Affaire Snowden/NSA : le point de vue de Stéphane Grumbach, directeur de recherche à l'Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique).
Après l'imbroglio diplomatique autour de l'escale forcée, mercredi 3 juillet à Vienne, de l'avion présidentiel bolivien, suspecté de transporter l'ex-informaticien et agent de la NSA en fuite Edward Snowden, qui a valu à la France de se ridiculiser une fois de plus à l'international, les négociations commerciales sur un accord de libre-échange entre l'Europe et les États-Unis débuteront bel et bien mercredi 8 juillet.
C'est le président de la Commission européenne en personne qui s'est chargé de l'annoncer, mettant ainsi un terme aux réticences françaises d'ouvrir ces discussions transatlantiques. José Manuel Barroso a également précisé que des “groupes de travail” seraient mis en place, qui auront pour tâche de mesurer et d'analyser l'impact des pratiques d'espionnage américain.
Nous avons demandé à Stéphane Grumbach, directeur de recherche à l'Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) au sein du laboratoire lyonnais Dice (Données de l’Internet au cœur de l’économie), son point de vue sur l'affaire Snowden.
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Lyon Capitale : En juin dernier, Edward Snowden, ex-agent de la NSA (Agence nationale de sécurité) faisait des révélations fracassantes sur l’espionnage systématique des États-Unis, via la NSA, des communications téléphoniques et d’Internet dans le monde entier. Qu'est-ce que cette histoire a révélé au monde ?
Stéphane Grumbach : Pour moi, c'est un événement historique, qui figurera sans doute dans les livres d’histoire. L'affaire Snowden a mis en lumière la capacité des États à contrôler l'ensemble de leurs citoyens, et pas uniquement une liste de citoyens suspectés d'activités illégales ou portant atteinte à la sûreté de l'État.
Cette affaire Snowden est-elle une surprise pour vous ?
Sur la forme bien sûr, mais beaucoup moins sur le fond. Les capacités de calcul et de stockage de données de la NSA sont connues. On sait donc que la NSA peut traiter et stocker sur le long terme d’immenses quantités de données. Ce qu’on ne savait pas précisément, c’est comment elle accédait à ces données.
Se pose alors une question de fond : quelles informations sont extraites de nos données si elles sont confiées à nos voisins ?
C'est tout l'enjeu de la maîtrise des données. Les pays qui contrôleront les données contrôleront la connaissance, et le monde. C'est donc un enjeu global, stratégique et géopolitique. En France, on a les tuyaux mais pas les données. On les envoie aux États-Unis ! Et l’objectif des autorités est bien plus d’augmenter la taille des tuyaux que de maîtriser l’industrie de la donnée, ce qui passe dans les tuyaux. L’Europe a une phobie des données. Elle défend un principe de précaution numérique, voudrait préserver la vie privée, mais ne sait produire que des régulations qui n’ont que très peu d’impact...
> L’entretien complet est à retrouver dans la version papier de Lyon Capitale, en kiosque vendredi 5 juillet.