©PHOTOPQR/LE PROGRES/Maxime JEGAT – OpÈration Vis ma vie TCL-Cycliste -Pascal Jacquesson, DG de Keolis Lyon, fait du tandem au cours de l’opÈration « vis ma vie » entre des conducteurs TCL et des reprÈsentants d’associations cyclistes au centre de maintenance des tramways de Saint-Priest. Saint-Priest 21/03/2019 (MaxPPP TagID: maxnewsworldfour774669.jpg) [Photo via MaxPPP]

Pascal Jacquesson de Keolis Lyon : “Bravo aux clients du réseau TCL”

Le réseau TCL tourne désormais à 100 % à Lyon, tout en accueillant 40 % des usagers. Dans un contexte où il est impératif de retrouver leur confiance, TCL pourrait même renforcer son offre à la rentrée. Pascal Jacquesson, D.G. de Keolis Lyon fait le point sur le déconfinement, mais aussi l’avenir d’un réseau toujours plus multimodal.

Lyon Capitale : Quel est votre bilan de ce début de déconfinement cncernant les transports en commun ?

Pascal Jacquesson : Malgré toutes les inquiétudes entendues à tous les niveaux, c’est un grand succès. Nous sommes le réseau qui a réussi à proposer l’offre de transports la plus importante dès le 11 mai : 85 %. Nous sommes déjà quasiment au maximum. Il y a une belle mobilisation en interne pour permettre cela, le personnel est revenu très vite, on peut leur dire bravo !

Et en ce qui concerne l’obligation du port du masque ?

C’est un deuxième bravo, pour nos clients qui la respectent. Nous avons déployé un très gros dispositif sur le terrain afin d’aider à instaurer et accompagner cette pratique du port du masque qui semblait complexe. Grâce à l’aide de tous, nous avons réussi à ce que les rames de métro et tramways partent avec 100 % des gens masqués. Je trouve très réconfortant ce respect des autres. C’est un beau signe. Les gens sans masque sont devenus très marginaux, des verbalisations ont eu lieu, on doit aussi cette fermeté à tous ceux qui respectent cette obligation.

Comment répondre à votre plus grand enjeu : la confiance ?

Cela commence par une politique de désinfection bien plus intense, que nous avions instaurée avant le confinement. Les métros sont désinfectés au moins trois fois par jour. On a commencé aussi dans les tramways et bus. On ne se contente pas de la désinfection de nuit. Le nettoyage, c’est bien de dire qu’on va le faire, mais on a été l’un des rares réseaux à mettre en place des contrôles du nettoyage, on ne délègue pas juste à des entreprises, nous avons une équipe pour vérifier que tout est fait à 100 % avec plusieurs niveaux de contrôle.

Je suis persuadé que les gens qui ont déjà pris les transports en commun ont vu qu’on pouvait le faire en confiance. Nous proposons un environnement sérieux et maîtrisé. Je vois moins d’interrogation quand certains vont s’entasser dans des lieux moins maîtrisés. Chez nous, c’est sérieux (rires).

Pourquoi choisir de proposer autant d’offres dès le début ?

Avant le déconfinement, nous avons interrogé nos clients sur les attentes, l’offre arrivait en premier, puis le respect du port du masque et les actions de propreté.

Notre challenge c’est qu’il n’y ait pas de cluster TCL, que la propagation ne passe pas par nous, c’est la raison de toutes les mesures : le respect du port du masque, la gestion des flux, la distanciation, l’accompagnement des clients... Cela serait absurde que le premier réflexe soit d’aller vers la voiture. On ne va pas effacer la réussite du Sytral et de la Métropole de Lyon depuis 20 ans, qui a permis à la voiture d’être minoritaire dans le centre de l’agglomération.

Comment évolue la fréquentation ?

Elle monte de manière constante. Nous utilisons un indicateur précis : le taux d’utilisation du réseau par rapport à un jour fort d’hiver, là où on est le plus serré. On prend donc ce jour le plus fort et on compare avec ce qui se passe actuellement. On a ainsi commencé à 25 % au début du déconfinement, puis autour de 40 % début juin. On mesure également le taux de fréquentation par rapport à la même période l’année dernière : on avait dépassé la barre des 40 % fin mai.

On observe quelque chose depuis le 11 mai qui se confirme, ce n’est plus la pointe du matin qui est la plus chargée, mais celle de l’après-midi. La charge est nettement moins forte en début de journée, alors qu’en temps normal c’est la pointe maximale. Les appels au télétravail et au décalage des horaires ont été efficaces.

L’ère de l’hypercroissance de la fréquentation du réseau est-elle terminée ?

Plus on gagne de parts de marché, moins il reste d’irréductibles de la voiture, l’hypercroissance des transports en commun n’est donc pas une fin en soi. Ce qui l’est c’est l’agrément en ville, nous restons hyper urbains, on ne va pas mettre tout le monde à la campagne. Maintenant, le risque de l’étalement urbain, c’est le retour de la voiture, il va falloir peut-être bâtir la ville sur la ville verticalement. Ce sont des enjeux qui dépassent les transports en commun.

Chacun ne peut avoir sa réflexion dans son silo, notre rôle n’est pas que de gérer du transit de masse, mais de savoir comment on maille des solutions performantes, même dans des zones moins denses, pour faire basculer les comportements, comment on s’adresse à tous les déplacements. Ce sont des éléments de réflexion qu’on a en commun avec le Sytral notamment à propos de l’expérimentation des transports à la demande. Nos défis pour demain, c’est de réduire l’individualisme de la voiture.

Comment cela pourrait-il se matérialiser davantage ?

On croit beaucoup à la multimodalité, notre mission c’est de faire reculer la voiture. Transports en commun, marche à pied, vélo, c’est le même combat, on fait partie des convertis, il ne faut pas opposer ces modes et proposer des parcours sans couture. Des choses sont encore à faire notamment pour faciliter le passage des transports en commun au vélo lors d’une même journée et afin d’instaurer un stationnement sécurisé pour les vélos. Des mesures ont déjà été prises avec l’urbanisme tactique en concertation avec le Sytral et la Métropole, cela va dans le bon sens.

Pour la multimodalité, il y a encore le problème de tarification pour un parcours client sans couture, sans la voiture individuelle. Il ne s’agit pas que de faire reculer la pollution, mais de rééquilibrer l’espace public, optimiser l’énergie pour déplacer les gens. Si on ne pense qu’en termes de pollution, demain vous aurez encore des embouteillages, mais avec des voitures électriques et toujours des trottoirs étroits pour les piétons.

La crise ne risque-t-elle pas de faire prendre du retard en matière de transports en commun ?

Il ne faut pas, on ne peut pas. On a été en pilotage très proche durant cette période avec le Sytral, il y a cette volonté de ne pas perdre de temps, de réfléchir à l’offre dès septembre, la plus forte possible. Cette dernière sera un outil de reconquête. Quand la confiance sera totalement revenue, il sera important d’avoir poursuivi les investissements pour accompagner la dynamique des transports. Nous serons une solution aux grands défis de demain, ce que j’ignore c’est si la normale reviendra en 2021 ou en 2022, personne ne le sait pour l’instant, mais nous devrons être prêts.

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