L'Institut Gaston-Berger de L'Insa Lyon a publié un livre blanc dans lequel il s'alerte du manque de mixité dans les écoles du groupe. Il souhaite favoriser le recrutement d'élèves issus de milieux défavorisés.
"A l'Insa, on pense que c'est un problème de reproduire l'élitisme social, ce n'est pas en accord avec nos valeurs." Sonia Bechet, directrice de l'institut Gaston Berger, Think Tank fondé en 2015 par l'Insa Lyon, pose le cadre. En 2016, l'institut a mené un premier travail d'analyse de ses données sur la mixité sociale des étudiants de l'école d'ingénieur lyonnaise.
Puis, les 20 octobre 2021 et 23 novembre 2022 paraissent les tomes 1 et 2 du livre blanc de l'Insa, pilotés par Carole Plossu, directrice de l'institut Gaston-Berger. Il sont baptisés : Diversités et ouverture sociale, état des lieux (tome 1) ; préconisations (tome 2) . Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils sont exigeants tant dans leur contenu que dans leurs attentes envers les sept établissements de l'Insa en France.
Plus d'élèves issus de milieux favorisés, moins de boursiers
"Ce tome 1 du livre blanc [...] pose un constat clair du décalage entre notre ambition sociale et la réalité des promotions que nous accueillons", peut-on lire en avant-propos. Ainsi, entre 2015 et 2020, la part d'élèves dont les deux parents sont des chefs d'entreprise, des cadres ou exercent des professions intellectuelles supérieures a augmenté de 5,5 points. Dans le même temps, le taux de boursiers Crous a perdu 2,5 points, dont seulement 5,2 % relèvent des échelons les plus élevés.
Pour la première version de ce travail, réalisée à Lyon uniquement, "nous étions remontés jusqu'en 2009 et on voyait déjà des tendances flagrantes de perte de mixité, détaille Carole Plossu. Et d'ajouter : Etant donné que notre recrutement est commun à toutes les écoles, il fallait absolument faire ces études au niveau national si nous voulions agir."
C'est que, depuis sa création en 1957 dans un contexte de pénurie d'ingénieurs, l'école qui forme chaque année environ 22 000 élèves en France s'est donnée une mission bourdieusienne : lutter contre la reproduction sociale. Première école directement accessible après le Bac, implantée en province, pas de concours et internat tout au long de la scolarité. Ainsi, 23 % des admis à Lyon en 1968 étaient des enfants d'ouvriers et d'employés et 13 % des enfants d'agriculteurs. Problème, l'Insa est victime de son succès : "On est de plus en plus attractif pour les familles les plus favorisées. Les élèves arrivent avec de meilleurs dossiers scolaires et ce sont eux que l'on recrute", note Sonia Bechet.
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A noter que, si la mixité sociale baisse, elle reste largement supérieure à celle observée par exemple dans les grandes écoles de commerces ou les autres formations d'ingénieur hors université dont seulement 12,4 % et 22,5 % des étudiants (selon le ministère de l'Enseignement supérieur) sont boursiers contre 31,2 % à l'Insa. "Les indicateurs de bourse Crous ne sont de toute façon pas assez représentatifs", rappelle Carole Plossu qui aimerait avoir accès au Professions et catégories socioprofessionnelles (PCS) des parents d'élèves ainsi qu'aux Indices de position sociale (IPS) des lycées.
"Nous on arrive en bout de chaine, le système scolaire dans sa globalité est discriminant et on évolue dans un écosystème contraint."
Sonia Béchet, directrice de l'Institut Gaston-Berger
Face à ce constat, l'Insa veut agir. Mais comment faire quand les inégalités sociales sont déjà l'affaire des collèges et lycées. "Nous on arrive en bout de chaine, le système scolaire dans sa globalité est discriminant et on évolue dans un écosystème contraint", déplore Sonia Béchet. Impossible pour l'instant d'avoir accès aux IPS des lycées, l'Etat refuse de les communiquer pour éviter que certaines écoles en profitent pour cibler leur recrutement sur des élèves favorisés.
Discrimination positive
Pourtant, pour l'Insa, cet indicateur est indispensable pour cibler le recrutement sur des établissements particuliers, l'une des mesures proposées par le groupe dans son livre blanc, à travers un dispositif national. Animé par "une logique d'équité assumée", comprenez, de la discrimination positive, le sujet devient éminemment politique. Ca tombe bien, "nous avons une vraie volonté d'influer sur les politiques publiques", lance Carole Plossu. Le livre blanc propose ainsi de mettre en place des conventions avec des lycées selon des critères sociaux et territoriaux, des actions de tutorat (déjà mises en place par le groupe) et la création d'une voie spécifique sur Parcoursup.
Cette dernière mesure permettrait la mise en place d'une exonération des droits de candidature, un examen individualisé des dossiers, un entretien, ou encore une "admission éventuelle conditionnée à la signature d'un contrat d'engagement à participer à tous les dispositifs d'accompagnement" mis en œuvre par l'Insa. "On a eu un premier rendez-vous avec la ministre de l'Enseignement supérieur, on a soumis nos ambitions, on a besoin d'un retour", conclut Carole Plossu.
ce type d'études me soucie nettement, car je sens à travers ce think thank le besoin de d'avantager les moins favorisés et donc minimiser le nombre d'étudiants méritants, ayant raisonnablement travaillé le long de leur parcours scolaire quelque soit le statut social dont ils sont issus.
C'est une forme de racisme non dit qui a déjà terriblement sévi dans l'éducation nationale et dont on voit le résultat avec le déclin général du niveau français dans toutes les comparaisons internationales....et dans la vie courante.
Le wokisme à la manoeuvre !