L’ancien ministre de la culture, Jack Lang en visite à Villeurbanne à l’occasion de la 40e édition de la Fête de la musique mardi 21 juin – Photo : Grégoire Gindre

"La Fête de la musique ne peut pas avoir de meilleure capitale que Villeurbanne", selon son créateur Jack Lang

Top départ pour la 40e édition de la Fête de la musique à Lyon. Pour l'occasion, son créateur Jack Lang, ministre de la Culture en 1982 lors de la première édition, a déambulé dans les rues de Villeurbanne, capitale française de la culture. Plus de 1 000 élèves des écoles de la ville se sont produits devant l'ancien ministre.


Jack Lang, ancien ministre de la Culture et créateur de la Fête de la musique, est à Villeurbanne ce mardi 21 juin pour souffler les 40 bougies de l'événement devenu planétaire. La capitale française de la culture a lancé en grande pompe le premier jour de l'été et la Fête de la musique avec 1 024 élèves des écoles de Villeurbanne qui sont venus faire un show musical à l'ancien ministre de la Culture. Lors d'un micro tendu, Jack Lang a répondu aux questions des nombreux journalistes présents sur place. 


Quel sentiment avez-vous alors que vous fêtez les 40 ans de la Fête de la musique à Villeurbanne, fête que vous avez créé ? 

Une grande émotion. Une grande émotion d'abord parce que c'est Villeurbanne. Pour moi, c'est une ville qui, a beaucoup d'égard, m'est très chère. Très cher car, je ne peux pas, ne pas penser à Charles Hernu [ministre de la Défense à l'époque, ndlr], qui lors de la première fête de la musique a accepté de jouer du violon accompagné par un misérable pianiste que j'étais. Il a donc donné le signal du ralliement à la musique à tous les citoyens de France. Villeurbanne aussi, parce que se trouve le Théâtre National Populaire et beaucoup d'autres institutions culturelles de tout premier plan. Et finalement Villeurbanne, parce que le maire et l'équipe municipale accomplissent un travail fabuleux. Cela exprime mon rêve, mon utopie concrète, mes espérances. Ici, à Villeurbanne, on chérit les artistes, les créateurs, les inventeurs et on confie aux citoyens la possibilité d'être eux-mêmes acteurs et inventeurs d'événements. La Fête de la musique, c'est ça : à la fois l'art sous les formes les plus diverses et les plus élevées mais aussi que chacun apporte son énergie, son talent, son imagination et sa présence.

Jack Lang, ancien ministre de la culture et le maire de Villeurbanne, Cédric Van Styvendeal - Photo : Grégoire Gindre

Après 40 ans, comment expliquer un tel succès populaire ? 

Pour la raison que je viens de dire à l'instant. Les citoyens se sont approprié l'événement. Oui j'ai lancé l'idée il y a une quarantaine d'années. Mais elle aurait fait flop s'il n'y avait pas eu des amateurs et des citoyens qui l'avaient fait vivre avec des orchestres, des chorales ou sans, avec des solistes. Cette Fête de la musique est une œuvre collective. C'est vraiment vrai ! Si elle est aussi populaire c'est parce que elle a été appropriée par les gens eux-mêmes. Ça n'appartient à aucun gouvernement, à personne. C'est l'œuvre des citoyens de ce pays qui aiment la musique. C'est comme un rituel le 21 juin aujourd'hui. C'est dans les têtes, dans les cœurs, on se retrouve pacifiquement, chacun respectant chacun. Vous observerez - je touche du bois j'espère que je ne dis pas de bêtises - que lors de cette fête-ci, jamais aucune violence. Parce que pour les citoyens la Fête de la musique est un moment sacré au sens laïque. Un événement que l'on doit respecter comme un rituel républicain.

Aujourd'hui, le thème c'est retour à l'esprit originel, à la spontanéité, à l'improvisation. C'est ça qu'il faut pour la Fête de la musique ?  

Cela n'a jamais été abandonné. Mais plus que jamais, il faut que ce soit les amateurs, les professionnels de la musique qui soient les acteurs, les co-inventeurs, les initiateurs de l'événement. Je le répète, c'est une œuvre collective. Ça n'est pas les grosses machines. Ce ne sont pas les gros concerts sponsorisés par des sociétés inspirés par le luxe ou l'argent. Ce sont nous tous qui apportons notre talent. On peut se permettre quelques fausses notes aussi.

Ce qui est aussi très impressionnant, c'est que ce petit événement, cette petite idée, née sur les bords de la Seine, a fait le tour de la planète. Au moment où nous parlons, ce sont plusieurs centaines de millions de personnes qui vont célébrer la musique et l'été. Aux États-Unis, en Chine, dans toute l'Europe, en Amérique latine, c'est une immense armée pacifique des amoureux de la musique qui se retrouvent, en plus, le 21 juin. C'est aussi l'une des raisons du succès : c'est le jour de l'été. C'est une belle saison, la saison des rencontres, la saison des amours, la saison de la lumière. Tous ces ingrédients font que chacun y est attaché. On se retrouve, on s'aime, on coexiste dans un esprit de respect et de tolérance. Après deux ans d'enfermement, quelle respiration quand même ! On respire, on est heureux. On va danser, on va jouer, on va rencontrer les uns et les autres : c'est un formidable bonheur.

C'est un symbole d'être à Villeurbanne aujourd'hui ? 

C'est la culture telle que j'en rêve. Une culture à la fois exigeante et très proche des citoyens. Ce que la ville de Villeurbanne réalise aujourd'hui est tout à fait remarquable. Il y a une confiance qui est faite à la jeunesse. Les initiatives faites pour l'art, le cinéma, le théâtre, pour tout. La Fête de la musique ne peut pas avoir de meilleure capitale que Villeurbanne. C'est dans l'esprit. L'esprit pionnier, l'esprit d'initiative populaire, l'esprit inventif car c'est quand même un idéal de vie que chacun d'entre nous, qu'il soit professionnel ou non, soit co-inventeur d'un événement qui nous appartient tous ! C'est ça qui est merveilleux dans cette histoire. Je ne suis que partiellement responsable car les vrais responsables, ce sont ces enfants, ces élus, ces citoyens qui, par leur énergie, leur talent, leur courage, ont donné chair à cette Fête de la musique.


La Fête de la musique, c'est à partir de 18 heures mardi 21 juin sur ce "grand boulevard musical" allant de Villeurbanne jusqu'à l'Hôtel de Ville de Lyon. Six kilomètres de scènes et de concerts pour chanter et danser jusqu'à minuit (voire plus ?).

Le programme détaillé ICI.

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