La métropole entend renforcer l'attractivité des métiers du "prendre soin", alors que plus de 5000 postes demeurent à pouvoir dans le Grand Lyon. Elle lance notamment une plateforme numérique dédiée au recrutement et à la formation.
Le territoire métropolitain compte aujourd'hui 7200 professionnels dans l'aide à domicile, 8800 dans les établissements pour personnes âgées et handicapées, et 7669 assistants et assistantes maternelles, selon la métropole de Lyon. En face, ce sont plus de 5000 postes pour lesquels il y a des besoins, dont 85% sont "jugés difficiles à pourvoir".
En parallèle, les besoins explosent comme partout en France, notamment du fait du vieillissement de la population et d'une volonté croissante des personnes âgées de demeurer à domicile le plus longtemps possible pour conserver leur autonomie. Une tendance qui n'est pas prête de s'inverser. "En 2050, les plus de 70 ans représenteront près de 50% des habitants de la métropole de Lyon", a rappelé le président de la métropole Bruno Bernard lors d'une conférence de presse ce lundi 14 novembre, à l'occasion du lancement de la première "quinzaine des métiers du prendre soin". Derrière cette expression se cachent les métiers d'auxiliaires de vie, d'assistantes de vie, d'agents de services hospitaliers, d'aides-soignantes en établissements à domiciles et d'assistants et assistantes maternels.
L'initiative de la métropole, à travers différents événements, a pour but de braquer les projecteurs sur ces professions essentielles, difficiles, souvent dévalorisées et mal rémunérées, exercées dans près de 100% des cas par des femmes. "Nous voulons susciter des vocations mais aussi conserver les professionnels qui exercent ces métiers" explique Pascal Blanchard, vice-président délégué à la santé, aux politiques des solidarités, du grand âge et du handicap, alors que l'abandon de ces professions est devenu massif. Du côté des assistants maternels, par exemple, "le nombre de professionnels diminue de 7% par an”, précise ainsi Lucie Vacher, vice-présidente chargée de l'enfance. En 2019, le territoire métropolitain comptait 8911 de ces professionnels en exercice, ils n'étaient plus que 7669 au 31 décembre 2021.
Pour pallier ce manque, la métropole, convaincue que le problème est notamment dû à une méconnaissance de ces métiers, a officiellement lancé sa plateforme ce lundi, laquelle a déjà accompagné en phase expérimentale 112 personnes, dont 36 ont été embauchées. La campagne de communication veut cibler en priorité les personnes en parcours d'insertion, les demandeurs d'emploi, les salariés du secteur, les étudiants et salariés en temps partiel d'autres secteurs, ainsi que les jeunes.
Nécessité d'une meilleure reconnaissance
Ancienne aide-soignante dans l'Ain, Gwenaëlle Lozachmeur est à 24 ans la marraine de la quinzaine des métiers du prendre soin, pour avoir remporté le titre de championne de France 2022 en aide à la personne. "Ce métier, j'y suis tombée par hasard. J'y ai découvert un échange intergénérationnel qui m'a beaucoup plu. On se retrouve face à une personne qui n'a plus ses jambes et on peut l'aider à retrouver goût à la vie." Mais elle déplore que le métier pâtisse d'une image caricaturale. "Les personnes croient que notre métier se réduit à faire la toilette. Il faut leur montrer qu'il est beaucoup plus variés, et qu'il y a une dimension relationnelle très forte". Pour elle, la reconnaissance passera aussi par la création d'un diplôme reconnu par l'Etat, la profession n'étant aujourd'hui régie que par un titre professionnel.
Présent pour une table ronde, le député LFI François Ruffin, dont les conditions de travail dans les métiers du "care" sont depuis de nombreuses années l'un des principaux chevaux de bataille, a en effet souligné le paradoxe de ces professions dans lesquelles cohabitent chez les professionnels "une grande fierté, un sentiment d'utilité" et des conditions de travail harassantes, "avec des femmes (à 90 ou 95%) qui se demandent comment elles vont remplir le frigo".
Pour lui, la revalorisation symbolique de ces métiers est en marche, accélérée par la crise sanitaire, mais "la question de la valeur matérielle demeure", avec des salaires dépassant peu le SMIC malgré des tâches fatigantes, des amplitudes horaires très larges, du fait de journées fragmentées au cours desquelles les heures de transport ne sont souvent pas ou pas entièrement comptabilisées, dans le cas des aides à domicile. Autre dimension qui a été soulevée, la nécessité de construire des carrières, c'est-à-dire de donner aux personnels du soin la possibilité d'évoluer davantage dans ces métiers. Une nécessité que souligne Gwenaëlle, qui vient de quitter son poste justement pour cette raison.
Métiers du "prendre soin" la novlangue pour gérer la génération Z !