Interview - Tête de liste des Verts pour la métropole de Lyon, Bruno Bernard va faire face à ce qu’il qualifie de "coalition anti-climat" menée par Gérard Collomb et François-Noël Buffet. Ouvrant une porte à une possible alliance avec David Kimelfeld, le candidat est clair "personne ne naît écologiste, on le devient".
Lyon Capitale : Vous êtes devenu la cible d’une coalition entre la droite et Gérard Collomb visant à vous faire barrage. Depuis plusieurs jours, les déclarations apocalyptiques se multiplient sur les conséquences d’une possible victoire des Verts, comment réagissez-vous à ces attaques ?
Bruno Bernard : En 1981, certains prophétisaient l’arrivée des chars russes en France. On a vu ce qu’il s’est passé avec l’élection de François Mitterrand, ils ne sont jamais arrivés. Tout cela témoigne probablement d’un manque d’arguments et de projets. Au premier tour, Gérard Collomb et François-Noël Buffet sont passés d’un programme "plus vert que vert", et maintenant, entre les deux tours, ils nous disent "tout sauf l’écologie". La cohérence de cette coalition anti-climat n’est pas très lisible, à part le fait de vouloir garder leurs postes à tout prix. Lors de leur conférence, ils n’ont pas présenté la moindre proposition sur la métropole, aucune proposition pour aider l’économie.
L’un des arguments est "que Lyon ne devienne pas Grenoble"…
… ils parlent d’un Grenoble où le maire vert Éric Piolle a fait 46 % au premier tour. Il a reçu la confiance d’une partie des Grenoblois. Il a fait un meilleur score que des élus sortants dans la métropole de Lyon. C’est intéressant d’entendre François-Noël Buffet dire que Lyon ne doit pas devenir Grenoble quand on voit que lorsqu’il était maire d’Oullins, il a très mal géré sa commune. C’est l’une des villes les plus endettées de France, 14 millions d’euros ont dû être versés aux banques pour couvrir les emprunts toxiques. Personnellement, je n’ai jamais mis l’une de mes entreprises en faillite.
Comment la crise a-t-elle changé votre programme ?
D’une certaine manière, la situation est la même qu’avant la crise. Elle est effectivement plus difficile sur le point de vue économique, mais cela ne change pas notre volonté d’accompagner les entreprises, les plus démunies, les associations, tout en préservant le climat, en luttant contre la pollution et en réduisant les inégalités, notre projet ne change pas.
Quel regard portez-vous sur cette alliance ?
Cela m’attriste pour Gérard Collomb, il a fait des choses positives depuis 2001, même s’il n’a pas compris les enjeux écologiques et a été sanctionné dès le premier tour. Après avoir perdu dans les urnes, il perd maintenant ses valeurs.
Un accord avec les mouvements de Renaud Payre (La Gauche unie) et Nathalie Perrin Gilbert (Lyon en commun) est en cours, comment allez-vous travailler avec deux personnes qui se sont affrontées régulièrement, n’avez-vous pas peur d’une majorité difficile à tenir ?
Je ne fais pas des alliances de personnes, mais des alliances de projets. Le conseil métropolitain est composé de 150 élus. Si nous gagnons, ce qui nous occupera le plus, ça ne sera pas gérer des animosités personnelles. Nous aurons des choses plus importantes à gérer que cela.
Où en êtes-vous de vos discussions avec David Kimelfeld ?
Nous avons toujours dit que nous voulions nous réunir dans un projet et dans la cohérence. En termes de projet, j’ai l’impression qu’il s’est rapproché de nous. Dans la cohérence, il a pris ses distances avec En marche. C’est donc à lui de faire ce qu’il souhaite. S’il est prêt à venir sur la base d’un projet, il peut venir.
Il peut venir, mais sans les députés La République En marche qui le soutiennent…
La cohérence, c’est de ne pas avoir de députés LREM dans l’alliance. D’un côté, on ne peut pas dire qu’on veut construire plus de logements sociaux et de l’autre avoir des gens qui soutiennent un gouvernement qui fait les poches des bailleurs sociaux.
On entend les écologistes nous parler de l’urgence, qu’il est important d’agir avant qu’il ne soit trop tard, la crise du coronavirus a encore accéléré les choses, ces questions d’étiquettes ne sont-elles pas anachroniques dans ce contexte ?
Elles sont totalement anachroniques. Ce n’est pas une question d’étiquette, je comprends qu’on puisse faire des choix dans sa vie politique. Je comprends qu’on ait pu soutenir Emmanuel Macron à un moment, je ne le reproche à personne, mais là nous parlons de savoir où l’on ira ensemble. Personne ne naît écologiste, on le devient.
Comment voyez-vous la campagne sur le plan logistique dans le contexte actuel ?
Il s’agit d’une campagne inédite ne serait ce que par sa durée. D’habitude, elle dure trois jours, là elle va s’étaler sur un mois. Nous devons limiter les contacts, sans distribuer de tract, nous ferons donc campagne via les médias, les réseaux sociaux, avec une présence très limitée dans l’espace public. Il ne faut prendre aucun risque. Avec 1,4 million d’habitants pour la métropole, la campagne était déjà plus médiatique, que de terrain. Pour le local de campagne, nous avons eu l’idée de solliciter un lieu culturel qui a souffert durant la crise. Je trouvais que cela avait plus de sens que de s’installer dans un immeuble de bureau.
Gérard Collomb a abandonné l’Anneau des sciences, quels sont les grands autres projets auxquels vous vous opposez ?
François-Noël Buffet va devoir éclaircir sa position, il défendait toujours l'Anneau des sciences jusqu’à présent. Nous nous opposerons à tous les projets de grandes installations de surfaces commerciales au détriment des terres agricoles. Nous voulons relocaliser l’économie, aider le commerce de proximité, favoriser les circuits courts. Les choses sont en train de changer, il ne faut pas rater cette opportunité pour ne pas retomber dans les travers d’avant.
La grande inconnue reste la participation du second tour, restez-vous confiants ?
Nous avons une dynamique et une cohérence. Les électeurs auront le choix des élus du passé ou un choix positif, autour de l’écologie et de la justice sociale. Je leur fais confiance pour faire le bon. J’espère que la participation va monter. Notre électorat s’est abstenu autant que les autres, voire plus parfois.