Alain Chemedikian
Alain Chémédikian, aujourd’hui âgé de 72 ans, devant la maison de son enfance, dans le quartier de la Soie, à Décines. Il était voisin de Georges Manoukian, dit Chaïn, avec qui il braqué quelques années, Michel Silmetzoglou, dit “Le Grec” ou encore Pierre “Pipo” Zarkarian, “des gentils garçons”,  tous trois membres du “gang des Lyonnais” @Antoine Merlet
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L’histoire vraie du “Taureau” du gang des ripoux de Lyon

Fils d’immigrés arméniens, Alain Chémédikian a été l’un des piliers des “ripoux de Lyon”, une association peu orthodoxe entre flics et voyous. De Décines, dont il est originaire – comme presque tous les membres d’un autre gang célèbre, celui des “Lyonnais” –, il a glissé progressivement dans l’illégalité, “bêtement”. Condamné à perpétuité, il est libéré au bout de dix-neuf années. Il publie, avec le journaliste police-justice Frédéric Ploquin, Gang de flics (Nouveau Monde).

“Ça coule propre les voitures. D’abord, quand tu les pousses à l’eau, elles remontent, le courant les emmène un peu au large et ensuite, pouf !, elles s’enfoncent à pic... On en a noyées un paquet ici.” Au bord du canal de Jonage, sous le pont de la Sucrerie, entre Décines et Vaulx-en-Velin, Alain Chémédikian plonge trente-cinq ans en arrière. Celui que les balèzes de la police judiciaire, à la BRB et la BRI, surnommaient “le Taureau”, pour sa forte carrure, a été au cœur d’un des gangs lyonnais les plus mémorables. Une bande organisée constituée de policiers lyonnais en exercice et de braqueurs chevronnés qui a défrayé la chronique entre 1985 et 1990 et est entrée dans les annales de la justice. “Les ripoux de Lyon”, dont la presse en a fait ses choux gras, ont été reconnus coupables de cinquante-neuf hold-up sur les 120 probablement commis, se soldant par la mort de trois personnes. Le gang a fait parler la poudre dans toute l’agglomération lyonnaise, de l’Ain, de l’Isère, de la Loire, du Doubs et du territoire de Belfort et a donné du fil à retordre à la PJ de Lyon.

Dans la “marmite du Diable”

Mais c’est bien de Décines, dans le quartier de la Soie, que l’histoire du “Taureau” a débuté. Ses parents, arrivés par bateau de Marseille pour fuir le génocide arménien perpétré par les Turcs, s’installent dans la cité ouvrière, rythmée par l’usine de fabrication de soie artificielle. Décines compte alors des Arméniens (près d’un quart de la population), des Italiens, des Maghrébins, des Polonais, des Portugais, des Espagnols qui travaillent tous la “rayonne”, comme on dit alors. Alain Chémédikian est le dernier d’une fratrie de sept enfants, “dont aucun n’a dévié d’une virgule”. École catholique privée, baignades dans le canal en été, passage à l’église arménienne le dimanche. Les portes des maisons avec jardin abritant chacune quatre familles restent toujours ouvertes. L’enfance est heureuse.


L’enfance est heureuse. À 17 ans, il est plâtrier. Ses feuilles de paie dépassent largement celles de son père, “traité comme un esclave”.


À 17 ans, il est plâtrier. Ses feuilles de paie dépassent largement celles de son père, “traité comme un esclave”. Chémédikian gardera d’ailleurs un profond ressentiment pour le patronat qui “envoie toujours à la bataille ceux qui sont en bas de l’échelle”. Son modèle, c’est l’Abbé Pierre, son héros Missak Manouchian, poète arménien fusillé en soldat régulier de l’Armée française de la Libération. Bien loin du (grand) banditisme.

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