Isabelle Rivé est la directrice du Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation (CHRD) de Lyon. Elle était sur le plateau de l'émission "6 Minutes Chrono" pour présenter la Libération de Lyon, le 3 septembre 1944, de l'occupant nazi.
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Isabelle Rivé débute en donnant le contexte des mois précédents la libération de la ville pour les Lyonnais : "L'été 44 à Lyon est particulièrement meurtrier et cruel pour les contemporains. Le débarquement de Normandie a eu lieu le 6 juin. Pour autant, la libération semble très lointaine pour les gens du sud de la France, dont Lyon fait partie, parce que les combats n'avancent pas en Normandie. Lyon subit de plein fouet la répression de l'occupant. Les populations juives sont traquées jusque dans les derniers jours du mois d'août. Le dernier convoi part le 11 août de Lyon mais pour autant les persécutions continuent. Des massacres ont eu lieu à Lyon, à Bron, les 17 et 18 août et le 20 août aussi. Le 20 août Saint-Genis-Laval, à chaque fois c'est une centaine de personnes qui est extraite de la prison Montluc et sommairement fusillée. La vie quotidienne est extrêmement compliquée du fait des restrictions, on manque de tout, notamment de pain, ce qui est l'aliment de base de l'époque. Et puis la peur de tout ce qui pourrait arriver : les Lyonnais ont souvenir le bombardement du 26 mai 1944 qui a été meurtrier lui aussi, 1000 morts à peu près, énormément de destructions. Donc on sait que la libération peut s'accompagner du retour de la guerre en fait sur le territoire lyonnais et il y a à la fois beaucoup d'espoir et une peur immense dans la population lyonnaise en début septembre 1944."
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Pour ce qui est des libérateurs : "Il faut se souvenir que le 15 août a lieu en Provence un débarquement allié mais dans lequel beaucoup de Français sont inclus. Alors quand je dis Français c'est aussi des gens qui sont issus des colonies, donc qui ont la nationalité française, donc tous les devoirs d'un citoyen français mais pas les droits puisqu'ils sont soumis au code de l'indigénat. Donc ce sont des Algériens, des Marocains, des hommes d'Afrique subsaharienne aussi et c'est principalement eux qui vont débarquer le 15 août en Provence. La remontée de la vallée du Rhône se fait finalement assez vite et dans les derniers jours d'août les libérateurs, donc à la fois les alliés américains mais aussi les forces françaises dans la première armée française, sont aux portes de Lyon. Les Allemands quittent la ville à partir de fin août et les 1er et 2 septembre mais en quittant la ville ils vont faire sauter tous les ponts de Lyon sauf deux pour garantir leur retraite. C'est une ville dans laquelle il est quasiment impossible de circuler que va libérer notamment Diego Brosset qui est le libérateur de Lyon au matin du 3 septembre 44 qui est un dimanche matin."
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La retranscription intégrale de l'émission :
Bonjour à tous, bienvenue dans l'émission 6 minutes chrono, le rendez-vous quotidien de la rédaction Lyon Capitale. Aujourd'hui, on va parler de la libération de Lyon et pour en parler, nous recevons Isabelle Rivé qui est la directrice du Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation (CHRD) de Lyon. Bonjour Isabelle Rivé. Merci d'être venue sur notre plateau. On va rentrer dans le vif du sujet. Dans un premier temps, pouvez-vous nous expliquer le contexte de la libération de Lyon qui a eu lieu le 3 septembre 1944, c'est la date officielle. Quel était le contexte des derniers mois avant cette libération ?
L'été 44 à Lyon est particulièrement meurtrier et cruel pour les contemporains. Le débarquement de Normandie a eu lieu le 6 juin. Pour autant, la libération semble très lointaine pour les gens du sud de la France, dont Lyon fait partie, parce que les combats n'avancent pas en Normandie. Lyon subit de plein fouet la répression de l'occupant. Les populations juives sont traquées jusque dans les derniers jours du mois d'août. Le dernier convoi part le 11 août de Lyon mais pour autant les persécutions continuent. Des massacres ont eu lieu à Lyon, à Bron, les 17 et 18 août et le 20 août aussi. Le 20 août Saint-Genis-Laval, à chaque fois c'est une centaine de personnes qui est extraite de la prison Montluc et sommairement fusillée. La vie quotidienne est extrêmement compliquée du fait des restrictions, on manque de tout, notamment de pain, ce qui est l'aliment de base de l'époque. Et puis la peur de tout ce qui pourrait arriver : les Lyonnais ont souvenir le bombardement du 26 mai 1944 qui a été meurtrier lui aussi, 1000 morts à peu près, énormément de destructions. Donc on sait que la libération peut s'accompagner du retour de la guerre en fait sur le territoire lyonnais et il y a à la fois beaucoup d'espoir et une peur immense dans la population lyonnaise en début septembre 1944.
Et alors il y a aussi beaucoup de prisonniers, de personnes qui ont été déportées aussi. Il n'y a pas beaucoup de nouvelles qui parviennent jusqu'aux Lyonnais, ça a aussi accentué peut-être cette peur ?
