Dans les universités bloquées, des étudiants demandent la validation automatique de leur semestre. À Lyon 2 un minimum de 15/20 pour tous a été voté en AG. Une revendication qui n'a jamais été appliquée... Du moins pas en tant que telle.
La contestation étudiante contre parcoursup donnera-t-elle lieu à des "examens en chocolat" pour reprendre l'expression d'Emmanuel Macron ? Au gouvernement, on assure que non. Dans plusieurs universités bloquées, les étudiants demandent la validation automatique de leur semestre pour ne pas être pénalisés par leur participation au mouvement. À Lyon 2 la note minimum de 10/20 améliorable pour tous a été votée en assemblée générale ce lundi. Des enseignants-chercheurs participant à la mobilisation envisagent de retenir les notes ou de valider les semestres de tous leurs étudiants sans exception. Mais la responsabilité revient in fine aux présidents d'universités et aucun d'entre eux ne s'est pour l'instant positionné en faveur d'une telle décision.
Petits arrangements
La revendication du semestre donné est un classique des blocages de faculté. En principe les commissions de formation et de la vie universitaire, composées d'enseignants et d'étudiants, peuvent bien prendre cette décision. Cependant, "ce n'est pas le mode d'action privilégié”, nous confie un enseignant-chercheur de Lyon. En réalité, on préfère généralement faire des arrangements et s'adapter à la mobilisation", explique-t-il.
"Les autorités universitaires ne peuvent cautionner cela par principe : c'est faire un énorme "cadeau" aux grévistes, voire encourager la mobilisation justement, et puis c'est introduire un risque énorme de contestation des non-grévistes, de "ceux qui continuent à bosser", qui ne veulent pas voir leurs efforts nivelés par le bas", estime pour sa part Arnaud Mercier, enseignant à Paris II. "En revanche ce qui existe, c'est des aménagements d'examen : une seule note de TD admise pour le contrôle continu au lieu de deux minimums requises, un examen plus court, une épreuve supprimée et la note neutralisée dans le décompte final, etc". Soit un assouplissement des règles pour éviter la catastrophe.
Notes planchers
Déjà en 2009 la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Valérie Pécresse avait refusé la validation du second semestre réclamée par de nombreux enseignants-chercheurs de Paris VIII alors en grève. Loïc Ballarini était alors ATER (attaché temporaire d'enseignement et de recherche). Il se souvient que "le département Culture et communication [de Paris VIII] avait décidé d'aménager les conditions d'examen de la manière suivante : nous demandions aux étudiants une évaluation adaptée au nombre de cours dispensés. C'était en général un devoir à rendre par mail ou lors de la dernière séance de cours. Le sujet proposé par l'enseignant était indicatif (tout autre rendu, pourvu qu'il entre dans le cadre du cours, était accepté). À partir du moment où le devoir était rendu, l'étudiant avait 10/20. N'était ensuite retenu que le positif, pour attribuer les éventuels points au-dessus de 10." Lui-même s'en était tenu à ces modalités fixées collectivement, mais certains collègues avaient finalement décidé d'appliquer les modalités prévues au début du semestre.
Il n'existe donc pas a priori de cas de semestre réellement "donnés" aux étudiants par les enseignants, mais l'attribution d'une note plancher, décidée collectivement par des professeurs solidaires des mobilisations étudiantes. "Je sais qu'il y a déjà eu des cas de validation des enseignements par attribution d'une note "plancher" de 10/20. Cela s'est passé à plusieurs reprises au sein de différents départements de l'université où je suis en poste", admet un enseignant parisien qui souhaite garder l'anonymat.
Une stratégie contre laquelle les présidences d'université ne peuvent pas grand-chose, selon lui. "L'attribution des notes étant effectuée par les enseignant/e/s en ligne via des plateformes numériques, sans intermédiaires humains, je vois difficilement comment la présidence d'une université pourrait intervenir de façon à sélectionner, parmi des milliers de notes attribuées, les notes qui relèvent de la validation automatique - quand bien même leur zèle de sélection serait particulièrement poussé."
Nouvelles stratégies
Pour la mobilisation contre la loi ORE, les universités sont à la recherche de nouveaux moyens détournés pour que les examens aient lieu malgré la mobilisation. Plusieurs établissements, comme l'université de Lorraine ont ainsi choisi de délocaliser les partiels plutôt que de les repousser en empruntant des salles à l'extérieur des sites universitaires bloqués. D'autres comme l'université Paul-Valéry à Montpellier ont opté pour des examens en ligne avec des temps de connexion limités. Cette dernière stratégie peut cependant s'avérer risquée puisqu'à Montpellier la salle des serveurs a été détruite par les militants. À Lyon 2 les organisations syndicales, étudiantes et la présidence n'ont toujours pas réussi à se mettre d'accord sur les modalités d'examen d'après nos informations.