Jean Canetos
Jean Canetos, directeur de l’école d’ostéopathie d’Ecully ISOsteo

"L'ostéopathe, c'est un rebouteux qui a fait des études"

A l'occasion des 150 ans de la naissance de l'ostéopathie, samedi 22 juin, Jean Canetos, directeur de l’école d’ostéopathie ISOstéo, revient sur cette nouvelle approche de la médecine.

"Le 22 juin 1874, je fis flotter au vent la bannière de l'ostéopathie. Pendant vingt-cinq années, elle a résisté aux tempêtes, cyclones et blizzards de l’opposition. Ses fils sont aujourd’hui plus forts que lorsqu'elle fut tissée. Ses couleurs sont devenues si éclatantes qu’aujourd’hui, des millions commencent à la voir, à l’admirer et à chercher refuge sous ses ailes protectrices contre la maladie et la mort. Pères et mères viennent par légions, et demandent pourquoi ce drapeau n’était pas brandi avant. Je répondrai en disant qu’il a fallu de nombreuses années pour préparer le sol à recevoir la semence de cette science et ainsi que le triomphe final de la vérité, et que tout ira bien." Ainsi s'exprima, il y a précisément 150 ans, Andrew Taylor Still (1828-1917), le fondateur de l’ostéopathie ("Autobiographie du fondateur de l'ostéopathie", 2017, Edition critique établie par Jean-Marie Gueullette).

42 ostéopathes pour 100 000 habitants en France

A l'occasion de la naissance de cette nouvelle approche de la médecine, aujourd'hui largement plébiscitée (selon l'IGAS, l'Inspection générale des affaires sociales, en 2020, il y avait 42 professionnels pour 100 000 habitants en France et 10 500 étudiants en formation dans 31 écoles), sera diffusé ce samedi 22 juin à l'UGC Cité Internationale un film qui retrace l'histoire de l'ostéopathie. "On peut dire que l'ostéopathe, en fait, c'est un rebouteux qui a fait des études, explique Jean Canetos, directeur de l'école d'ostéopathie d'Ecully ISOsteo. Je m'explique : l'ostéopathie, telle qu'elle est pratiquée, a toujours été effectuée dans les campagnes par des rebouteux, c'est-à-dire des gens qui avaient un tour de main, qui pratiquaient des techniques non-invasives. Donc, l'ostéopathie s'est imposée comme médecine alternative complémentaire au début des années 1960 en France, et plus globalement en Europe."

Ostéo-Path - L'histoire oubliée de l'ostéopathie. UGC Ciné Cité Internationale, à 17h


La restranscription intégrale de l'entretien avec Jean Canetos

Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau rendez-vous de 6 minutes chrono. Nous accueillons aujourd'hui Jean Canetos. Vous êtes président d'ISOsteo, une école d'ostéopathie à Écully. Samedi 22 juin sera diffusé à l'UGC Cité Internationale, à l'occasion des 150 ans de l'ostéopathie, un film qui retrace l'histoire de l'ostéopathie, née un 22 juin 1874, à Kirgsville, dans le Missouri, aux Etats-Unis. Très rapide historique : c'était un docteur le docteur Andrew Taylor Still, lui-même fils de médecin, a changé d'approche de la médecine suite au décès de trois de ses enfants lors de la grande épidémie de méningite qui avait frappé les États-Unis. Il est passé de l'approche de la médecine traditionnelle à cette nouvelle approche. Et justement c'est quoi cette nouvelle approche qu'il a mise en place à cette époque ?

Merci de m'accueillir avant toute chose. La nouvelle approche que le docteur Still a mis en évidence, à cette époque-là, c'était une médecine globale, c'est-à-dire qu'il trouvait que la médecine telle qu'elle était pratiquée, notamment en période de guerre de Sécession, était beaucoup trop interventionniste, faisait souffrir les gens, sans forcément les soulager. Et il s'est dit "on peut peut-être faire autrement". Alors sa pensée rejoignait aussi des pensées qui avaient eu lieu deux siècles auparavant, je vais parler de médecine traditionnelle chinoise, des approches non médicamenteuses et non invasives, en tenant compte la globalité de l'être humain.

