Philippe Grillot, docteur des entreprises

Il organise ce vendredi 23 une journée portes ouvertes d'une institution qu'il souhaite toujours plus transparente, plus efficace et avant tout au service de l'économie lyonnaise. Rencontre avec le patron d'un véritable Samu des PME, réputé pour son intelligence et son indépendance.

Lyon Capitale : Ça ne doit pas être marrant d'avoir rendez-vous au Tribunal de Commerce. Quand un chef d'entreprise se retrouve en face de vous ce n'est généralement pas bon signe pour sa boîte : il aimerait sans doute se trouver ...ailleurs !

Philippe Grillot : Erreur, le Tribunal de Commerce n'est pas un mouroir pour les entreprises. Tout mon travail consiste à intervenir tant qu'il n'est pas trop tard, et notre boulot consiste justement à nous battre pour éviter les liquidations injustifiées. J'ai eu des dossiers délicats et que nous avons défendu avec mon équipe car nous pensions que l'entreprise méritait d'être sauvée. Souvent je me suis vraiment battu pour trouver des repreneurs : je ne renonce jamais ! Le Tribunal de Commerce est un allié de l'entreprise mais plus on attend et plus le redressement est compliqué. C'est pourquoi nous avons mis en place une Chambre spécialisée dans la prévention des difficultés de l'entreprise avec un président et 15 juges bénévoles qui sont là pour trouver des solutions avec le chef d'entreprise, faciliter la signature de moratoires avec les créanciers... et lui permettre de sortir de cette impasse.

Et pour quel résultat ?

Nous avons enregistré – 6% de liquidations et de redressements judiciaires cette année. Je pense que les actions de prévention du Tribunal de Commerce et la bonne santé de l'économie lyonnaise y sont pour quelque chose.

Mais après tout, est-il toujours nécessaire de sauver une entreprise ?

Non, car plus de la moitié des entreprises créées ont le germe de la liquidation en elles. Depuis des années, les gouvernements ont mis en place des incitations à la création d'entreprise et nous avons une foultitude de boîtes qui se lancent sans aucun espoir de pérennité. Le sort de beaucoup d'entreprises est déjà scellé à leur naissance car elle n'ont pas de fondation. On les retrouve malheureusement souvent au Tribunal de Commerce entre 6 mois et 3 ans après leur création. Sur les 950 liquidations judicaires que nous avons prononcé l'année dernière, je pense que plus de la moitié n'avait pas de marché ou que le chef d'entreprise n'avait pas les qualités requises pour gérer son entreprise.

Est-ce que le chef d'entreprise culpabilise quand il vient vous parler de ses difficultés ?

Souvent, les chefs d'entreprises arrivent dans mon bureau catastrophés et au bord de la dépression. A ce moment-là, je me considère un peu comme un médecin de l'entreprise. Je prends le temps qu'il faut pour qu'ils ressortent avec un peu de "niaque" et un volume de confiance restauré. Le tribunal est là pour trouver des solutions et leur redonner un peu d'étincelles.

Vous êtes un peu le psy de l'économie ?

Il y a un peu de ça... (rires) Vous savez, il n'y a pas beaucoup d'endroits comme le nôtre où l'on essaye de redonner de la fierté à des gens qui ont l'impression d'être en marge des standards de la réussite économique, de la réussite sociale. Encore aujourd'hui, le dépôt de bilan est vécu comme un échec, il est marqué du sceau de l'infamie. On n'en parle pas, on le cache ! Au tribunal de Commerce, nous essayons de faire comprendre aux chefs d'entreprise qui ont fait leur boulot jusqu'au bout, qu'ils sont totalement dignes d'intérêt !

Quels sont pour vous les modèles de l'entreprise lyonnaise ?

Il y a eu quelques succès retentissants ces dernières années comme Olivier Ginon et son entreprise GL Events. Sur le plan international, j'ai toujours comme référence Boiron qui est un véritable succès, pas une réussite éphémère. Et puis il y a plein de petits patrons et des PME qui cartonnent à l'international et font rayonner une ville que je trouve encore bien trop timide à l'international. Nous sommes bien loin de Milan et Barcelone...

Aimeriez-vous avoir une mission pour développer Lyon à l'international ?

Je termine mon mandat à la tête du Tribunal de Commerce à la fin de l'année et je me considère comme un chef d'entreprise citoyen et engagé. Alors, oui, j'aimerais bien, pourquoi pas, continuer mon engagement public au service de l'entreprise.

Vous retrouvera-t-on sur une liste aux prochaines municipales ?

(rires) Ecoutez, je n'ai pas rassemblé mes 500 signatures pour la Présidentielle, je suis donc disponible... Et plutôt aux côtés de Dominique Perben !

Pour la Présidentielle, avez-vous encore une hésitation ?

Non, je crois qu'il n'y a pas d'hésitation à avoir. Sarkozy est pour moi l'homme qu'il faut aujourd'hui à la France.

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