Alors pour beaucoup de familles, effectivement, on est sans nouvelles des gens qui sont soit prisonniers de guerre, soit déportés en Allemagne, soit partis dans le cadre du STO. Les peu de lettres qui arrivaient à passer passent de moins en moins bien et il n'y en aura plus du tout d'ailleurs après la libération. Donc on est sans nouvelles de milliers de gens, hommes et femmes, qu'on reverra dans le meilleur des cas au printemps 1945 et malheureusement souvent jamais.
Comment se passent alors les jours de la libération ? Comment se passe la libération de Lyon ? Qui libère Lyon ? Ce sont les alliés ? Ce sont les Français ? la résistance ? Qui permet la libération de la ville ?
La synergie de toutes ces forces-là. Il faut se souvenir que le 15 août a lieu en Provence un débarquement allié mais dans lequel beaucoup de Français sont inclus. Alors quand je dis Français c'est aussi des gens qui sont issus des colonies, donc qui ont la nationalité française, donc tous les devoirs d'un citoyen français mais pas les droits puisqu'ils sont soumis au code de l'indigénat. Donc ce sont des Algériens, des Marocains, des hommes d'Afrique subsaharienne aussi et c'est principalement eux qui vont débarquer le 15 août en Provence. La remontée de la vallée du Rhône se fait finalement assez vite et dans les derniers jours d'août les libérateurs, donc à la fois les alliés américains mais aussi les forces françaises dans la première armée française, sont aux portes de Lyon. Les Allemands quittent la ville à partir de fin août et les 1er et 2 septembre mais en quittant la ville ils vont faire sauter tous les ponts de Lyon sauf deux pour garantir leur retraite. C'est une ville dans laquelle il est quasiment impossible de circuler que va libérer notamment Diego Brosset qui est le libérateur de Lyon au matin du 3 septembre 44 qui est un dimanche matin.
Alors est-ce qu'il y a des combats dans la ville comme on a pu le voir lors de la libération de Paris ? Est-ce que ça tire dans les rues ? Est-ce qu'il y a ce genre de choses ?
Il n'y a pas d'insurrection à Lyon. Il y a une insurrection qui est réprimée très cruellement à Villeurbanne. Pas d'insurrection à Lyon. Les chefs de la résistance ont tout fait pour que ça n'ait pas lieu pour éviter un bain de sang. On a trop en mémoire tous les massacres de l'été 44. Par contre évidemment beaucoup de frictions avec les Allemands qui restent, quelques miliciens parfois et puis il faut imaginer tous ces maquisards qui vont arriver dans Lyon les premiers jours du mois de septembre. Il y a une forte tension quand même dans la ville donc effectivement encore des tirs le 3, le 4 et le 5 septembre.
D'accord et je crois que le général de Gaulle vient ensuite dans la ville et parle de Lyon capitale de la résistance. Vous pouvez nous en dire un mot ?
Bien sûr. Le 14 septembre de Gaulle, qui fait un peu un tour de France des villes libérées, vient à Lyon et dans un discours va qualifier Lyon de “capitale de la résistance” ce qui historiquement est tout à fait vrai, mais tout à fait vrai sur la première partie de la guerre. Effectivement c'est à Lyon que les grands mouvements vont trouver un terrain favorable pour installer leurs états majors surtout sur toute l'année 41-42 puisque Lyon n'est pas encore occupé avant le 11 novembre 42. C'est à Lyon que Jean Moulin va mettre en place tout ce qui va fédérer la résistance française. A partir du printemps 43 c'est plutôt à Paris que les choses vont se passer parce que la ville est occupée et que la répression y est tout aussi féroce peut-être même plus qu'à Paris. Effectivement Lyon a été un temps la capitale et en tout cas le berceau de la résistance.
Je pense que c'est important de le rappeler surtout à Lyon Capitale. En quelques mots qu'est-ce qu'on peut retrouver au CHRD, au centre d'histoire de la résistance et la déportation à l'occasion de cette date du 3 septembre et toute cette semaine ?
Alors toute cette semaine et même toujours on a ce parcours permanent qui présente un peu le contexte historique à la fin duquel on trouvera un film d'une quinzaine de minutes pour avoir une vision un peu synthétique de tous les enjeux de la libération et des événements. On pourra trouver aussi sur notre site un podcast immersif qu'on a conçu avec Marine Beccarelli qui est une docteure en histoire de Lyon 2 qui retrace la libération sous un angle assez large où on remet bien les choses dans le contexte. Beaucoup de ressources aussi sur notre site et puis notamment une vidéo de vulgarisation sur Jean Moulin et son action. Donc c'est des choses qui sont accessibles sur le site du CHRD.
Merci d'être venu sur notre plateau. Quant à vous, je vous remercie d'avoir suivi cette émission. Vous pouvez retrouver plus de détails sur le site internet de Lyon Capitale aussi et dans le numéro d'été avec quatre pages retranscrivant et expliquant la libération de Lyon. Merci d'avoir suivi cette émission, à très bientôt.
Il est également bon de rappeler (source Wikipedia)que Le 6 juin 1944, Le maréchal PETAIN visite Lyon ovationné par la foule : Il passe place Bellecour debout dans une voiture découverte, entre à l'hôtel de ville, accompagné du Docteur BERTRAND, maire de Lyon et se rend enfin à l'hôpital de la Grange Blanche pour une visite à des blessés et que pour certains aujourd'hui il vaut toujours mieux un "hitler" que le Front Populaire"