Dans de nombreux domaines, les conséquences du réchauffement climatique sont déjà largement visibles. Dans la vallée du Rhône où le climat est assez varié, les vignerons et les scientifiques cherchent des mesures pour que le côtes-du-rhône ne disparaisse pas.
Depuis le XXe siècle, la planète est confrontée au réchauffement climatique qui ne cesse de s’accentuer. Ce phénomène mondial joue un rôle majeur dans la dégradation des conditions de production agricole, toutes catégories confondues. Plus qu’un symbole, le vin est un véritable emblème de la culture française (à consommer avec modération). Mais la considération dont il jouit ne fait pas de cette boisson une intouchable. La viticulture pâtit de la hausse générale des températures. Un constat alarmant et des conséquences déjà visibles pour les viticulteurs de la vallée du Rhône. "Il n’y a qu’à voir de quelle manière la date des vendanges a évolué depuis 30 ans. Elle a été avancée de presque trois semaines dans certains endroits", explique Françoise Dijon, responsable de l’observatoire de la qualité des vins de la vallée du Rhône. Le réchauffement climatique est universel, mais ses conséquences sont différentes comme le montre Françoise Dijon. Par ailleurs, deux zones se différencient dans la vallée du Rhône. Au nord de Montélimar, la zone septentrionale et au sud de Montélimar, la zone méridionale. "On peut dire que le réchauffement du climat est bénéfique à la partie septentrionale. La chaleur permet une meilleure maturation du raisin et évite aux viticulteurs d’avoir recours à un enrichissement, pour un vin "plus naturel". Les décennies précédentes, c’était parfois limite". Une situation qui profite également aux vignes du nord de Lyon, de bourgogne et de champagne mais ne profite pas à la partie méridionale. Ici, le réchauffement climatique est davantage perçu comme un handicap plutôt qu’une aubaine. "Même si le climat a toujours été chaud et sec, aujourd’hui, les périodes ont tendance à devenir excessivement chaudes" soutient Françoise Dijon. La chaleur du climat s’accentuant, la maturation du raisin est donc plus précoce et provoque un décalage trop important ayant des conséquences sur la teneur en sucre.
"Nous avons les cartes en main"
Face à l’immense problématique qu’est le changement climatique, les solutions se doivent d’être à la hauteur des enjeux. C’est ce à quoi réfléchissent, de manière collective et depuis plusieurs années, les scientifiques et les différentes coopératives de la vallée du Rhône. "C’est un sujet qui nous tient vraiment à cœur", martèle Françoise Dijon, responsable de l’observatoire de la qualité des vins de la vallée du Rhône. À l’heure actuelle, le sujet n’est pas tranché, car la problématique climatique se traite sur le long terme. Vignerons et scientifiques ont échafaudé un plan pour "cohabiter" avec et maintenir la culture viticole, alors que les conditions sont toujours plus défavorables.
La réflexion menée s’articule autour de quatre thématiques : la localisation du vignoble, le matériel végétal, la pratique culturale et la pratique œnologique. "Pour la localisation des vignobles, on va chercher à diversifier les expositions en prenant en compte les différents types de sols avec leur taux de sècheresse, leur capacité de filtration, etc. Si on travaille sur l’altitude et l’exposition, nous pourrons compenser la hausse du climat jusqu’en 2030-2050", affirme Françoise Dijon. De son côté, la réflexion sur le matériel végétal s’oriente sur les différents types de cépages, les porte-greffes ou les clones. "Nous avons mandaté l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) pour trouver de nouvelles variétés qui soient plus résistantes aux maladies, à la sècheresse et qui puissent repousser la maturité au maximum". C’est dans cette optique de recherche que certains professionnels ont inscrit dans leur cahier des charges des vignobles qui n’avaient plus tellement la cote comme le Vaccarèse ou le Muscardin. "On a des pistes, on a des cartes en main, mais les vignerons vont devoir les adapter à leur situation", rappelle Françoise Dijon. Pour la pratique culturale, c’est sur le palissage et la coupe que se concentre la réflexion. Le palissage permet à la plante de suivre une trajectoire donnée en lui accrochant ses tiges et ses branches à un fil. Il ne faut pas que le palissage soit trop haut pour éviter "les coups de soif" de la plante. Sa surface foliaire (les feuilles) devra être limitée, car elle augmente la perte d’eau. "On songe également à mettre des arbres sur les parcelles de vigne". Enfin, la pratique œnologique. Comme le clou du spectacle, c’est dans cette étape que toute la réussite de la production se joue. Et aujourd’hui, les choses ont tendance à bouger. "Depuis toujours, on cherche à maintenir l’équilibre entre l’alcool et l’acidité, mais le réchauffement climatique nous complique la tâche et rompt cet équilibre". L’augmentation de la température favorise la maturation du raisin et donc sa teneur en sucre. C’est ce même sucre qui, une fois fermenté, se transformera en alcool. "L’augmentation du taux d’alcool fait baisser l’acidité alors qu’elle est nécessaire. Elle évite que nos vins soient trop alcoolisés. On ne peut pas se mettre à produire des vins à 16°. Aujourd’hui, il y a un vrai travail qui est mené pour maintenir cet équilibre entre l’alcool et l’acidité". Et le travail sera long car la température globale n’est pas prête de se stabiliser. D’ici 2050, elle devrait augmenter de 2°C et offrira à la région un climat quasi sud-méditerranéen.