrice Moderne, bonjour !

Bonjour !

Béatrice Moderne, vous êtes présidente de l'association PIH "Première : Inclusion et Humanité". Votre association porte un événement qui s'appelle Every Bodies, un défilé de mode qui bouleverse les normes en donnant le beau rôle aux personnes en situation de handicap. Ça se passe le 17 mai prochain. Avant ça, une levée de fonds se passe jeudi 20 février, importante cette levée de fonds parce que justement il faut arriver à pouvoir organiser cet événement. Alors cet événement, est-ce que ça existe déjà en France des défilés réservés à des personnes en situation de handicap ?

Alors oui, bien sûr. On n'est pas les premières à réaliser un défilé de mode avec des personnes porteuses de handicap, sauf que cet événement Every Bodies a deux particularités, si je peux me permettre. La première, c'est la diversité des handicaps puisque vous allez avoir 35 personnes porteuses de handicap, mais aussi bien physiques, cognitifs que mentaux. Vous allez avoir aussi des catégories socioprofessionnelles diverses et variées. Vous avez des chefs d'entreprise, vous avez des cadres, vous avez des employés. L'objectif étant de démontrer que le handicap faisait partie de nous, de notre société et que c'était tout un chacun.

Et la deuxième particularité c'est que vous travaillez avec l'école lyonnaise de Esmod.

Bien sûr c'est évidemment ce partenariat avec l'école de mode qui fait toute l'originalité de l'événement. Quand on a réfléchi à travailler sur un défilé de mode ce qu'on souhaitait la question qu'on se posait c'était comment peut-on faire changer le regard. Et une des évidences était de travailler sur les jeunes et les étudiants. Il est bien évident que je ne remercierai jamais assez Nathalie Albregue la directrice d'Esmod de Lyon d'avoir embarqué toute son équipe et ses élèves dans cette aventure.

Et là, ils sont combien d'élèves à travailler avec vous justement pour ce projet de défilé ?

140.

Donc 140 élèves qui, finalement, pendant toute leur année scolaire, c'est avec le gros projet…

140 élèves, c'est-à-dire que vous avez un mannequin, alors je les appelle des mannequins d'un jour, puisque ce sont des gens lambda, ce ne sont pas des mannequins professionnels. Donc un mannequin pour trois élèves. Ce sont des deuxième et troisième années, et ils se sont déjà rencontrés. C'est vraiment un partenariat, un travail collaboratif, c'est-à-dire que ce ne sont pas les élèves dans leur coin qui vont travailler sur un vêtement, c'est vraiment des échanges entre les personnes porteuses du handicap et les élèves pour aboutir effectivement à une tenue.

Ah oui, alors ils vont créer la tenue de A à Z en partenariat avec le ou la mannequin ?

Voilà, donc vous allez aborder le style  évidemment de la tenue mais aussi la matière. Il est bien évident que suivant les matières et suivant votre handicap si vous êtes en fauteuil ou pas ça a une importance. Du coup pour les élèves des Esmod c'est un exercice absolument extraordinaire. Il y aura un avant et un après bien évidemment.

Effectivement, tout à l'heure, on parlait de sensibilisation. C'est important effectivement pour des élèves qu'ils soient sensibilisés finalement, qu'ils aient un regard aussi sur le handicap, parce qu'aujourd'hui de manière générale en France, on a gagné tous les efforts qui sont faits, mais il y a quand même toujours un regard qui est quand même un peu particulier.

Je pense que les efforts sont encore à faire, et puis c'est notre responsabilité collective effectivement de considérer qu'un jour, le handicap, on ne le regarde pas comme quelque chose à côté, mais comme quelque chose qui fait partie de nous-mêmes. En ce qui concerne les vêtements et les handicaps, souvent on va parler du vêtement mais côté pratico-pratique, rarement de l'esthétique, alors qu'il n'y a pas de raison qu'à partir du moment où vous êtes porteur de handicap, vous n'ayez pas le droit à l'esthétique.

C'est ce que vous appelez l'adaptative fashion, c'est ça ?

C'est ça

Qui doit s'adapter aux personnes en situation de handicap ?

C'est ça. Sur une jeune fille, Flora, qui a eu un accident il ya quatre ans, qui est dans un fauteuil, et elle vous raconte très simplement que quand elle choisit un pantalon, par exemple, quand elle est assise dans son fauteuil toute la journée, les jambières vont remonter à moitié des mollets. Donc, elle a froid l'hiver, elle met des chaussettes, c'est pas très esthétique. Et suivant la matière, si le pantalon est trop large et tout ça fait des plis, ça peut faire des cicatrices. Mais en même temps, elle est très coquette et elle est très très belle, et elle a envie d'avoir des tenues un peu fashion, et avec des paillettes, si on peut dire. Du coup, c'est ce qu'on voudrait faire changer un peu avec ce défilé.

Ce projet de défilé pour les personnes en situation de handicap, est-il né comment ?

Alors c'est d'abord une histoire personnelle, puisque moi j'ai eu un cancer du sein il ya quelques années avec une mastectomie, et quand je suis sortie de l'hôpital, l'assistante sociale m'a montré un petit catalogue là où je pouvais aller acheter mes sous-vêtements, et ce qui m'avait marqué à l'époque, c'était l'endroit. C'est-à-dire qu'il fallait que j'aille soit dans une pharmacie, soit dans un magasin d'orthopédie. C'est-à-dire que du jour au lendemain, j'allais plus au moment droit parce que mon corps était différent et j'avais ça dans la tête tout ça. Et j'ai eu une amie, Anne-Sophie Monnet, qui elle aussi à titre personnel a été touchée par le handicap de façon différente, et un jour, je l'appelle et je lui dis "Tu sais Anne-Sophie, et si on faisait un défilé pour faire bouger les choses ?" Et elle m'a dit "Allez, on y va". Voilà, l'idée est lieu comme ça, un jour, dans un…

Et vous avez finalement mis combien de temps entre penser le projet et puis ce projet qui aura lieu le 17 mai ? Il y a eu combien de temps ?

Un an et demi pour l'instant. Sur un fait un travail extraordinaire. Il faut quand même savoir que ce projet n'est réalisé qu'avec des personnes bénévoles. Aujourd'hui, on doit avoir une quarantaine des personnes qui travaillent avec nous. Donc des gens qui donnent de leur temps, qui donnent de leurs compétences, et on a aussi beaucoup de… enfin beaucoup. On a des mécènes qui nous ont rejoints. Sans ça, on n'aurait pas pu…

Alors le 17 mai, c'est le dernier mois, parce que ça va ? Le 17 mai, c'est où alors ce défilé ?

Le 17 mai, c'est à la salle de Barros à Villeurbanne, puisque nous avons le soutien de la ville de Villeurbanne. Donc, sur un site qui s'appelle Every Bodies sur lequel vous pouvez d'ores et déjà aller acheter des lieux. Donc, c'est une grande salle et j'espère que nous vous y verrons tous et toutes nombreuses et nombreux.

Et bien en tout cas, c'est une initiative remarquable. Il faudrait qu'il y en ait plus. En tout cas bravo pour ce projet, donc c'est le 17 mai prochain . À très bientôt, au revoir.

Laisser un commentaire

réseaux sociaux
X Facebook youtube Linkedin Instagram Tiktok
d'heure en heure
d'heure en heure
Faire défiler vers le haut