Depuis plusieurs semaines, la présence de prostituées travaillant à la plaine des jeux de Gerland dérange une partie de la classe politique locale et les parents de jeunes sportifs. La Ville a décidé d’attribuer une subvention de 35 000 euros à l'association Cabiria pour faire de la médiation dans le quartier.
Le vote d’une subvention de fonctionnement à l’association Cabiria, qui intervient auprès des personnes prostituées, a fait l’unanimité du conseil municipal jeudi 15 décembre. L’enveloppe de 35 000 euros accordée à l’association doit lui permettre d’accompagner les prostituées du quartier Jean Bouin dans le 7e arrondissement de Lyon, tout en faisant de la médiation auprès des riverains et des utilisateurs de la plaine des Jeux.
"On ne lutte pas contre l’esclavage et le proxénétisme avec des arrêtés d’interdiction de stationnement", Sandrine Runel, adjointe au maire de Lyon
La question de la présence des prostituées à proximité des terrains de sport, elle, a en revanche fait l’objet de nombreuses interventions et débats dans l'hémicycle alors que depuis le mois de novembre un collectif de parents a lancé une pétition intitulée "Protégeons nos enfants". À l’intérieur de ce texte, qui réunit plus de 3 300 signatures, les parents des jeunes sportifs dénoncent notamment le fait que "Les terrains de sports sont jonchés de préservatifs utilisés et de seringues souillées".
Lire aussi : Gerland : une pétition pour un accès plus sûr à la Plaine des jeux
L'opposition veut évacuer les prostituées
"Le collectif de parents a été reçu. Nous n’avons attendu personne pour travailler à la sécurité de tous les usagers et nous faisons les choses pas à pas", assure Sandrine Runel, l’adjointe aux solidarités et à l’inclusion sociale. Aujourd’hui, une centaine de camionnettes sont stationnées dans le secteur de la Plaine des Jeux, selon un décompte du groupe Progressiste et Républicains, qui assure soutenir le travail des associations "pour accompagner ces personnes et les aider à sortir de la prostitution", mais qui demande la prise de mesures pour protéger les enfants qui se trouvent à proximité.
"Il n’est pas pertinent de vouloir repousser les prostituées en dehors de la ville, car cela les expose encore plus aux violences, aux proxénètes et cela les éloigne des associations qui les accompagne", Sandrine Runel, adjointe au maire de Lyon
L’installation d’un brise vue entre les terrains de sports et les camionnettes est jugée insuffisante par le groupe de Georges Képénekian, l’ancien maire de Lyon, et David Kimelfeld, l’ancien président de la Métropole de Lyon. En substance, le groupe d’opposition demande à ce que les travailleuses et travailleurs du sexe soient évacués, "en trouvant une solution moins impactante", afin de permettre à la Plaine des Jeux de "retrouver sa vocation première". Pour assurer une évacuation durable, il demande également à la Ville de prendre un arrêté "interdisant le stationnement des véhicules équipes pour le séjour l’exercice d’une activité, ne bénéficiant par d’une autorisation exceptionnelle et temporaire". Comme cela a pu être le cas par le passé. À l’époque, Gérard Collomb avait mis en place une politique répressive, multipliant les PV et les mises à la fourrière des véhicules.
Lire aussi : Prostituées à Gerland : "elles aussi ne veulent pas que les enfants les voient"
L'exécutif s'y refuse
Ce à quoi la nouvelle majorité se refuse. "Depuis 20 ans, la posture des anciennes majorités municipales a jeté l’opprobre sur les prostituées. Lyon, ville humaniste, était devenue la ville où la répression à l’encontre des prostituées était la plus forte de France", déplore David Souvestre, le co-président du groupe Lyon en Commun. Les arrêtés anti-stationnements chassent les prostituées de la ville et les déplacent vers des lieux reculés, peu habités et peu fréquentés. Cet isolement les rend encore plus vulnérables. Les prostituées deviennent des cibles idéales pour les agresseurs". Et Sandrine Runel d’appuyer les propos de son confrère de la majorité, "à Lyon une femme a échappé à l’incendie criminel de sa camionnette, trois femmes ont été percutées par un automobiliste qui a pris la fuite les laissant gisant au sol et une femme est morte brûlée vive dans sa camionnette en périphérie de Lyon".
Plutôt que déplacer les prostituées, la municipalité travaille donc à "proposer d’autres points d’accès à la plaine des jeux, éloignés de la prostitution, pour les sportifs et pour leur famille", explique Sandrine Runel. Tout en appelant les services de l’État à prendre leurs responsabilités pour "lutter contre les filières mortifères de la traite des êtres humains".
Depuis une vingtaine d'année, l'association Cabiria fait le lien entre les institutions et le monde interlope. Certains se rappellent l'occupation de l'église St Nizier par un collectif de prostitués, année 1975 !