Après 26 ans d'activité, la brasserie historique de Gerland fermera ses portes en novembre pour être réimplantée dans le nouveau quartier de La Saulaie. Mais pour Christophe Fargier, co-fondateur de Ninkasi, il s'agit davantage d'une renaissance que d'une fin.
Le bâtiment du 267 rue Marcel Mérieux, qui abrite pour encore quelques semaines le Ninkasi de Gerland, sera détruit début 2024. Cependant, la fameuse chaîne lyonnaise installera dans le nouvel immeuble (projet KOMBO) un café-concert de 1 400 m2, afin de garder une enseigne sur place. En revanche, le reste des activités va déménager à Oullins, et sous un format quelque peu différent. Christophe Fargier l'indique, on sera bien loin de la simple salle de concert ou d'un pub classique : "On veut que ce soit un lieu de diffusion et de création, qui crée des passerelles entre la culture et la gastronomie". Entretien.
"On travaille sur un lieu éphémère qui naîtra début avril pour préfigurer ce que sera La Saulaie demain."
Pourquoi cette fermeture du Ninkasi de Gerland ?
La raison principale, c'est qu'on a un quartier qui évolue rapidement, avec notamment une pression de l'habitation qui a compliqué une partie de notre activité événementielle. C'est là qu'on s'est intéressé à la Saulaie. On avait dans l'idée de vendre le foncier de Gerland après avoir déménagé, mais la crise Covid a été très pénalisante pour nous, d'autant plus qu'on construisait notre deuxième usine de production à Tarare. On a été contraints d'anticiper la vente des murs, ce qui nous laisse vingt mois pendant lesquels notre établissement emblématique sera fermé, sans autre lieu pour s'y substituer. Donc, on travaille sur un lieu éphémère qui naîtra début avril pour préfigurer ce que sera La Saulaie demain.
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Comment sera votre nouvel établissement de La Saulaie ? Quelles seront les nouveautés ?
L'idée, c'est de faire un tiers-lieu qui sera quatre fois plus grand que Gerland, sur environ 8 000 mètres carrés. On veut proposer aux clients une brasserie, un espace événementiel pouvant accueillir 300 personnes, une offre de restauration qu'on veut opérer avec Nomade Kitchen, avec des chefs invités. En fait, on veut vraiment que ce soit un lieu de diffusion et de création, qui crée des passerelles entre la culture et la gastronomie. D'ailleurs, cette nouvelle salle aura une configuration assise, un peu plus précieuse qu'au Kao pour élargir la scène à d'autres choses, comme du café-théâtre. On a encore plein de surprises.
En fait, on veut vraiment que ce soit un lieu de diffusion et de création, qui crée des passerelles entre la culture et la gastronomie.
En revanche, la presse et les politiques parlent de l'installation de Ninkasi à La Saulaie mais il s'agit d'un collectif d'acteurs dont le Ninkasi fait partie. On a eu une prise de conscience pendant la crise Covid en voyant les acteurs de notre écosystème se retrouver en difficulté. C'est pour ça qu'on a voulu créer un tiers-lieu, pour créer les conditions d'une meilleure résilience de notre écosystème et former un collectif solide, capable de relever les crises qui ne manqueront pas d'arriver.
Quelles valeurs voulez-vous transmettre ?
L'idée, c'est d'être dans la transmission et de penser le monde de demain. C'est comment mieux manger et mieux produire. On est convaincu que par rapport à la société dans laquelle on vit, il faut apprendre à décrypter l'information, à comprendre, à avoir l'esprit critique. Notre tiers-lieu aura une logique d'agora et sera un lieu de débats. Egalement, je pense qu'il faut réapprendre à faire société, à travailler différemment, à coopérer. On veut un lieu très ancré dans son territoire mais ouvert au monde, qui rayonne et crée de la richesse sur notre territoire. Ça tient du rêve mais en faisant tout ça, on aura réussi le projet Ninkasi. Ce lieu sera ce qu'il sera le jour où il démarrera, mais on veut qu'il ait la possibilité d'évoluer et de devenir quelque chose auquel on ne pense pas aujourd'hui.
Notre ambition c'est de devenir une belle marque de bière nationale, de développer un réseau de 80 établissements sur l'ensemble du territoire français et d'exporter notre whisky à l'international
Quel est l'avenir de Ninkasi ?
En plus du projet La Saulaie, notre ambition c'est de devenir une belle marque de bière nationale, de développer un réseau de 80 établissements sur l'ensemble du territoire français et d'exporter notre whisky à l'international. Mais on veut y parvenir dans un modèle économique qui prend soin des gens et de la nature, qui respecte les limites planétaires. On a un vrai défi : que ce développement soit vertueux.
Comment vous sentez-vous avec tous ces projets ?
L'aventure Ninkasi m'apporte tellement d'épanouissement, de plaisir et de belles rencontres. J'ai une certaine fierté parce qu'on a de belles réalisations et qu'on construit de belles histoires. On est une magnifique équipe, qui a un magnifique écosystème autour d'elle, et cette aventure me rend vraiment optimiste sur notre capacité à relever les défis de demain. C'est le pouvoir de l'intention : quand on se met dans l'action de manière collective avec des gens talentueux, tout est possible.