Les 7 péchés capitaux des syndics

Les points à surveiller lorsqu’on est copropriétaire

1) La Gestion courante

Les services de base facturés au prix fort

Les contrats de syndics ne sont pas toujours faciles à lire pour les copropriétaires, ce qui permet à certains syndics de pratiquer des facturations abusives en ajoutant par exemples aux charges des “frais de photocopies”, “forfaits administratifs”, “heures de vacation”, “carnet d’entretien”… Car il faut faire la différence entre les “prestations de gestion courante” et les “prestations de gestion exceptionnelles”. Les premières sont des tâches que doit réaliser le syndic et pour lesquelles il est payé au forfait. Une liste du Conseil National de la Consommation (CNC) reprise par un arrêté entré en vigueur en juillet 2010, énumère les tâches de base minimales qu’un syndic doit effectuer. Il en coûte en moyenne pour 150 euros (TTC) par lot pour les copropriétaires. Comme leur nom l’indique, les “prestations exceptionnelles” varient d’une année à l’autre et ne peuvent pas faire l’objet d’une forfaitisation. Parfois elles peuvent renchérir de 30% un contrat de syndic. Et le copropriétaire est d’autant moins incité à la vigilance que les sommes sont modestes. Mais elles s’additionnent… David Rodrigues, juriste à la CLCV : “Généralement, le syndic fait un copier coller de l’avis du CNC. Et après il rajoute des petites lignes : “forfait administratif”, “forfait convocation AG” ou “forfait papier”. Cela s’additionne à la gestion courante. Or les prestations exceptionnelles, comme son nom l’indique, doivent être exceptionnelles. On arrive donc à un empilement de prestations qui devraient être comprises dans le forfait de base de la gestion courante”.

2) Le compte séparé

Le syndic fait fructifier votre argent pour son compte

Tous les copropriétaires connaissent bien les “avances de charges”, ces sommes que le syndic vous demande de verser avant d’entamer des travaux. Depuis 2000, le syndic a l’obligation d’ouvrir un compte séparé pour placer ces sommes souvent très conséquentes. Mais il peut obtenir une dérogation à l’AG, ce qu’il obtient souvent en arguant que cela permettra de faire des (petites) économies sur les frais bancaires et de gagner du temps dans le paiement des prestataires. C’est cette dérogation que la loi pourrait interdire. Car sans compte séparé, plus de transparence sur l’usage de ces avances, qui, cumulées, peuvent atteindre des montants considérables. Et susciter bien des tentations ! L’affaire Urbania en est l’illustration. Le réseau est suspecté d’avoir ainsi collecté près de 500 millions d’euros, soit plus de trois fois son chiffre d’affaires annuel, et réussi grâce à des “comptes miroirs” à emprunter une somme équivalente pour racheter des concurrents et se hisser au troisième rang français. Problème, Urbania aurait des problèmes à rembourser les fameux 500 millions… La Société Générale a porté plainte et Urbania négocie devant le tribunal de commerce un étalement de sa dette.

3) Les travaux

Toujours les mêmes entreprises pour un suivi épisodique

Lorsque des travaux sont décidés, le syndic est rémunéré pour en assurer le suivi. Ses honoraires sont libres et doivent depuis la loi Boutin de 2009 être votés à part, pour chaque chantier engagé (ce qui n’est pas toujours le cas, certains syndics continuant d’appliquer un taux fixe, identique pour tous les chantiers). “Si vous limitez les travaux, vous risquez de frustrer votre syndic puisque il se rémunère dessus”, commente David Rodrigues, juriste à la CLCV. Les syndics sont donc régulièrement accusés de “pousser” à la réalisation de travaux, mais le dernier mot appartient toujours aux copropriétaires, lors de l’assemblée générale annuelle.

