Un 'minimum décent', selon le procureur de la Justice, en deça duquel il lui semblerait difficile de descendre. Si Jean-Olivier Viout a requis une condamnation relativement lourde à l'encontre de Jean-Marie Garcia, il a aussi demandé aux jurés de ne pas répondre oui à la question du crime raciste. S'expliquant longuement là-dessus dans un réquisitoire qui aura duré de plus de deux heures cet après-midi.
Si le crime n'est pas raciste, 'il est pire encore'
Jean-Marie Garcia est-il un type raciste? Sur la série de témoins ayant assisté, à une distance plus ou moins proche, à la scène de la mise à mort par balles de Chaïb Zehaf, ce soir de mars 2006, une seule et unique personne a certifié, sur le tard, avoir entendu des injures raciales. L'accusé n'était toutefois d'aucun groupuscule, d'aucune mouvance raciste, a spécifié Jean-Olivier Viout. 'Si Jean-Marie Garcia avait été raciste, ça se serait su dans Oullins!' a-t-il par ailleurs ajouté, avec l'approbation sonore de plusieurs personnes présentes dans la salle. Le procureur s'est ainsi tourné dans leur direction, bien plus que dans celle des jurés pour articuler sa position sur la question : 'la vérité de la mort d'un maghrébin n'est pas moins importante que celle d'un habitant du 6è ou du 2è arrondissement, il n'y a pas de couleur de peau dans cette cour d'assises'. Et, le procès arrivant à son terme, la question du racisme de l'accusé n'a en réalité jamais été centrale dans les débats, jusqu'à ce que Bernard-Henri Lévy, le médiatique philosophe cité en tant que 'grand témoin', n'intervienne à la barre.
Tacle à BHL
Le procureur a donc recadré avec une grande diplomatie les propos tenus par BHL, qui considérait hier à la barre que ne pas poser la question du racisme pouvait être 'un déni de justice'. 'Il faut faire attention', a temporisé Jean-Olivier Viout, pour qui le motif raciste ne doit pas devenir 'un motif-refuge'. 'Nous ne l'avons pas retenu, non pas parce que nous aurions l'épiderme peu sensible en matière de racisme ', a assuré Jean-Olivier Viout. 'Il n'y a pas dans cette cour de frilosité vis-à-vis de cela, bien au contraire', a-t-il ajouté en rappelant plusieurs de ses réquisitions passées et particulièrement sévères, pour des crimes de ce type.
Alors pourquoi Jean-Marie Garcia a-t-il tiré sur Chaïb Zehaf alors que ce dernier était déjà tombé à terre? Pourquoi l'a-t-il 'achevé' sans possibilité de survie, et tenté de s'en prendre également à son cousin? Garcia possédait chez lui un arsenal d'armes impressionnant et, avant d'abattre Chaïb Zehaf, avait fièrement exposée son revolver, dans le bar où était diffusé le match de foot que la victime était venue voir. 'S'il n'est pas raciste, le crime est pire encore', a lancé l'avocat général, décrivant une scène de meurtre très froide, 'glauque', et estimant que Jean-Marie Garcia, dangereux, n'avait aucun égard pour autrui et pour la vie humaine. Il a donc demandé aux jurés de prononcer au minimum une peine de 25 ans de réclusion, et dix ans de suivi socio-judiciaire à sa sortie de prison. Jean-Olivier Viout s'est enfin directement adressé à Garcia, le conjurant 'd'assumer la peine', et s'engageant auprès de lui à ce que les ponts ne soient pas coupés, durant son séjour en prison, avec ses trois enfants. Verdict demain