C’est un paradoxe. Bien qu’elle soit très contrôlée, l’eau du robinet suscite la méfiance. Impeccable du point de vue réglementaire, les concentrations en TFA, un polluant éternel ultra résistant et non régulé, inquiètent jusqu’aux responsables de la qualité de l’eau à Lyon.
Cet article fait partie d’un dossier complet sur la qualité de l’eau du robinet à Lyon mais aussi de l’eau en bouteille, depuis la découverte de quantités inquiétantes de pollutions aux perfluorés (PFAS, TFA…) :
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- Une réglementation française peu restrictive sur les PFAS dans l’eau potable
- C'était pire avant ?
- “Même les plus petits peuvent boire l’eau du robinet sans crainte”
- Les problèmes de l’eau en bouteille
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- Eau du robinet à Lyon : que boit-on vraiment ?
- Qualité de l’eau potable à Lyon : les coulisses de la surveillance
“La meilleure eau de France.” En 2010, Jean-Paul Colin, alors vice-président du Grand Lyon chargé de la politique de l’eau, ne tarissait pas d’éloges sur la qualité de l’eau du robinet lyonnais. La Métropole était d’ailleurs tellement fière de son eau qu’elle avait déposé sa marque “Grand’O de Lyon”, véritable signature marketing, pour la mettre en valeur. “Elle ne souffre pas de la comparaison avec l’eau minérale. Elle dispose des mêmes propriétés qu’Evian”, alors considérée comme la référence. Quinze ans plus tard, sa successeur est moins enthousiaste : “L’eau du robinet de notre métropole est parfaitement conforme aux normes sanitaires”, déclare Anne Grosperrin (EÉLV). Même prudence du côté des services de l’agence régionale de santé (ARS) qui, lorsqu’ils sont interrogés sur la possibilité de boire sereinement l’eau du robinet à Lyon, rappellent seulement que “l’eau du robinet est le bien d’alimentation courante le plus contrôlé”.
De fait, du point de vue des normes, tous les voyants sont au vert dans l’eau du principal champ captant de la métropole de Lyon, situé à Crépieux-Charmy. Une bonne nouvelle quand on sait qu’il assure à lui seul 95 % de l’approvisionnement des ménages métropolitains. “Au total, il y a soixante-trois paramètres qui sont suivis dans la réglementation du Code de la santé publique”, dénombre Pauline Messer-Fatoux, responsable de la production pour Eau du Grand Lyon. Bactéries, sulfates, nitrates, fluor, pesticides, dureté, pH… sur tous les critères analysés par les autorités légales, l’eau des ménages lyonnais obtient la meilleure note possible, la certifiant “eau de bonne qualité” (ARS). Plus encore, sensibilisée par trois ans de polémiques sur les PFAS, aussi appelés perfluorés ou “polluants éternels” , l’ARS locale fait figure de bonne élève et anticipe même la réglementation nationale. Là encore, feu vert. La somme des vingt PFAS sélectionnés comme “prioritaires” par l’Union européenne sont bien à un niveau inférieur de ce que demandera la loi en 2026, soit moins de 100 ng/L. En clair : l’eau publique du Grand Lyon est potable, conformément à la réglementation. À l’échelle de la métropole de Lyon, seules les communes de Givors, Grigny, Solaize et Marcy-l’Étoile, soit moins de 3 % de la population, avec de l’eau alimentée par le captage de Grigny et de Ternay, obtiennent des valeurs de PFAS trois fois supérieures au seuil maximal, touchées par les rejets des entreprises Arkema et Daikin au sud de Lyon.
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Du TFA dans les eaux lyonnaises
Mis à part ces exceptions, les autres habitants de la métropole peuvent-ils pour autant boire l’eau du robinet sans crainte ? La réglementation est-elle forcément un gage de salubrité ? C’est là que le bât blesse : l’eau du robinet de Lyon contient au moins un autre perfluoré, non comptabilisé réglementairement et dont on ignore les seuils de toxicité pour l’homme. L’acide trifluoroacétique (TFA), un polluant éternel jusqu’à présent passé sous les radars de la réglementation, avec peu d’études effectuées à son sujet sinon en Allemagne où l’État demande sa classification comme toxique pour la reproduction.
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