Projet de téléphérique © Antoine Merlet / Simulation Lyon Capitale

Lyon : le téléphérique cristallise les débats au Sytral, une élue écologiste ironise sur "Mauvaise-Foy-lès-Lyon"

Le projet de téléphérique continue de faire débat dans la Métropole de Lyon. Ce lundi 22 mars, le Sytral a voté le lancement d'une concertation préalable au projet sous l'égide du garant désigné par la Commission Nationale du Débat Public. La concertation aura lieu à l'automne 2021. Mais les inquiétudes sur ce projet demeurent. Et les critiques sur le manque de concertation du Sytral en amont aussi. Décryptage.

C'est l'un des gros projets inscrits au plan de mandat du Sytral pour la période 2020-2016 : la réalisation d'un transport par câble entre Francheville et Lyon, en passant par Sainte-Foy-lès-Lyon et La Mulatière, à l'horizon 2026. Ce projet déchaîne les passions dans l'ouest lyonnais.

Accusé par nombre d'opposants - mais pas que - d'avoir clairement manqué de concertation en amont de l'annonce de la décision de ce projet, en décembre 2020, le Sytral tente de récupérer la main. Mais rame. Une concertation préalable sera menée à l'automne 2021 afin de soumettre à l’avis des citoyens plusieurs hypothèses de tracés ainsi que les principes d’insertion des stations et pylônes. "Afin de répondre aux interrogations des habitants autour de ce nouveau mode de transport et que les échanges se déroulent dans les meilleures conditions possibles, nous avons fait le choix de mener cette concertation préalable sous l’égide d’un garant désigné par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), qui assurera notamment la pertinence, la qualité et la sincérité des informations diffusées", explique le président du Sytral, Bruno Bernard.

Bruno Bernard, président aussi de la Métropole de Lyon, le sait. Le projet divise. "Il faut concerter de façon efficace, transparente. Les tracés peuvent être très nombreux. La concertation s'annonce passionnante", poursuit le président Bernard.

Le Sytral très critiqué sur le lancement du projet, sur la méthode

Au Sytral, les débats ont été nourris au lundi. Il ne devait être question que de voter le lancement de cette concertation préalable sous l'égide d'un garant désigné par la CNDP. Mais les débats ont aussi débordé sur l'opportunité d'un tel projet. Ce projet divise, même à l'intérieur des "camps" politiques. "Le transport par câble est une offre innovante, supplémentaire et adaptée au relief de l'ouest lyonnais", s'est réjoui le maire LR de Francheville, Michel Rantonnet, favorable au projet depuis son annonce. Il a toutefois pas manqué de rappeler que selon lui "le métro E à Tassin est la colonne vertébrale d'une véritable offre structurante (de l'ouest lyonnais)". Il a voté favorablement le lancement de la concertation : "La CNDP a déjà éclairé des débats contradictoires, c'est un atout supplémentaire dans ce dossier après la cacophonie et la maladresse du lancement de ce dossier, la CNDP garantira l'expression libre de chacun sur le transport par câble".

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Damien Combet, maire DVD de Chaponost, a rappelé que sa ville n'était pas directement concernée. Mais elle "touche" Francheville et Sainte-Foy. Il a également voté pour la concertation. Avec des gros "mais". "Nous voterons pour ce rapport concernant la concertation, a-t-il insisté. Mais je m'étonne de l'ordre dans lesquelles les annonces ont été faites, mettant clairement un vrai doute sur le sens réel de cette dite concertation. Je suis plutôt dubitatif sur la finalité réelle d'une consultation des habitants après même qu'ait été annoncée la mise en oeuvre de ce moyen de transport. Il m'aurait paru beaucoup plus démocratique et participatif que cette concertation se mette en place avant d'en valider et d'en défendre les principes quasiment actés par vos soins Monsieur le Président (Bruno Bernard). Il s'agit d'une drôle de manière d'imaginer le principe même de la concertation".

"Même si l'intérêt général doit toujours supplanter la somme des intérêts particuliers, nous devrons tirer de cette concertation les leçons d'un processus donc la chronologie aux forceps n'aura certainement pas contribué à la bonne compréhension des habitants", a poursuivi le maire de Chaponost.

Les débats font rage à Francheville et à Sainte-Foy

Localement, on l'a dit, le projet fait débat. Le maire LR de Francheville est pour, les maires LR de Sainte-Foy-lès-Lyon et de La Mulatière sont contre. Conseillère municipale écologiste de Francheville, mais aussi vice-présidente de la Métropole de Lyon en charge de la coopération européenne et du tourisme, Hélène Dromain a taclé la mairie de Sainte-Foy, vivement opposée au projet : "Ce sujet suscite les réactions les plus vives et pas toujours rationnelles. Je note d'ailleurs que les opposants font preuve de beaucoup de créativité et d'humour, ça c'est bien, comme cette idée de concours de pancarte lancé par la maire de Sainte-Foy-lès-Lyon avec d'amusants cadeaux aux frais des contribuables".

