Un Centre d’Accueil et d’Orientation pour migrants a été inauguré ce lundi midi, dans le quartier de la Soie à Villeurbanne. Cet établissement doit accueillir une centaine de migrants et les aider à orienter leurs démarches administratives auprès des autorités.
“Nous sommes là pour vous aider, travaillons ensemble”. C’est par ces mots que Xavier Inglebert, préfet délégué à l'égalité des chances conclut son discours de bienvenue à la centaine de migrants réunie ce lundi midi dans une salle polyvalente du nouveau Centre d’Accueil et d’Orientation (CAO) de Villeurbanne. Situé dans le quartier de la Soie, à quelques minutes à pied de la station de métro du même nom, le centre est installé dans les anciens locaux de l’IUFM, aux abords d’une zone commerciale et industrielle.
Les frigos sont encore en train d’être livrés lorsque les 96 résidents emménagent dans leur nouvelle maison aux murs encore vides de toute décoration. Arrivés début novembre en provenance de Calais, suite au démantèlement de la “jungle”, ces hommes étaient logés jusqu’à présent dans des structures de transit à Lyon et Vénissieux. Le centre répond à un besoin de stabilité pour ces personnes qui ne sont pas juste de passage dans l’agglomération. L’équipe encadrante “accompagnera les migrants dans leurs démarches auprès des autorités, s’assurera de la bonne entente entre résidents et favorisera leur intégration via des ateliers culturels” indique Marc Noailly, président de Forum réfugiés-Cosi, association en charge du fonctionnement de la structure.
“L’accueil des migrants n’a rien d’insurmontable”
Après une rapide visite des lieux, résidents, associatifs, riverains et officiels se réunissent dans une ancienne salle conférence de l’institut pour les traditionnels discours de bienvenue. Avec l’aide d’une interprète en arabe, le maire de Villeurbanne, Jean-Paul Bert, explique son choix de proposer sa commune pour ouvrir le nouveau CAO, “un acte logique de solidarité, qui prouve que l’accueil des migrants n’a rien d’insurmontable”. À la fin de la cérémonie, Xavier Inglebert, adjoint au préfet, confie à Lyon Capitale que la gestion des flux de migrants en Rhône-Alpes et plus particulièrement dans le Rhône, “ne pose pas de problèmes pour l’instant”, contrairement à ce que laissait entendre le président de la région Laurent Wauquiez.
Ce dernier, après s’être opposé à l’accueil des migrants dans la région, avait qualifié de “folie” le plan gouvernemental de transférer en Auvergne-Rhône-Alpes quelque 1784 personnes évacuées de Calais. Selon l’adjoint au préfet du Rhône, ce sont en réalité 750 adultes et 186 mineurs qui ont été accueillis, soit près de 850 personnes de moins que ce qui était prévu à l’origine. Cet écart a permis aux autorités de jouir d’une certaine marge de manœuvre. C’est notamment le cas du CAO de Villeurbanne qui est prévu pour accueillir 108 personnes, mais dont la capacité pourra être rehaussée rapidement en cas de besoin.
Beaucoup de questions en suspens
Si de nombreux migrants rencontrés aujourd’hui affirment être soulagés d’avoir un hébergement fixe, après plusieurs semaines de déplacements entre différentes structures d’accueil, beaucoup de questions restent en suspens. Au niveau pratique, les nouveaux résidents doivent encore prendre leurs marques dans des lieux qui viennent tout juste d’être habilités. Avec “l’installation de mobilier complémentaire, de décoration et l’organisation d’activités, ils devraient plus se sentir comme chez-eux” signale un membre de l’équipe encadrante. Mais c’est surtout l’aspect administratif qui soulève le plus d’inquiétudes parmi des personnes pour qui l’obtention d’un titre de séjour relève parfois de la vie ou la mort. En témoigne la petite dizaine de personnes qui engage spontanément une discussion avec l’adjoint au préfet concernant leur situation. L’heure n’est pourtant pas au règlement au cas par cas et le représentant de l’État repousse les questions à une date ultérieure plus appropriée.
Le cas d’Ahmadzaï, est assez représentatif des inquiétudes de l’assemblée. Ce jeune Afghan est arrivé à Calais début juillet, après un périple de plus de cinq mois à travers l’Asie et la tristement célèbre route des Balkans de la Bulgarie à la Hongrie. À l’écart des tables où se presse une petite foule pour le buffet organisé par la Ville, il explique être arrivé à Calais avec l’objectif de traverser en Angleterre. Parlant couramment anglais, il espérait obtenir le statut de réfugié et reprendre ses études. Mais après des mois de tentatives infructueuses, il a dû se résoudre à revoir ses projets.
Les associatifs et membres de l’administration dans le camp de Calais l’ont convaincu d’accepter le transfert à Lyon. “Ils nous ont dit que si on acceptait, on pourrait faire notre demande d’asile en France, que le traité de Dublin ne s’appliquerait pas à nous, mais pour l’instant on ne nous dit rien en ce sens, on nous a menti pour nous faire partir”, déplore le jeune homme. Le traité de Dublin oblige les migrants à déposer leurs demandes d’asile auprès des autorités du pays d’entrée dans l’espace Schengen. C’est ce que veut éviter Ahmadzaï. Étant entré dans l’espace Schengen par la Hongrie, il devrait faire ses démarches dans ce pays, “mais ce n’est pas un pays accueillant pour les réfugiés” explique-t-il.
Fatigué par des mois de déplacements incessants et de conditions de vie précaires, il semble avoir renoncé à son rêve d’Angleterre. “J’espère juste pouvoir rester en France, j’ai plein de projets pour la suite, la France c’est un beau pays pour moi vous savez”, conclut-il.
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