Devant deux amphis bondés, la conseillère régionale à la culture et nouvelle secrétaire du PS chargée des questions de société, s'est questionnée sur la comparaison entre les Etats-Unis et la France : "Est-ce qu'on ne doit pas considérer, au fond, que le "péché originel" de l'esclavage et de la ségrégation raciale aux Etats-Unis, ce que Randall Kennedy a appelé le "déshonneur originel", que la France n'a pas connu, n'interdit pas de façon évidente toute comparaison entre les deux pays ?" Elle a ajouté : "si on devait faire la comparaison entre les Etats-Unis et la France, le seul groupe envers lequel la France a ce malaise et le besoin de réparation, ce sont les Juifs".
En réaction à ces propos, certaines personnes ont quitté l'amphi.
Par la suite, l'un des deux conférenciers, l'historien Pap Ndiaye a été vivement applaudi lorsqu'il a vertement repris l'élue : "Je suppose que votre langue a fourché parce que la France a "légèrement" connu l'esclavage. Ce que vous dites me semble très révélateur d'une position française classique qui considère, au fond, que "l'esclavage, c'est les Etats-Unis". L'esclavage est fondamental en France. Et plus on travaille sur ces questions, plus on s'aperçoit que l'esclavage a été absolument central y compris pour la France métropolitaine".
Contactée par Lyon Capitale, Najat Belkacem estime qu'elle a été mal comprise : "Je n'ai jamais dit que la France n'avait pas connu l'esclavage. Je me demandais si cette comparaison était opportune dans la mesure où, aux Etats-Unis, l'esclavage et surtout la ségrégation raciale qui a suivi, sont constitutifs de l'identité des Etats-Unis alors qu'en France, c'est une histoire oubliée. D'ailleurs, l'historien Pierre Nora, qui travaille sur les lieux de mémoire, ne parle jamais de lieux de mémoire de l'esclavage". Une histoire "oubliée" peut-être, mais toujours très sensible.
(Article paru dans le numéro d'avril de Lyon Capitale)
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