Piétonnisation de Lyon

Lyon : un bilan de la piétonnisation qui prépare un futur incontournable

Les Lyonnais ont-ils pris goût à la piétonnisation qui a été expérimentée à plusieurs reprises en 2019 ? Le bilan final montre un véritable impact sur certains points comme le bruit, tandis que l'apocalypse routière redoutée par certains n'a jamais eu lieu.

Plusieurs expérimentations de piétonnisation ont été menées à Lyon, suite à l'impulsion du président de la métropole David Kimelfeld. Les samedis 28 septembre, 12 et 26 octobres, ainsi que le mercredi 20 et jeudi 21 novembre, les piétons ont été prioritaires dans un large secteur de la presqu’île de Lyon, allant de Bellecour nord aux bas des pentes de la Croix-Rousse. À ces occasions, plusieurs mesures ont été effectuées, pour un bilan dévoilé ce mardi 7 janvier.

Pas d'apocalypse routière

Premier point : l'apocalypse routière n'a pas eu lieu autour de la presqu'île. Les samedis quelques zones de congestion sont apparues du côté de la rue de la Barre, alors que les gilets jaunes manifestaient. Des bouchons ont pu se former sur le quai Jules Courmont dans le sens Nord à cause du report des flux de la rue de la Barre et la gestion de l'accès aux parkings République et Cordeliers. Autour du périmètre, le trafic automobile est resté stable, avec une très légère baisse de 1 %. Le constat est le même sur un périmètre plus large de la Croix-Rousse à Confluence.

Le mercredi et jeudi, les tendances sont proches, avec des difficultés rue de la Barre et quai Jules Courmont, mais aucun impact significatif du trafic autour du périmètre (+1,3 % le mercredi, - 3 % le jeudi).

Pour les parkings, leur fréquentation ont baissé le samedi, - 12 %, mais ont augmenté lors du test en semaine (avec des problèmes en entrées et sorties et plus d'une heure pour quitter celui des Cordeliers le jeudi 21 novembre. À noter, en semaine, des tensions sont apparues entre les agents de sécurité chargés de contrôler les automobilistes qui avaient accès au périmètre et ces derniers. Cinq agressions ont demandé l'intervention de la police municipale, une plainte a dû être déposée. Cela confirme notre constat (lire aussi : Piétonnisation à Lyon en semaine, pas la magie du samedi).

Enfin, dans le périmètre, durant les samedis, la baisse du trafic était de 75 %, sans effet de compensation avant et après, 62 % en semaine, avec un léger effet de compensation le soir.

Plus de piétons, mais moins de vélo le samedi, pas en semaine

Les samedis, les flux piétons ont augmenté de 19 % par rapport à un samedi normal, le mercredi, c'est un petit + 3,1 % qui a été constaté sur toute la journée, mais un + 15 % sur le créneau 17h à 18h.

Point intéressant : une baisse des flux vélo de - 8 % a été constatée les samedis de l'expérimentation, "Plus elle attire de piétons, plus l’usage du vélo diminue". En semaine, c'est la tendance inverse qui a été constatée avec + 11 % de cyclistes le mercredi 20 novembre.

La question des commerçants

L'un des points au cœur des débats était l'impact de la mesure sur les commerces, avec néanmoins deux points importants : le caractère court des expérimentations ne permet pas aux clients de s'adapter dans le temps et aucune offre événementielle n'avait été mise en place spécialement autour de ces tests. Les échantillons des différents sondages sont également très faibles et les méthodologies variées, car laissés aux regroupements de commerçants ou la CCI.

Ainsi, du côté de la CCI, avec 80 répondants via courriel pour les samedis et 44 répondants via courriel pour le mercredi et jeudi : 45 % considèrent la piétonnisation de manière très négative, 24 % plutôt négative, 14 % sans effet, 14 % plutôt positive et 3 % très positive.

Au total, plus de 4 000 commerces sont présents dans le périmètre élargi, dont 1 300 dans la  zone d’expérimentation. À la lumière de ces échantillons minuscules, il reste difficile de se faire une idée sur le véritable impact.

Le bruit baisse, pour la qualité de l'air, il faudra attendre

Atmo-Auvergne-Rhône-Alpes livrera son bilan en février. En attendant, une donnée précise montre l'un des impacts les plus marquants sur la piétonnisation : le bruit. Les samedis, le volume sonore a baissé de un à trois décibels, cette échelle étant exponentielle, cette diminution est suffisamment importante pour avoir été remarquée directement par tous ceux qui ont expérimenté la piétonnisation. En semaine, le gain est de deux à quatre décibels. In fine, si aucun véhicule n'avait circulé dans le périmètre le gain estimé serait de huit décibels.

Une mesure qui plait aux piétons 

Plusieurs sondages ont été menés sur le terrain durant les journées de piétonnisation, mais aussi lors d'autres sans cette mesure, avec des échantillons qui allaient de 400 à 800 interrogés.

"L’impact des expériences piétonnes sur le mode de transport utilisé par les visiteurs est réel, mais modéré: la part des visiteurs qui sont venus en voiture baisse logiquement (de 22 % à 17 %), ainsi que celle des vélos (de 5 % à 3%), au profit de la marche à pied (de 29 % à 34 %). Avec ou sans expériences piétonnes, les TCL restent le mode d’accès prépondérant (40 %) à ce secteur de la Presqu’Ile", précise le bilan pour les samedis.

Durant ces mêmes journées, les points qui montrent une forte progression de la satisfaction sont : "le niveau de bruit, l'environnement sonore, la facilité pour se promener quand on est en famille avec des enfants, la qualité de l'air, l'absence de pollution, la facilité des déplacements pour les personnes fragiles, comme les personnes âgées ou handicapées et la présence de la végétation, d'arbres, de plantes ou de fleurs".

En semaine, le bilan sur le ressenti est plus mitigé avec seulement trois points en progression : "le niveau de bruit, les conditions pour circuler à vélo, les conditions pour stationner à vélo", tandis que quatre autres baissent : "la facilité de déplacements pour les personnes fragiles, la présence de végétation, d’arbres, de plantes ou de fleurs, les conditions pour circuler en voiture sur le secteur, les conditions pour stationner en voiture sur le secteur".

Encore une fois, comme nous l'avions souligné, l'ambiance en semaine était très différente, avec des conducteurs qui pouvaient circuler plus rapidement et l'apparition régulière de tension dans le périmètre (lire aussi : l'art de se faire engueuler par les conducteurs).

Impossible retour en arrière

Dans tous les cas, la limite de ces études demeure le caractère éphémère de la piétonnisation à chaque reprise. Rien n'indique que dans un temps plus long, les résultats ne seraient pas différents.

Comme nous l'écrivions dès le 28 septembre, le retour en arrière semble désormais impossible et le déploiement d'une forme de piétonnisation dans la presqu'île de Lyon semble aller dans le sens de l'histoire (lire ici).

L'installation de bornes rétractables, lancée par la métropole, pour quadriller l'ensemble du périmètre d'ici un an offrira l'outil idéal pour imaginer la piétonnisation qui suivra : pérenne, éphémère, en fonction des horaires... Place désormais aux candidats aux élections municipales et métropolitaines pour imaginer le centre-ville de demain.

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