Les journalistes étrangers sont venus nombreux assister au premier mariage homosexuel à Montpellier. Surtout parce qu’ils craignaient des affrontements.
"Sans compter quelques désistements de dernières minutes, nous avons comptabilisé près de 250 journalistes venant de 115 médias différents", assurent les services de la Ville de Montpellier. Dont un bon tiers appartenant à la presse étrangère. Espagne, Italie, Russie, États-Unis, Angleterre, Suisse, Danemark, Chine… Les rédactions étrangères n’ont, en effet, pas lésiné sur les moyens pour assister au premier mariage homosexuel, mercredi 29 mai, à Montpellier."En Chine, les homosexuels n’ont ni le droit au mariage ni au pacs, explique Xiao Han de l’agence de presse chinoise Passingrain. Ils sont même obligés de se cacher car ce n’est pas accepté. Pourtant le pays compte 20 millions d’homosexuels… Il nous semblait intéressant de voir comment ça se passe en France".
En adoptant la loi sur le mariage pour tous le 18 mai dernier, la France est devenue le 14e pays à autoriser la mariage entre personne du même sexe.
Patrie des droits de l’Homme
Pourtant, la présence en nombre de ces reporters venus des quatre coins du monde est, plus que pour la cérémonie elle-même, justifiée par les risques de manifestations et d’affrontements. À l’image de ceux qui ont éclaboussé Paris, quelques jours plus tôt."Si nous sommes là, c’est parce que nous craignons les mouvements en dehors de la salle où se déroule le mariage, assure Estel Llobet, reporter sur la chaîne barcelonaise d’Antena 3. Sinon, nous ne serions certainement pas venus. Nous avons été très surpris de la manifestation à Paris le week-end dernier. L’Espagne est un pays très catholique et pourtant, l’autorisation pour deux personnes du même sexe de se marier a été acceptée (Ndlr, en 2005) de manière pacifique. Pour nous, la France est un pays à l’esprit ouvert et un modèle de République. Alors, nous sommes aussi venus pour comprendre ce qui se passe dans la patrie des droits de l’Homme !". Pendant que la première équipe filmait la cérémonie du mariage entre Vincent Autin et Bruno Boileau à l’intérieur, un deuxième duo était posté à l’extérieur. À l’affût du moindre mouvement de contestation.
Lettres de menace
Sur les hauteurs du nouvel Hôtel de Ville de Montpellier, inauguré il y a un peu plus d’un an, il n’était pas tout seul. Les camions satellitaires des différentes chaînes de télé se sont installés là depuis 8h le matin et les journalistes improvisent leurs directs tout au long de la journée. "C’est ici, dans ce bâtiment à l’allure futuriste que Vincent Autin et Bruno Boileau vont se marier en fin d’après-midi, enchaîne ainsi à l’antenne le reporter de la BBC, Christian Fraser (photo). Avant de poursuivre : Mais la Ville a prévu un dispositif de sécurité renforcé car la maire a reçu deux lettres de menaces…". Et de nous expliquer en aparté : "Au-delà de l’importance de l’événement, l’ampleur de la manifestation à Paris la semaine dernière nous a beaucoup choqué en Grande-Bretagne. La France est considérée comme un pays tolérant, avec une attitude très libérale sur ce genre de questions. Par exemple, votre président actuel et son prédécesseur ne sont pas mariés. Chez nous, en Angleterre, nous sommes bien plus conservateurs".
Loin de la capitale parisienne, Montpellier, considérée comme la ville la plus gay-friendly de France, a finalement vécu son premier mariage sans affrontements. Seules cinq interpellations ont eu lieu suite aux jets de fumigènes. Et, samedi 1er juin, la maire Hélène Mandroux a prévu de marier deux autres couples homosexuels, deux hommes puis deux femmes. "C’est bien, sourit Christian Fraser, soulagé. La France va servir de modèle à d’autres pays".
