Le malfaiteur Redoine Faïd a été interpellé dans la nuit de mardi à mercredi dans un hôtel de Seine-et-Marne, un mois et demi après sa spectaculaire évasion de la maison d'arrêt de Séquedin (Nord) le 13 avril.
La prison, dont ce spécialiste des braquages avec explosifs s'était échappé en faisant sauter une porte, était située à proximité de la frontière belge. Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls avait fait état le 20 mai d'une "traque mondiale" pour le retrouver. Son signalement avait été transmis à Interpol et à toutes les polices de l'espace de Schengen.
Les policiers ont finalement arrêté l'homme le plus recherché de France en grande banlieue parisienne, dans un hôtel de Pontault-Combault, à 15 kilomètres de Villiers-sur-Marne, où Faïd est accusé d'avoir participé avec d'autres braqueurs à une fusillade qui a coûté la vie à la policière municipale Aurélie Fouquet le 20 mai 2010.
"A l'évidence, il a beaucoup circulé pendant six semaines", a dit Manuel Valls sur i-Télé.
Agé de 29 ans, un de ses complices d'évasion a également été interpellé. Des armes ont été trouvées par les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la criminalité organisée (Oclco) qui se demandent si Faïd ne s'apprêtait pas à "remonter au braquage".
Les clients de l'hôtel ont raconté avoir entendu "beaucoup de bruit" au moment de l'interpellation vers 03H00. Selon une jeune femme y travaillant, le complice de Faïd avait réglé en liquide la chambre de cet hôtel B&B. L'établissement est situé aux abords de la Francilienne dans une zone industrielle et offre une cinquantaine de chambres ouvertes sur l'extérieur et accessibles avec un code d'accès. Les deux hommes comptaient visiblement y rester plusieurs jours, selon elle.
La fusillade de Villiers-sur-Marne était survenue à une période où le bandit de Creil (Oise) à la gueule d'ange, aujourd'hui âgé de 41 ans, était devenu une célébrité, notamment dans certaines cités. Auteur d'un ouvrage sur sa carrière de spécialiste de "la Belle" et de "pro" du braquage de fourgons de convoyage de fonds, il avait fait le tour des plateaux de télévision où il avait raconté qu'il s'était "rangé".
Le ministre Manuel Valls, qui avait dénoncé les "failles" ayant permis l'évasion de Faïd, a félicité ses troupes "pour l'enquête minutieuse et efficace qu'ils ont bouclée en moins de six semaines sous la direction de l'autorité judiciaire".
Quelles complicités ?
"Saluant ce beau succès policier", Manuel Valls "a une pensée particulière pour les proches et les collègues d'Aurélie Fouquet, "sauvagement tuée voici trois ans" lors de la fusillade sur un rond point de l'autoroute A4, déclenchée par les malfaiteurs pour fuir tandis qu'ils menaient un hold-up. Qu'une "star" du crime comme Redoine Faïd ait pu s'évader avait suscité colère et incompréhension chez nombre d'enquêteurs et chez les proches et les collègues d'Aurélie Fouquet, mère d'un enfant en bas âge, morte à 26 ans.
"Personne ne comprend aujourd'hui", avait déclaré le député-maire (UMP) de Villiers-sur-Marne, Jacques-Alain Bénisti le 20 mai lors d'une cérémonie d'hommage sur les lieux du meurtre de la policière. Il avait cité à l'appui le transfert de Faïd de la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne), où il était classé "détenu particulièrement surveillé" (DPS), à celle de Séquedin, jugée moins sûre.
Si Faïd, qui va être entendu par les enquêteurs de l'Oclco, va retourner derrière les barreaux, l'enquête n'est pas terminée. Elle devra établir les complicités dont Faïd a bénéficié, durant sa fuite et lors de cette évasion visiblement minutieusement préparée. Il s'était enfui à l'aide d'une arme et d'explosifs. Il avait aussi revêtu une tenue de gardien pour sortir de l'enceinte de la prison.
"Il a bénéficié d'un certain nombre de complicités", a déclaré mercredi Manuel Valls. Après l'évasion, le procureur à Lille avait exprimé le souhait de comprendre "comment, dans la prison, il a pu se retrouver en possession d'explosifs et d'une arme". Pour beaucoup d'enquêteurs, Faïd a bénéficié de complicités internes.
Par ailleurs, ce DPS (détenu particulièrement surveillé) censé faire l'objet d'une vigilance accrue, était "en détention commune", dans "un bâtiment qui ne présente pas en termes de sécurité des mesures supplémentaires", avait aussi dit Etienne Dobremetz, représentant régional de l'Ufap/Unsa Justice. Le responsable syndical avait fustigé le manque de moyens pour "gérer ce genre d'individus".
Lors de période de liberté, il apparaissait comme un repenti soigné. Il disait lui-même qu'il n'avait rien à voir avec ces dealers de quartier buveur de soda et mangeur de kebab. La classe au-dessus, mais truand quand même.