Les plaintes pour des piqûres dans des boîtes de nuit, bars et festivals s'additionnent à travers toute la France mais les preuves manquent encore pour déterminer la réalité de ces actes de malveillance.
Au 16 juin, 800 plaintes avaient été déposées pour des piqûres, de Lille à Béziers (Hérault) et de Lorient (Morbihan) à Strasbourg, en passant par Lyon, Grenoble, Nancy, Besançon, Bastia ou Valence. 1.098 victimes étaient recensées mais aucune analyse n'a mis au jour la présence de GHB, surnommé "la drogue du violeur", selon la Direction de la police nationale (DGPN), indique l'AFP.
Des symptômes variés
Les symptômes rapportés par les personnes pensant être victimes de piqûre sont variés. Dans une note de synthèse de la DGPN datée du 7 juin, les rédacteurs notent "des effets immédiats" mais aussi des "effets retardés" des piqûres avec parfois des "marques de bleus". Les symptômes vont des "maux de tête" aux "bouffées de chaleur" en passant par des "vertiges" ou "pertes de connaissance", indique l'AFP.
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Aucune substance mise en évidence
A Montpellier, le procureur Fabrice Belargent ne "tient pas de comptabilité" du nombre de cas qui "évolue toutes les semaines". "Jusqu’à présent, nous n’avons mis en évidence aucune substance", souligne-t-il à l'AFP. Le seul cas de détection d'une potentielle substance injectée a eu lieu à Chalons-en-Champagne où "un examen est revenu avec une trace de médicament courant, type anxiolytique léger, non consommé par la victime" a indiqué le parquet.
"Certaines personnes, sans mentir, surestiment le risque de faux positifs, en cherchant à se protéger d'un danger. C'est comme être seul dans une vieille maison. En état de stress majeur vous finissez par entendre les bruits que vous craignez d'entendre"
Thomas Arciszewski, chercheur en psychologie sociale
Une enquête pour "dénonciation mensongère"
Alors qu'une enquête pour "dénonciation mensongère" a été ouverte à Orléans après la plainte d'une jeune femme de 19 ans, certains professionnels s'inquiètent du risque d'emballement, aucune contrepartie associée, vol ou violences, n'ayant été identifiée.
"Il y a une véritable psychose lors de soirées ou d'évènements regroupant beaucoup de monde", a expliqué à l'AFP le Dr Mounir Benslima, patron de l’unité de médecine légale du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Nîmes, où 47 cas ont été recensés par la Croix-Rouge début juin.
Mais pour le médecin, ces cas ne seraient en fait, pas sérieux : "Ca ne veut pas dire que 47 personnes ont été volontairement piquées, même par des imbéciles qui jouent à faire peur. C’est simplement des personnes qui croient avoir été piquées et qui peuvent avoir été griffées ou qui ont été prises de malaise sans qu’il y ait un lien avec des piqûres", juge le médecin auprès de l'AFP.
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Se protéger d'une "menace parfaite"
Alors, réalité ou psychose collective? Le chercheur en psychologie sociale Thomas Arciszewski, interrogé par l'AFP sur la logique des rumeurs et la gestion de la peur parle d'une surévaluation potentielle du risque: "Sans préjuger de la réalité des faits, cette histoire de piqûre est une menace parfaite: nous n'en connaissons ni la cause, ni les conséquences, et le cerveau humain n'aime pas l'incertitude et le non contrôle".
Le spécialiste explique que les mécanismes de protection du cerveau humain sont propices à l'invention: "Certaines personnes, sans mentir, surestiment le risque de faux positifs, en cherchant à se protéger d'un danger. C'est comme être seul dans une vieille maison. En état de stress majeur vous finissez par entendre les bruits que vous craignez d'entendre", confie-t-il à l'AFP.
"Sans préjuger de la réalité des faits, cette histoire de piqûre est une menace parfaite: nous n'en connaissons ni la cause, ni les conséquences, et le cerveau humain n'aime pas l'incertitude et le non contrôle"
Thomas Arciszewski, chercheur en psychologie sociale
Le "partage social" du danger
Pour lui, la suite logique est de le faire savoir: "l'une des solutions qui fonctionne très bien est le partage social, parler du danger autour de vous, aux autorités, est un réflexe de régulation des émotions très efficace", conclut Thomas Arciszewski.
En attendant les avancées des enquêtes pour faire la lumière sur ces affaires de piqûres sauvages, dans le cas de personnes suspectant une agression à la seringue, le CHU de Dijon conseille de "ne surtout pas uriner avant prise en charge" et de "rejoindre un service d'urgences le plus rapidement possible".
Des événements comparables avaient été dénoncés à l'automne dernier au Royaume-Uni avec une vague de témoignages d'étudiantes droguées à leur insu par des injections en boîtes de nuit.
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