Encore faut-il que cette rémunération soit justifiée. Car un autre reproche est souvent fait aux syndics, plus embarrassant pour les copropriétaires : l’insuffisance de mise en concurrence des entreprises. Un syndic le reconnaît d’ailleurs, sous couvert d’anonymat : “On travaille souvent avec les mêmes. On connaît les entreprises sur lesquelles on peut compter. Si on estime les tarifs corrects, on continue. Nous n’avons pas le temps de chercher la perle rare”. Or, beaucoup de copropriétaires qui en ont fait l’expérience, se sont rendu compte qu’ils pouvaient faire baisser très sensiblement leurs factures, en demandant eux-mêmes un devis à une société qui n’a pas été contactée par leur syndic… François Vidalin de l’ARC répond : “c’est aux syndics d’aller chercher au moins trois devis. On les paye pour ça”. David Rodrigues ajoute que les syndics doivent aussi assurer un suivi effectif des travaux, pour justifier leurs honoraires : “Il faut un réel travail : réunions de chantier, relations avec les entreprises, réception des travaux… Parfois, on a un peu l’impression qu’il s’agit d’un bonus”.

4) Les filiales de syndic

Un risque de surfacturation

La plupart des gros groupes ont des filiales, notamment dans l’assurance ou les cabinets d’expertise. Foncia possède, par exemple, Assurimmo (assurance) et La CNEB (expertise). Selon l’ARC, des syndics ont résilié le contrat d’assurance sans même l’autorisation du conseil syndical pour passer chez Assurimmo. Pour l’association des copropriétaires, ces assurances maison coûteraient jusqu’à 20% de plus. François Vidalin de l’ARC nous fait part de son expérience : “Notre copropriété, gérée par Lamy, avait également une assurance Lamy. Quand nous avons signifié à notre syndic que nous la trouvions trop chère, il a renégocié le contrat pour l’aligner sur les autres tarifs. À la clé, une baisse de 20%”.

5) L’assemblée générale

Une démocratie parfois malmenée

C’est lors de l’assemblée générale annuelle que s’engagent les dépenses les plus importantes de la copropriété. D’où aussi une série de pratiques peu louables. Ainsi dans cette importante copropriété du 3e arrondissement de Lyon, le syndic ne dépouillait pas les bulletins de vote durant l’assemblée générale et exigeait du président du conseil syndical de signer un procès verbal en blanc. Résultat : “il faisait sa salade”, comme le glisse un copropriétaire. Une salade en l’occurrence à base de “travaux pharaoniques” (ascenseurs, vidéosurveillance, arrosage automatique, fermeture de la résidence…) qui étaient “toujours votés” et “souvent confiés” aux mêmes entreprises. Mais des sommets sont atteints quand les syndics ne convoquent pas d’AG. Selon l’ARC, on rencontrerait “assez souvent” ce genre de pratique.

6) Le syndic au quotidien

Un professionnel aux abonnés absents

Qui n’a jamais entendu un de ses copropriétaires s’emporter : “on paye un syndic mais il n’est jamais là quand il faut”. Pour les associations de consommateurs, il faudrait faire une distinction entre les “gros” syndics (Foncia, Lamy, Urbania…) et les “petites” régies. Les services de ces grandes agences sont scindés en plusieurs entités (comptabilité, gestion, contentieux,…) et parfois difficilement joignables. Quand on a une fuite d’eau ou que l’on veut savoir pourquoi les charges augmentent, ça peut être gênant. Quant aux responsables de la copropriété, ils changent régulièrement. “À chaque fois, on perd quatre mois de travail car il faut le temps de se replonger dans les dossiers. Avec ce turnover, les copropriétaires n’ont plus le service pour lequel ils payent”, explique un professionnel du secteur.

7) Le syndic mis en place par le promoteur 

Quand les intérêts des copropriétaires passent après ceux des promoteurs

Dans un immeuble neuf, le promoteur présente un syndic à la première assemblée générale. Et il est élu. En règle générale, ils ne font pas partie du même groupe. Mais ça n’empêche pas le syndic de défendre parfois davantage les intérêts du promoteur que ceux des copropriétaires qu’il est censé représenter. Quand on emménage dans un nouvel immeuble, les premières années sont marquées par de nombreuses mal ou non façons. À la demande du syndic le promoteur doit faire revenir les entreprises, quitte à faire jouer ses garanties. Francis Chaduiron de la CLCV : “Les promoteurs passent à une autre opération immobilière. C’est la bagarre pour qu’ils fassent revenir les entreprises. Par ailleurs les chantiers sont “sous-sous-traités” en cascade (carrelage, sanitaire,…). Ça dilue autant les responsabilités”.

