L’association "La parole libérée" a annoncé que le cardinal Barbarin et six autres personnes seraient cités à comparaître au tribunal correctionnel de Lyon, le 19 septembre prochain. Cette démarche est une réponse à l’enquête classée sans suite pour "non-dénonciation" d’agressions sexuelles sur mineurs et "non-assistance à personne en danger" du 1er août 2016.
Le 1er août 2016, l’enquête pour "non-dénonciation" et "non-assistance à personne en danger" dans laquelle le cardinal Barbarin avait été épinglé était classée sans suite pour prescription. Après 10 mois de concertation, un dossier de citation a été envoyé ce mardi matin par les victimes et leurs avocats. Une première audience "de consignation des parties civiles" est prévue, le 19 septembre prochain, au tribunal correctionnel de Lyon.
"Ce n’est pas l’affaire Barbarin"
Nadia Debbache, avocate au barreau de Lyon, s’est dite "frustrée", par "la décision de classement sans suite d’août dernier". Avec plusieurs avocats de Paris, Lyon ou encore Marseille, une "consultation juridique" a été lancée. Plusieurs personnes seront alors citées à comparaître devant le tribunal correctionnel de Lyon en septembre. "Pour ce dossier, dix victimes se sont constituées partie civile, pour agression sexuelle sur mineurs de 15 ans par personne ayant autorité, et dans un cas, pour viol", explique l’avocate. Parmi ces dix victimes, cinq sont prescrites.
Sept personnes sont mises en cause dans cette affaire. "Le cardinal en fait partie, mais ce n’est pas l’affaire Barbarin", précise maître Nadia Debbache. Parmi les 6 autres intéressés : l’archevêque d’Auch Maurice Gardès, l’évêque de Nevers Thierry Brac de la Perrière, l’ex-supérieur hiérarchique de Bernard Preynat Xavier Grillon, Régine Maire, Pierre Durieux (directeur du cabinet du cardinal Barbarin) et Luis Ladaria, secrétaire de la congrégation de la doctrine de la foi au Vatican. Pour Emmanuelle Haziza, avocate au barreau de Lyon et candidate aux législatives dans la 6e circonscription du Rhône, "ce n’est pas l’affaire d’un seul homme, mais d’une institution".
Vers une jurisprudence des délais de prescription ?
François Devaux, Président de l’association de victimes La parole libérée, affirme clairement son espoir de jurisprudence. "On veut apporter un débat qui soit crédibilisé par une action de justice. Notre objectif est la jurisprudence d’une loi basée sur la moralité et la prévention". La démarche de l’association s’inscrit dans une volonté de rallongement des délais de prescription, aujourd’hui fixés à 3 ans.
Jean Boudot s’explique. "L’ancien Code pénal disposait qu’une infraction devait être aussitôt dénoncée. Mais dans le nouveau, le 'aussitôt' a été supprimé. La prescription court alors dès que la justice est informée, donc les faits (dévoilés en 2015) ne seraient pas prescrits". "C’est la raison pour laquelle nous saisissons le tribunal correctionnel de Lyon", a-t-il fait valoir.
"Il y a marqué 'pédophilie' sur mon front"
François Devaux explique que ce recours "n’est pas un moyen de faire de (lui) une star, mais de faire progresser la société". "Il y a marqué 'pédophilie' sur mon front. Ce combat est un investissement qui prend le dessus sur tout ce qu’il y a dans vos vies", témoigne le chef d’entreprise. "On a déjà fait un bout de chemin, si l’on remballe maintenant, qui s’en occupera ?"
Pour Emmanuelle Haziza, il existe une "philosophie du silence". La jeune avocate décrit "une vieille mentalité qui perdure, et qu’il faut détruire. Elle n’est pas propre à l’église, mais à toutes les institutions dont les membres se protègent entre eux". Il faudrait alors "rompre ce silence". Pour cela, Emmanuelle Haziza explique que "plus le champ d’application de la loi de non-dénonciation est large, plus les personnes pourront parler, et les plus vulnérables être protégées".