Alors que le matin, Gérard Collomb avait placé toute sa confiance dans la science pour régler les problèmes écologiques à Lyon, l'après-midi, Yann Cucherat s'est rendu chez Boiron spécialiste de l'homéopathie. Le candidat à la ville de Lyon avait posté un message sur Twitter racontant sa visite avant de l'effacer.
À Lyon, pour les candidats aux élections métropolitaines et municipales, le sujet "Boiron" est considéré comme "un terrain glissant", sur lequel le prétendant à la ville de Lyon, Yann Cucherat s'est risqué quelques minutes, avant de se raviser. D'un côté, le spécialiste dans l'homéopathie, qui est installé à Messimy, emploie autour d'un millier de personnes sur l'agglomération, ce qui en fait l'une des entreprises majeures du territoire. De l'autre, son domaine d'application est clivant, régulièrement ciblé par la communauté scientifique qui émet des doutes sur l'efficacité de l'homéopathie, encore plus depuis que le gouvernement a choisi de la dérembourser totalement en 2021. La ministre de la Santé avait choisi de suivre l'avis de la Haute Autorité de Santé qui estimait l'efficacité de l'homéopathie "insuffisante".
Collomb au secours de Boiron en juin
Après l'annonce de cette décision en juin, le maire de Lyon Gérard Collomb avait demandé de nouvelles études, venant au secours de Boiron qu'il qualifiait de "fleuron industriel lyonnais". L'entreprise avait estimé qu'un déremboursement ferait courir un risque à 1 000 emplois directs dans le secteur. Néanmoins, un déremboursement de l'homéopathie ferait économiser plus de 120 millions d'euros par an à l'assurance maladie, posant en filigrane celle d'une "subvention" de ces mêmes emplois par le biais d'argent public alors que le consensus scientifique sur l'efficacité insuffisante n'a pas été remis en question.
Yann Cucherat publie, puis efface
Si Gérard Collomb brigue désormais la présidence de la métropole, il a choisi Yann Cucherat pour être son candidat à la ville. L'ancien gymnaste multiplie ainsi les messages sur les réseaux sociaux pour gagner en visibilité. Mardi, il a ainsi publié le tweet suivant accompagné de photos où l'on pouvait voir le logo de Boiron : "Visite des laboratoires Boiron cette après-midi avec Jean Christophe Bayssat et Valérie Lorentz Poinsot. Cela m'a permis de découvrir et d'échanger sur l'entreprise et plus largement sur l'homéopathie".
Moins d'une heure plus tard, le message a été tout simplement effacé. Contactée par Lyon Capitale pour connaitre les raisons de cette suppression, l'équipe du candidat n'a fait aucun retour. Selon nos informations, quelques dents ont grincé dans l'entourage de Gérard Collomb et Yann Cucherat pour trois raisons. La première viendrait de la promotion d'une entreprise durant la campagne, avec des photos portant le logo qui pourraient penser à une communication officielle dont les éléments ont été fournis par Boiron. Par ailleurs, il existerait un risque de se faire accuser d'être réceptif à ce qui pourrait être considéré comme une forme de lobby (les promesses de construire une autoroute faite au BTP étant passée par là également). Enfin se pose la question du caractère polémique de l'homéopathie dans un contexte de campagne.
Le risque d'utiliser la science "quand ça arrange"
Le tempo de la publication est d'autant plus délicat pour Yann Cucherat puisque le même jour, Gérard Collomb a présenté ses grands axes écologiques à Lyon pour l'élection métropolitaine et municipale. Sans ruptures majeures, le programme vert des deux candidats repose majoritairement sur la foi dans la science et les innovations technologiques (lire ici). Cette même science qui s'oppose depuis des décennies à l'homéopathie à travers le monde entier. En filigrane se dessine le risque pour Gérard Collomb et Yann Cucherat d'être accusés de brandir la carte de la science uniquement lorsque cela les arrange, ou de la passer sous silence quand elle ne va pas dans leur sens.
Ci-dessous, le message effacé par le candidat :
Yann Cucherat chez Boiron (capture Twitter)
Merci LYC pour votre travail de journaliste.
Boiron pille la sécurité sociale (=ensemble des citoyens) depuis des décennies en faisant subventionner la vente des bonbons au sucre à prix d'or. Il est grand temps que cela s'arrête.