Alors, dans le teaser du film, qui sera diffusé samedi, une personne parle et dit que jusqu'au milieu des années 60 il valait mieux ne pas consulter un médecin.

Oui, parce que la médecine était celle d'Ambroise Paré, c'est-à-dire une médecine avec beaucoup d'opérations, avec beaucoup d'invasions, d'intrusions. Donc, cette médecine-là c'était "on opère, on soigne, on fait beaucoup de manipulations" mais sans trop respecter pas la globalité de l'homme avec un grand H.

Pendant très longtemps, les ostéopathes ont souvent été considérés comme des magiciens pour ne pas dire des sorciers. Et il y a eu beaucoup de procès d'ostéopathes pour exercice illégal de la médecine. Comment on est passé de ces procès un peu je dirais en sorcellerie à une médecine alternative finalement qui a été reconnue ?

Oui, alors on peut même dire que l'ostéopathe, en fait, c'est un rebouteux qui a fait des études. Je m'explique : l'ostéopathie, telle qu'elle est pratiquée, a toujours été effectuée dans les campagnes par des rebouteux, c'est-à-dire des gens qui avaient un tour de main, qui pratiquaient des techniques non-invasives. Donc, l'ostéopathie s'est imposée comme médecine alternative complémentaire au début des années 1960 en France, et plus globalement en Europe.

Mais avec une reconnaissance tardive.

Avec une reconnaissance tardive. En fait, c'est la loi Kouchner de 2002 et l'article 75 qui a permis l'activité d'ostéopathe libérale, telle que nous l'avons connue maintenant, juridiquement avec des décrets de formation qui sont arrivés en 2007 et une amélioration de ces décrets de formation qui sont arrivés avec les textes réglementaires de 2014.

L'IGAS, l'Inspection générale des affaires sociales, explique que la France se classe au premier rang mondial en termes de densité et de progression du nombre d'ostéopathes. Les chiffres datent de 2020, ils ont quatre ans déjà : il y avait 42 professionnels pour 100 000 habitants et 10 500 étudiants en formation dans 31 écoles. Aujourd'hui ce sont à peu près les chiffres où ça a encore augmenté ?

Je pense qu'on a atteint un point haut, pas dans le nombre de professionnels en activité, mais dans le nombre d'étudiants en formation, parce qu'en fait les augmentations d'effectifs dans les écoles ont toujours suivi le process réglementaire. En 2002, beaucoup de gens se sont intéressés à l'ostéopathie. En 2007, beaucoup de gens se sont intéressés à l'ostéopathie d'étudiants et en 2015 pareil. À chaque fois qu'il y avait une évolution réglementaire, il y a eu un intérêt pour la profession. Je pense que maintenant ça va se stabiliser parce que toutes les professions nouvelles suscitent un engouement et puis après la raison commence à l'emporter. L'ostéopathe est un métier quand même relativement complexe. Il n'est pas relativement complexe, il est complexe : vous devez à la fois poser un diagnostic et à la fois, vous-même, faire la solution manuelle du diagnostic que vous avez posé.

Ne faudrait pas, comme certains le proposent, il faudrait un numerus clausus ?

Un numerus clausus, je ne sais pas, mais en tous les cas je pense que la qualité de la formation des étudiants en ostéopathie dépend de l'investissement, de la qualité morale des dirigeants, de l'école des directeurs. C'est-à-dire que l'enseignement est 100% privé, et donc qui dit enseignement privé, des fois, dit conflit d'intérêts entre arbitrage, entre la formation la rémunération des propriétaires ou autre. Et donc, la vertu ayant parfois certaines limites, je pense qu'il faudrait surtout un examen organisé par le ministère de l'Enseignement supérieur en fin de troisième année pour que primo, les gens qui se sont trompés d'orientation puissent sortir de ce métier-là avec un diplôme avec une formation validée, et deuxio, ceux qui ne sont pas au niveau qu'ils arrêtent d'envahir le marché parce qu'ils créent un préjudice pour l'ensemble de la profession.

Ce sera le dernier mot Jean Canetos. Merci beaucoup. Je le rappelle donc samedi 22 juin à 16h30 à l' UGC Cité Internationale, la diffusion du long métrage sur les 150 ans de l'ostéopathie. A très bientôt au revoir.

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