Ses propos ont créé la polémique vendredi. Mais qu'a vraiment voulu dire le cardinal Barbarin ? A-t-il voulu faire l'amalgame entre "homosexualité", "inceste" et polygamie. Le diocèse n'assume en aucun cas le coup de com, et certains regrettent l'imprécision des propos du cardinal. Mais Barbarin ne cache pas qu'il souhaite ouvrir le débat sur le changement de cadre du mariage. La LGBT dénonce "une stratégie de communication" rodée à un mois de la présentation du projet de loi gouvernemental à l'Assemblée. Précisions. (Article mis à jour le 19 septembre à 10h28)
Un rien provocateur le cardinal Barbarin ? Ecrire le contraire serait mensonger. Un mois après avoir estimé "qu'un Parlement, ce n'est pas Dieu le Père" dans les colonnes du Figaro, l'archevêque de Lyon a remis le couvert vendredi déclarant à propos du mariage homosexuel sur RCF (lire ici) : "Après, cela a des quantités de conséquences qui sont innombrables parce qu’après ils vont vouloir faire des couples à trois ou à quatre, après, un jour, peut-être, je ne sais pas quoi… l’interdiction de l’inceste tombera. Enfin, à partir du moment où il y a quelques repères qui sont majeurs (…) c’est une rupture de société mais je pense que tout le monde en est conscient".
Barbarin mal interprété selon certains
Ses propos, où il est question d’inceste et de "polygamie" selon la dépêche AFP publiée vendredi, ont choqué et le buzz est très parti vendredi sur les réseaux sociaux vendredi. La porte-parole du gouvernement, la lyonnaise Najat Vallaud-Belkacem a décroché son téléphone pour appeler l'archevêque, elle a tempéré lundi estimant qu'il s'agissait d'une"caricature de la pensée du cardinal". Selon elle, Barbarin aurait simplement voulu "évoquer des règles qui régissent la vie en société, comme l'interdiction de l'inceste, de la polygamie, expliquant que si l'une d'entre-elles tombait alors c'était la porte ouverte à faire tomber toutes les autres. Mais, en aucun cas, le cardinal n'a voulu dire, comme certains l'ont prétendu, que les couples homosexuels se prêteraient plus à la polygamie ou à l'inceste que les autres."
"C'est une rupture de société. Après, ça a des quantités de conséquences qui sont innombrables. Après, ils vont vouloir faire des couples à trois ou à quatre.... Après, un jour peut-être, l'interdiction de l'inceste tombera", a pourtant déclaré vendredi le cardinal repris par l'AFP. Dans la phrase de l'archevêque, le "ils" est imprécis, on ne sait pas qui il désigne : les homosexuels, les Français, les législateurs .... tempèrent certains. Allant dans leurs sens, le diocèse a publié un communiqué samedi 15 septembre sur son site Internet précisant que le phénomène de "polyamour" et "d'amour à plusieurs" se développait en France chez tous les sexes. Dans l'entourage du cardinal, on précise que "le cardinal n'a en aucun cas voulu assimiler un comportement (l'homosexualité) à un autre (l'inceste ou l'amour à plusieurs)". Mais le mal était fait. "Après la dépêche, certains ont pu mal interprété Barbarin" regrette un collaborateur de la ministre aux Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem.
Une "stratégie de communication" dénoncée par les homosexuels
Le collectif Lesbian, gay, bi et trans (LGBT) de Lyon s'insurge ce mercredi contre la "stratégie de communication" du Cardinal Barbarin qui ne trompe plus personne selon le collectif. L’archevêque a affirmé mardi sur France Info que ses propos avaient été "mal reflétés" par les journalistes, dénonce la LGBT.
Au contraire, selon l'association le cardinal est coutumier de ces "amalgames nauséabonds" et accuse systématiquement les médias de mal relayer ses propos ce qui relève plutôt d'une "stratégie de communication" que d'un manque de professionnalisme des journalistes, selon la LGBT.
L'association rappelle à ce propos l'épisode de novembre 2011 lorsque l'archevêque avait déclaré à Lyon capitale "je constate que chaque génération produit des anticorps dont elle a besoin. Devant une agression microbienne, notre corps sait se défendre, et du point de vue spirituel, c’est pareil" à propos de l'amour lesbien, bi, gay et trans. "Le Cardinal s’était permis de faire une comparaison odieuse pour redire sa vive opposition aux LGBT, avant de faire retomber cette responsabilité sur les journalistes de [notre] journal" rappelle la LGBT.
Ouvrir le débat sur le mariage homosexuel
Interrogé sur sa "stratégie de communication" le diocèse a démenti avoir voulu "orchestrer un coup de com" sur RCF et TLM. "Si c'était le cas, nous n'aurions pas choisi ces médias" plaisante-t-on dans l'entourage du cardinal. En revanche,si cela a pu servir à relancer le débat sur le mariage homosexuel, "alors c'est une bonne chose" estime le diocèse. "Le gouvernement pense que le débat a été tranché durant la campagne présidentielle. Les Français choisissant François Hollande, sachant que Nicolas Sarkozy n'avait pas la même position sur le mariage homosexuel". Mais le cardinal, tout comme l'Eglise en général, souhaite un débat plus large.
"On change le cadre du mariage, très bien. Mais que dirons nous quand d'autres comportements illégaux seront revendiqués ? Quel cadre opposeront nous aux prochaines évolutions législatives ? Quand un frère et une soeur ou trois majeurs consentants voudront se marier, que leur répondra-t-on ?" estime un collaborateur du cardinal, joint par Lyon capitale.
Aussi, le cardinal souhaite que "ce projet de loi soit l’objet d’un large débat. On ne peut pas faire une loi sans consulter les Français, si on est en démocratie (…). Sur un sujet aussi profond et qui touche à ce point tout le monde, il faut vraiment donner la parole à tous les citoyens." Le projet de loi gouvernemental sur le mariage et l'adoption par des couples homosexuels sera présenté le 24 octobre prochain au Parlement.