Depuis le centre d’information et de commandement, la police nationale peut désormais, en cas de besoins, prendre le contrôle des caméras de Villeurbanne, sans l’autorisation de la ville. (Photo Hadrien Jame)

La police nationale prend les commandes des caméras de Villeurbanne

Afin d’améliorer la sécurité des habitants, Villeurbanne et l’État ont signé une convention qui autorise la police nationale à prendre le contrôle des caméras de la Ville sans en demander préalablement l’autorisation. Un procédé qui doit permettre d’accélérer la réponse des forces de l’ordre, mais sur laquelle le maire compte bien garder un oeil attentif pour éviter des dérives.  

Depuis l’étage de l’Hôtel de Police Marius-Berliet dans le 3e arrondissement de Lyon des agents de la police nationale ont les yeux rivés sur des écrans retransmettant des flux de caméras de vidéo-surveillance. Au total, le centre d’information et de commandement de la police nationale du Rhône a la capacité de recevoir des informations en provenance de 17 000 caméras. 

Des images que les agents habilités peuvent observer, mais ne peuvent pas contrôler sans l’autorisation préalable de leur propriétaire lors d’opérations de sécurité, de manifestations délicates, d’une agression, d’un vol, etc. Pour pouvoir prendre le contrôle d’une caméra, ils doivent d’abord appeler les agents de la ville où elle se trouve, qui, ensuite, peuvent leur donner les commandes. Un délai qui a parfois abouti à "l’échec d’une interpellation parce que l’auteur avait le temps de prendre la fuite", déplore Nelson Bouard, le directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) du Rhône. 

Faciliter l'intervention des policiers

Au mois d’avril 2022, le maire de Villeurbanne, Cédric Van Styvendael, a donc signé une convention avec l’État pour permettre aux policiers d’accéder aux 165 caméras, pilotables à distance, de sa ville sans autorisation. "On ne peut pas dire que l’on s’occupe ensemble de la question de la sécurité si on ne se fait pas confiance sur l’accès aux images", explique simplement l’édile de la 2e ville du département. 


"C’est infiniment plus pratique lorsque nous avons besoin de localiser une victime, orienter les secours, évaluer les moyens nécessaires pour intervenir, localiser un auteur, voire le suivre dans sa fuite", Nelson Bouard, directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) du Rhône


Élu sur un programme qui contenait un volet important en matière de sécurité, l’élu socialiste précise que cette convention s’inscrit dans la continuité de son travail pour améliorer la "protection des personnes. Il faut bien comprendre que l’on parle d’un accès rapide et d’un temps réduit d’intervention des policiers". Au travers d’un cas pratique fictif, Nelson Bouard résume l’avantage apporté par cet accès direct au flux des caméras de Villeurbanne : "Une victime nous désigne un auteur, il essaye de prendre la fuite et de caméra en caméra on le suit et la patrouille guidée par l’opérateur radio l’interpelle. […] En amont de l’intervention, nous sommes les yeux des policiers intervenants. Nous allons leur indiquer avant même qu’ils arrivent par où ils doivent arriver, comment ils doivent intervenir et comment est la situation sur place", détaille le DDSP du Rhône.

Il n'y a pas de délai dans la transmission des images, tout se passe en direct. Un élément essentiel lors d'une intervention de police. Ici, de gauche à droite, le préfet du Rhône, le maire de Villeurbanne et le DDSP observent Villeurbanne depuis le 3e arrondissement de Lyon. (Photo Hadrien Jame)

Un strict contrôle de Villeurbanne

Pour autant, le maire de Villeurbanne n’entend pas confier les clés de la vidéo-surveillance de sa ville de près de 150 000 âmes sans garder un oeil sur l’utilisation qui en sera faite. "Il y a une forme de contrôle a priori que je ne comprends pas très bien, donc moi je préfère faire du contrôle a posteriori, vérifier qu’il n’y a pas d’abus et comptez sur moi pour être vigilant. Il n’est pas question que des personnes se prennent pour Big Brother et accèdent à tout tout le temps et n’importe quand", confie l’élu alors que dans son dos les images en direct de Villeurbanne défilent sur les écrans de la police nationale, à l’occasion de la présentation de cette convention. 


"Il n’est pas question que des personnes se prennent pour Big Brother et accèdent à tout tout le temps et n’importe quand", Cédric Van Styvendael, maire de Villeurbanne


D’ici la fin du mandat, la municipalité ambitionne d’atteindre un nombre de caméras compris entre 300 et 350 en respectant deux priorités, "la sécurité routière et la lutte contre le trafic de stupéfiants". À cet égard, de nouvelles caméras ont déjà été installées sur le cours Émile-Zola, à Charpennes, dans le quartier Saint-Jean et d’autres fleuriront bientôt sur le cours Tolstoï et aux Buères. Autant de flux qui seront rendus accessibles à la police nationale.

Quid de Lyon ?

À l’heure où le préfet du Rhône Pascal Mailhos insiste sur le fait que "l’immense majorité pour ne pas dire la quasi-totalité des villes équipées de ce genre de caméras en France a accepté le dispositif", dans la Métropole de Lyon seule Décines-Charpieu a également sauté le pas. Pour autant, le représentant de l’État dans le Rhône espère bien convaincre la plus grande ville du département du bien-fondé de cette convention, mais la partie semble loin d'être gagnée. "Le maire de Lyon a accepté une première étape qui est le fait de dépêcher un de ses agents au centre d’information et de commandement lorsqu’il y a des manifestations ou des événements particulièrement délicats", souligne Pascal Mailhos. Une procédure qui n’est finalement pas nouvelle puisqu’elle était déjà en vigueur sous la précédente mandature lors des grands événements confirme Jean-Yves Sécheresse, l’ancien adjoint à la sécurité de la Ville de Lyon.


"J’espère convaincre le maire de Lyon d’aller plus loin pour que le maniement des caméras se fasse en temps réel ici, par une convention", Pascal Mailhos, préfet du Rhône


Désormais, les discussions se poursuivent entre la Ville et la préfecture, Pascal Mailhos souhaitant "convaincre le maire d’aller plus loin". "Cela nous permettrait d’être plus efficaces et réactifs et d’obtenir de meilleurs résultats", lance comme un appel du pied le préfet à Grégory Doucet, avec qui les relations en matière de sécurité n’ont pas toujours été au beau fixe ces derniers mois, notamment sur la question de la vidéo-surveillance.

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