Selon Francis Chaduiron, les syndics n’ont pas intérêt à hausser le ton car “souvent ils ont d’autres affaires à traiter avec le même promoteur”. Il décrit le mécanisme : “L’astuce consiste à faire durer les choses pour épuiser les principales garanties : garantie de parfait achèvement d’un an et garantie biennale. Parce qu’ils ne savent pas, les copropriétaires pensent pouvoir faire jouer ces garanties en envoyant une lettre recommandée”. Bien souvent, seule une coûteuse procédure judiciaire permet d’obliger le syndic et donc le promoteur à faire leur travail (lire témoignage). “Sachant que les premières années d’une copropriété sont capitales pour l’avenir d’un patrimoine, le laxisme ne doit pas être pratiqué”, conclut Francis Chaduiron.

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Témoignage

“Notre syndic a défendu les intérêts du promoteur… on l’a viré”

L’histoire de François Brunello, primo accédant dans le 7e arrondissement, est un modèle du genre de la collusion entre promoteur et syndic.

En juillet 2008, il emménage avec sa femme dans leur appartement qu’ils viennent d’acquérir dans une nouvelle résidence, à Gerland. Le promoteur et le syndic appartiennent au même groupe, spécialisé dans l’accession social à la propriété ou le logement social. “L’entrée a été très difficile. On a attendu cinq semaines pour être raccordés au gaz”, raconte François Brunello, président du conseil syndical de la copropriété qui compte trente-huit lots.

Dès la première réunion du conseil syndical, les copropriétaires dressent une liste de “103 points” à régler : des problèmes d’éclairage, de VMC ou de fuites au sous-sol. Autant de points que doivent reprendre les entreprises auxquelles a fait appel le promoteur. “Les mois passaient et le nombre de points ne diminuait pas, poursuit François Brunello. On envoyait des mails, des courriers recommandés, on râlait. Rien n’y faisait. On avait l’intime conviction que le syndic et le promoteur jouaient la montre pour qu’on ne puisse plus faire marcher les garanties”. Jusqu’au jour où le conseil syndical envisage de saisir le tribunal pour obliger le promoteur à agir. “C’est là que le syndic a lâché le morceau. Il nous a écrit : “je n’irai jamais contre les intérêts de mon groupe”. Ça nous a définitivement convaincu de changer de syndic”.

Quelques mois après, le nouveau syndic faisait une déclaration de dommage-ouvrage pour régler les principaux points noirs. “Notre nouveau syndic l’a réalisé en deux jours. Avant j’envoyais vingt-cinq mails par semaine sans résultat. Désormais, j’en envoie trois par mois et ça avance”.

Alternative Autogérer son immeuble ? 

Pour réduire les frais de gestion de sa copropriété, le meilleur moyen reste de se passer d’un syndic professionnel. Mais pas de syndic puisque la loi oblige d’en avoir un. Il faut donc un bénévole qui a les mêmes responsabilités. Dans la plupart des cas, ça fonctionne bien quand il s’agit d’une petite copropriété (une quinzaine de lots) qui n’a ni personnel de service, ni piscine, ni locaux commerciaux. “Dans ces cas-là, il n’y a que trois factures à enregistrer par mois”, plaide François Vidalin de l’ARC qui milite activement pour cette forme de gestion. Autre condition de réussite : l’âge de la copropriété. Mieux vaut, en effet, que la copropriété soit neuve. “La gestion se corse, poursuit François Vidalin, quand il y a des travaux à réaliser puisqu’il faut avoir une certaine connaissance du bâtiment pour bien les encadrer”. Dans tous les cas, il est fortement conseiller de rejoindre une association de copropriétaires pour bénéficier d’un suivi juridique.

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