Le maire de Lyon et le président de la Métropole de Lyon se confrontent à la realpolitik. Un exercice public hautement politicien en année préélectorale.
Dès leur ascension au pouvoir, il y a quatre ans, les écologistes ont du composer avec une frange, conservatrice jugeront certains, de Lyonnais qui n'avaient pas digéré l'alternance verte et traquaient inlassablement le faux pas de la majorité.
Quatre ans plus tard, la contestation a grossi et s'est élargie à d'autres couches de la population, dépassant copieusement la bordure. Les Lyonnais (et les plus grands) sont au bord de la crise de nerfs. Les travaux à marche forcée de la Ville et de la Métropole ont fini d'achever l'attaque nerveuse.
Le diagnostic est posé. Les caillots dans les veines ont migré dans les artères plus profondes. La thrombose superficielle s'est compliquée en phlébite. Le risque est aujourd'hui celui d'une embolie.
Consciente que Lyon frise l'overdose, la majorité écologiste a donné un coup de patin, rongeant dans le même temps son frein en coulisses. Bruno Bernard (les grandes décisions se prennent à la Métropole) n'avait pourtant pas l'intention de ralentir, ayant même invité le BTP à ne pas traîner (un euphémisme), insistant pour une livraison des travaux pour l'automne 2025.
L'édile a choisi de faire baisser la pression, la cocotte-minute
promettant d'exploser, et d'apaiser – pour reprendre l'ADN linguistique écologiste – les tensions. Des chantiers ont été reportés sine die, principalement des voies cyclables et des Voies lyonnaises, ces autoroutes à vélos, pennon ostensible et particule salutaire de l'écologie.
Les écologistes sont confrontés à la dure réalité du pouvoir et se heurtent aux limites de son exercice. A savoir le peuple. Et il ne s'agit plus simplement d' « une poignée d'excités qui (refusent) le dialogue », comme s'était emporté Jean-Charles Kohlhaas, le VP aux déplacements de la Métropole.
L'échéance électorale 2026 (Lyon et Métropole) a rattrapé le président de la Métropole. Qui jure ses grands dieux ne pas s'attarder à ces questions politiciennes et être au-dessus de la mêlée. « Il y a la question financière qui fait que l'on est dans une instabilité sur nos recettes » défend-il. Reconnaissant toutefois que « c'est (aussi) simplement une question de bonne gestion des mobilités ».
« C'est effectivement un temps qui approche de l'élection municipale 2026 » reconnaît tout de même Gautier Chapuis, adjoint au maire de Lyon et co-président des élus écologistes à la Ville de Lyon. Qui relativise toutefois : « c'était dans notre projet de majorité dès 2020 de faire avec les Lyonnais et les Lyonnaises, donc on a à cœur de les écouter et d'ajuster les projets ».
Place de la Comédie, le maire de Lyon a, lui aussi, et ce n'est pas un poisson d'avril anticipé (d'aucuns ont été abasourdis), mis son poing dans sa poche et fait son mea culpa sur les caméras de vidésosurveillance, au sujet desquelles, dans la droite ligne du dogme écologiste, il a toujours refusé de donner suite. Allant même jusqu'à braquer sa majorité de gauche, LFI fustigeant une « rupture avec ses engagements ». Du « pragmatisme », rectifie Grégory Doucet.
Faut-il voir dans ces volte-face doctrinales du maire de Lyon et du président de la Métropole un « coup » électoral, une tactique politique à quinze mois des élections municipales ? La realpolitik, c'est avant tout de la diplomatie pragmatique, davantage portée sur les réalités et les rapports de force qu'elles font naître. Un exercice public hautement politicien en année préélectorale.