L’assassinat des journalistes de RFI est révélateur de l’instabilité dans le Nord Mali. Dans leur rapport remis en juillet dernier, la conclusion des rapporteurs Christophe Guilloteau et Philippe Nauche sur l’opération Serval révélait déjà une difficulté : “Le scénario d’une sortie de crise malienne reste incertain.” Sur place, la présidente de l’ONG Femnet tient un discours très critique.
La région de Kidal reste une zone fragile mais stratégique pour le gouvernement malien. Lors d'une visite en France, à la mi-octobre, Mama Koité Doumbia, présidente d'une ONG malienne, a interpellé publiquement François Hollande, expliquant que son pays n'en avait pas fini avec la guerre. “Pour les Maliens, si Kidal n'est pas libre, le Mali n'est pas libre”, nous avait-elle expliqué.
Elle reproche aux groupes rebelles de reprendre les hostilités lorsque l'armée malienne entre dans la ville. “La France devait aller jusqu'au bout, mais aujourd'hui le Mali n'est pas uni”, regrette-t-elle. “Le drapeau du MNLA flotte encore sur Kidal”, observe-t-elle.
Kidal, ville stratégique
Kidal est la porte du Nord Mali, ouvrant sur le massif de l'Afga des Ifoghas, territoire où étaient réfugiés les combattants d'Aqmi au début de l'opération Serval, en janvier 2013. En menant un combat dissymétrique face aux troupes françaises d'une part et aux troupes tchadiennes dans l'Adrar, Aqmi a subi d'importantes pertes. Deux de ses principaux chefs ont péri en février.
Aujourd'hui, le potentiel résiduel d'Aqmi reste difficile à évaluer. Concernant l'assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, Christophe Guilloteau n'y voit pas la marque du groupe armé djihadiste. “Les enlèvements leur permettent de négocier”, explique le rapporteur de l'opération Serval à l'Assemblée nationale.
Les Touaregs rêvent encore d’indépendance
Autre point délicat à résoudre pour le gouvernement malien : la négociation avec les troupes touarègues. Christophe Guilloteau admet que le MNLA, le principal groupe touareg, est toujours dans l'espoir d'acquérir une certaine autonomie autour de Kidal. “Ils espèrent, comme en Algérie, que la région comporte de l'uranium ou du pétrole”, avance le député. À la veille des élections législatives du 24 novembre, les troupes françaises restent massivement au Nord Mali. Environ 3 000 hommes y sont encore dispersés. Au plus fort de l'opération Serval, ils étaient 5 000 répartis dans tout le pays.
150 soldats français supplémentaires à Kidal
Actuellement, la plupart des opérations des forces armées sont des interventions ciblées pour déloger des groupes djihadistes isolés. À Kidal même, 150 soldats français supplémentaires viennent d'arriver ce mardi, s'ajoutant aux 200 déjà sur place. Ce territoire demeure clairement instable : l'assassinat des deux journalistes en est la démonstration. Il révèle l'incapacité des forces armées (armées française et malienne et forces de l'Onu) à contrôler la zone.
On mène les Français en bateau avec le Mali comme avec la Libye ou la Syrie : les vrais enjeux sont masqués. Regardez une carte et vous verrez notamment que le Mali est à peu près au sud de l'Algérie. Or, des gens informés affirment que les mêmes intérêts qui en veulent à la Syrie, ou qui ont attaqué la Libye, veulent maintenant s'en prendre à l'Algérie et aux richesses de son sous-sol. C'est aussi cela que la France prépare au Mali.