Loulou Dedola
Loulou Dedola sur le plateau de « 6 minutes chrono », de Lyon Capitale

"Plus on va vers une laïcité sans aucune concession, mieux ça vaudra"

Loulou Dedola est scénariste et chanteur. Fils d'immigrés, il revient sur le plateau de "6 minutes chrono" sur l'interdiction de l'abaya dans les écoles.

Pour cette rentrée scolaire, le ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal, a annoncé l'interdiction du port de l'abaya, une robe traditionnelle portée par certaines élèves musulmans dans les écoles publiques.

"Lorsque vous rentrez dans une salle de classe, vous ne devez pas être capable d'identifier la religion des élèves en les regardant" a-t-il déclaré.

Lundi 4 septembre, 298 personnes se sont néanmoins présentées vêtues de l'abaya. Après explications par les chefs d'établissement, si la grande majorité a respecté la règle, 67 ont malgré tout refusé de l'enlever.

A l'échelle des 5,6 millions de collégiens et de lycéens (52% de ces derniers sont favorables au port de signes religieux en milieu scolaire, sondage Ifop de mars 2021), cela ne représente rien.

Pour autant, considère Loulou Dedola, qui intervient régulièrement auprès des jeunes en banlieue, «  ceux qui la sortent (la religion, NDLR) de la sphère privée ne le font pas, bien souvent, par conviction religieuse mais ont des arrières-pensées politiques ».


"Je considère que ceux qui sortent la religion de la sphère privée ont des arrières-pensées politiques. Le halal, le voile, le qamis, l'abaya sont le cheval de Troie des islamistes"


Pour ce fils d’immigrés italien et chypriote, "enfant de la banlieue lyonnaise" , comme il aime à se définir, le port de l'abaya est pourtant tout sauf anodin. Pour lui, interdire le port de l'abaya à l'école, était "ce qu'il fallait faire". « Plus on va vers une laïcité sans aucune concession mieux ça vaudra". Intervenant dans les quartiers, notamment à travers l'association musique et Ciné Banlieue, il estime "la religion doit rester dans la sphère privée."

Avant de préciser ne pas souhaiter que le gouvernement "se refasse une vertu sur le dos des adolescentes musulmanes".


Lire l'entretien "Grande gueule" de Loulou Dedola publié dans le magazine papier de juilet-aôut:  “Contrairement à ce que dit Darmanin, il y a bien des endroits où l’on n’est plus en République à Lyon”

Loulou Dedola sera en concert samedi 23 septembre, à partir de 21h au P.L.O d'Oullins à l'occasion de "La Marche des 21",  pour 21 évènements, organisés pendant 21 heures à Oullins et Pierre-Bénite (Métropole de Lyon).


Retranscription intégrale et textuelle de l'entretien avec Loulou Dedola

Guillaume Lamy : Bonjour à tous et bienvenue dans cette nouvelle émission de 6 minutes chrono. Nous recevons aujourd'hui Loulou Dedola. 

Loulou Dedola : Bonjour.

Guillaume Lamy Loulou, vous êtes scénariste, artiste et écrivain. Les lecteurs de Lyon Capitale vous ont découvert ou redécouvert dans la rubrique grande gueule de Lyon Capitale, la rubrique historique. Dans cette rubrique, vous disiez ne pas céder à la question de l'unité républicaine. Justement, en cette rentrée scolaire, le ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, a interdit le port de l'abaya et des qamis qui avanient fait grand bruit pendant l'été. Est-ce que c'est une bonne solution pour vous ? 

Loulou Dedola Oui, incontestablement. En tout cas, pour moi, c'est ce qu'il fallait faire. Je pense que plus on va vers une laïcité sans aucune concession, mieux ça vaudra.

Guillaume Lamy : La laïcité, ça doit souffrir d'aucune concession, selon vous ? 

Loulou Dedola Vous savez, les gens connaissent mes convictions. Moi, je suis d'inspiration kémaliste. Pour moi, la laïcité, c'est sans concession parce que la religion doit rester dans la sphère privée. D'ailleurs, je considère que ceux qui la sortent de la sphère privée ne le font pas bien souvent par conviction religieuse, ce qui est le cas de toutes ces tenues fréristes, de toutes ces attitudes qui nous viennent des frères musulmans, on le sait, le halal, le voile, le qamis, l'abaya, tout ça, c'est le cheval de Troie des islamistes, des Frères musulmans. Et ça fait l'affaire ni des musulmanss ni des autres et donc tant mieux qu'il l'ait interdit. Ceci dit, le ministre précédent, lui, trouvait que c'était au proviseur de décider ou au principal. Il y a un va et vient un petit peu démagogique. Ce que je ne souhaiterais pas, c'est que ce gouvernement se refasse une vertu sur le dos des citoyens musulmans et sur le dos des adolescentes et des adolescents musulmans. Voilà, je suis contre le port de l'abaya, mais je me méfie beaucoup de l'attitude de ce gouvernement sur ces questions.

Guillaume Lamy Vous vous considérez comme un enfant de la banlieue lyonnaise. Quand vous regardez aujourd'hui la banlieue d'avant et la banlieue d'aujourd'hui, vous direz que l'évolution, vous la voyez comment ?