La ville de Sainte-Foy-lès-Lyon organise un jeu-concours "votre regard sur le téléphérique" et offre au candidat le plus drôle et imaginatif un week-end... au ski. Tout en ironie (lire ici). Une initiative qui fait sourire... jaune au Sytral. "Est-ce qu'on y verra uniquement les opposants au projet ? Les partisans seront-ils censurés ?", s'est interrogée Hélène Dromain, conseillère municipale écologiste de Francheville. "De mon côté, je vous propose de rester sur ce ton et je propose de débaptiser la ville en remplaçant Sainte par Mauvaise (ce qui donne Mauvaise-Foy-dès-Lyon)", a-t-elle ajouté, tout en nuançant : "je suis persuadés que la majorité des opposants sont sincères, de bonne foi, de bonne Sainte-Foy, et pas seulement effrayés par la nouveauté, et il est essentiel de discuter avec eux et d'entendre leurs arguments".

Mi-février dans un communiqué, les élus écologistes de Francheville, tout en "considérant que le projet de transport par câble est une opportunité originale et innovante qu'il faut étudier à fond", ajoutaient aussi que 'les études sont en cours et la phase d'information et de concertation démarrera à l'automne. Face à un projet aussi nouveau, la concertation doit démarrer dès que possible et être beaucoup plus forte". Ils demandaient "une meilleure écoute et prise en compte des craintes des habitants des communes concernées dans la conduite de ce projet". Avec un maître-mot : l'acceptabilité. "Son acceptabilité est un des enjeux importants et nécessite de mobiliser concertation, pédagogie et ingénierie, et ce sans tarder", ajoutaient les élus écologistes.

L'acceptabilité était le maître-mot des élus centristes et de droite lundi au Sytral. "Le vrai sujet qu'on doit tous se poser en tant qu'élus, c'est l'acceptabilité. Sans acceptabilité des habitants et des communes, il sera extrêmement difficile de pousser ces projets jusqu'au bout", a poussé Alexandre Vincendet, le maire LR de Rillieux-la-Pape.

"S'il n'y pas l'acceptation de Sainte-Foy, on ne peut pas leur imposer, en force" (Quiniou)

Christophe Quiniou, le maire LR de Meyzieu, va plus loin. Et estime que le projet tel qu'il est présenté actuellement ne peut pas se faire sans l'assentiment de Sainte-Foy. "Je suis toujours un fervent défenseur des transports innovants, et notamment par câble. Avec un grand nombre d'élus de l'est lyonnais, nous demandons systématiquement au Sytral d'étudier. Mais sur ce projet-là, il y a un point important. Il faut voir le côté impactant au niveau d'une commune. Pour la commune de Sainte-Foy-lès-Lyon, avoir un transport par câble au-dessus d'elle, c'est radicalement changer son image. C'est un marqueur tellement fort qu'au niveau national, Sainte-Foy serait la ville du téléphérique. Au-delà de l'aspect technique, il faut bien avoir en tête que l'image qu'on veut imposer à Sainte-Foy ne peut pas justement lui être imposée, il faut qu'elle soit partagée. S'il n'y pas l'acceptation de la ville, on ne peut pas leur imposer ça, en force".

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Le conseil municipal de Sainte-Foy a d'ailleurs voté au mois de février un voeu réclamant un référendum local dans les trois communes concernées avec un droit de véto. Qu'en pense Bruno Bernard ? "Le débat aura lieu. Sur tout. Par contre, on ne peut pas poser des préalables en disant que si une commune, et pourquoi pas un quartier, était opposée à un projet de transport en commun, on ne pourrait pas le faire. Notre rôle, c'est de regarder les avantages et les inconvénients de façon globale et pas de façon locale. Sinon on aurait jamais remis le tram à Lyon en 2001".

Bernard promet une vague concertation à l'automne sur tout: "sur l'opportunité du projet, sur des alternatives éventuelles au projet, sur les tracés du projet, tout est au débat. On va discuter avec les citoyens, les élus locaux, les acteurs associatifs et économiques de ce projet qui est très innovant et qui apporte de l'inquiétude et aussi beaucoup d'envie dans la population. Tout est ouvert. L'objectif c'est vraiment que tout le monde puisse s'exprimer, et de voir les avantages et les inconvénients du projet, de voir si c'est bien la solution pour les territoires de l'ouest. Je comprends toutes les inquiétudes".

Kholhaas "On peut imaginer des changements de tracés"

La concertation devrait démarrer à l'automne 2021. "Elle peut durer plusieurs mois", estime Jean-Charles Kholhaas, vive-président délégué du Sytral, qui pilote ce projet au Sytral. Il est également 5e vice-président de la Métropole de Lyon, en charge des déplacements, intermodalités et logistique urbaine. Il avait longuement détaillé ce projet dans Lyon Capitale (l'interview en intégralité est à retrouver ici),

"Dans la concertation de l'automne, il est prévu qu'on puisse discuter du tracé tel qu'il aura été étudié mais aussi des alternatives possibles. Le tracé n'est pas précis. On peut imaginer plusieurs tracés autres. C'est le vrai rôle de la concertation, poursuit Jean-Charles Kholhaas. Si les habitants de Sainte-Foy nous disent, comme ça été exprimé aujourd'hui, pour des raisons culturelles on ne veut pas que Sainte-Foy soit survolée par un transport par câble - je dis bien les habitants, pas seulement quelque uns - on aura d'autres solutions sans doute. La concertation, c'est un vrai débat. Pour qu'il y ait débat, il faut que les gens aient les informations. Donc il faut apporter un maximum d'informations". Un tracé arrivant à Oullins pourrait aussi être étudié.

La concertation va être totale, promet-on au Sytral. "On peut même remettre en cause l'opportunité du projet. On peut aussi envisager des déplacements de stations, des déplacements de pylônes, et des changements de tracés", conclut Jean-Charles Kholhaas.

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