Loulou Dedola Déjà, la principale évolution entre la banlieue d'avant et la banlieue d'aujourd'hui, c'est la pauvreté. C'est une avancée incroyable de la pauvreté. On a entre 10 et 13 millions de gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Dans certains quartiers, c'est 70% de la population, 50% des jeunes de moins de 25 ans au chômage. Donc, ça ouvre la voie à tout. Exactement de la même manière que certaines personnes dans certains milieux se dirigent vers l'extrême droite, d'autres vers les islamistes, d'autres vers les trafiquants de drogue. Voilà, il faut du dynamisme économique, il faut du plein emploi, il faut du partage des richesses. Moi, je suis un libéral, convaincu, mais je ne suis pas pour la paupérisation des classes laborieuses des travailleurs. Je trouve ça aberrant.

Guillaume Lamy Alors, le plein emploi, évidemment, on est tous pour le plein emploi, mais le plein emploi, c'est compliqué, comment, ce serait quoi la solution ?

Loulou Dedola
Alors, moi, je ne suis pas un économiste, mais je suis pour des politiques qui créent de l'emploi. C'est très économique comme discussion, mais tant que les gens qui s'enrichissent énormément le font en créant des emplois, ça me va. À partir du moment où l'enrichissement de certaines personnes, et notamment la financiarisation de l'économie, crée du chômage, là, ça me gêne. Je suis pour les entrepreneurs, en fait.

Guillaume Lamy
Oui, oui, j'entends bien vous parler tout à l'heure, effectivement, quand vous parliez des quartiers de la drogue. Je vous en parle, pourquoi ? Parce qu'il y a une récente enquête, enfin, les premiers éléments de l'enquête. Vous vous souvenez, on se souvient de l'incendie terrible, dramatique, de décembre 2022 à Vaulx-en-Vlin, 10 morts, quand même, avec des enfants. Terrible. Les premiers éléments de l'enquête, là, c'est avéré, expliquent que le feu est parti d'un canapé qui avait été installé dans le hall d'immeuble, probablement par des trafiquants de drogue. Le trafic de drogue, ça gangrène les quartiers. Vous connaissez bien le sujet parce que vous avez notamment la drogue, vous en avez parlé dans votre BD sur Kingston, la Jamaïque. Mais là, dans les quartiers, ça gangrène totalement. Qu'est ce qu'on fait ? Qu'est ce qu'on fait concrètement ? Qu'est ce qu'on peut faire concrètement ? Ou est ce que c'est déjà trop tard ?

Loulou Dedola
Comme je le disais tout à l'heure, tout ça, ça fait partie d'une politique globale qui est menée depuis plus de 20 ans et qui appauvrit ces quartiers là et ouvre la voie aux trafiquants de drogue. Mais encore une fois, l'exemple est bien trouvé parce que les premières victimes, ce sont les habitants de ces quartiers. Cet incendie, il a tué qui ? Donc aujourd'hui, il faut, moi je le dis et je le répète partout sur tous les plateaux, il y a des gens qui veulent installer des policiers de partout. Il y a des gens qui veulent taper sur les jeunes. Il y en a d'autres qui veulent taper sur les policiers. Je l'ai déjà dit. Il y a des gens qui veulent envoyer des éducateurs, des gens qui veulent construire des mosquées. Il y a des gens qui veulent détruire les mosquées. Voilà, on a tout essayé. Je le redis encore une fois, il y en a qui veulent la banlieue secourue, sauver la banlieue. Moi, je ne veux pas la banlieue secourue, je la veux supprimée. Tant qu'il y aura des grands ensembles, on concentrera des gens qui cumulent tous les problèmes sociaux et économiques, on aura ça dans tous les pays du monde. C'est pareil. Donc on est là, on est surpris. Quelle est la solution ? La solution, c'est qu'il y avait eu un plan qui a été proposé, le plan Borloo. Moi, ça me paraissait très intéressant et le gouvernement a dit non. Par contre, pour s'attaquer à l'abaya, là, il y a du monde, ce qui ne veut pas dire que je suis pour le port de la mer. Ils ont eu raison de l'interdire, mais il ne faut pas faire que ça.

Guillaume Lamy
Vous êtes dans un groupe de musique. On vous voit le 23 septembre, je me trompe, à Oullins.

Loulou Dedola
Le 23 septembre à Oullins, à partir de 21h, ça sera un concert gratuit, un concert dessiné avec sur scène un dessinateur, Luca Ferrara, qui est le dessinateur de la bande dessinée Il était une fois en Jamaïque au PLO. 

Guillaume Lamy
C'est pour l'inclusion des personnes en situation de handicap.

Loulou Dedola
C'est l'association présidée par Cédric Barbiero, et c'est La Marche des 21. C'est un 21 événements sur OUllins et Pierre-Bénite pendant deux jours, pendant tout le week-end. 

Guillaume Lamy
On vous donne rendez-vous pour ce grand concert. Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation. Merci à vous. Et pour plus d'informations, évidemment, www.lyoncapitale.fr. A très bientôt. Au revoir.

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